Chapitre 8

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« Finchingfield est à deux heures à pieds. dit James tandis qu'ils s'éloignaient de la gare.

- Connais-tu parfaitement le chemin ? s'étonna Thomas devant sa certitude.

- J'y suis allé, il y a trois ans.

- Ah bon ? Pourquoi faire ? Enfin, si c'est le cas, que fais-tu encore dehors ?

- J'ai... voulu abandonner pendant une longue période. Je me sentais lentement empoisonné par cette affreuse solitude, je ne supportais plus la froid, ni la fièvre... tout ceci ne me contentait plus. J'ai voulu demander de l'aide.

- L'as-tu fait...?

- Non. J'y ai renoncé une fois devant la maison. Je pensais au jugement et à la pitié, j'étais convaincu qu'ils ne m'allaient pas. Je suis donc rentré à Londres... expira-t-il. J'étais différent, à l'époque. J'étais préoccupé par des inconnus qui se fichaient de ma mort comme de ma vie.

- Merde, tu es courageux...

- Non, rit-il, c'est l'inverse, gamin.

- Non, tu te trompes... Tu étais seul et dans les rues si tôt, tu as tant essayé de survivre, tu as fait preuve de tant de résilience, tu n'as ni haine, ni rancœur... Tu n'as pas de peur, mais tu sais exactement ce qui te rend bien. Tu es vertueux...

- Je remercie, Tommy... c'est adorable. Seulement, tu ignores de nombreux détails. Dans tous les cas, tu es courageux.

- M... Moi ? Tu plaisantes ?

- Eh ! non. Tu as accepté ton destin et tu t'es demerdé avec. Tu n'as pas même chercher de l'aide, quand d'autres seraient allés pleurer devant leur foyer. Mais ça, je crois que je te le reproche.

- Pourquoi cela ?

- Parce que tu aurais reçu toute l'aide qu'il te fallait, et ceci sans suivre un parfait inconnu... sourit-il mesquinement. Enfin, le plus important est que tu sois tombé sur un clochard aussi aimable que splendide.

- Tu ne penses pas si bien dire... »

Il bégaya en remarquant le regard soudain rieur de son aîné : « Je... Je voulais dire...

- Merci du compliment, beau brun. »

Thomas rougissait, encore et toujours plus, il s'embrasait à la fois de timidité et de plaisir. Subitement il dit sans ordre, se surprenant horriblement quand il entendit ces mots dont il s'était défendus : « As-tu déjà eu un petit ami ? » Hayden eut un faible mouvement, fronçant les sourcils avec un ton froid : « Pourquoi me demandes-tu ça ?

- Parce... Parce que... balbutia-t-il. Parce que j, je... j'aimerais que tu m'aides au sujet de, um... ma sexualité...? puisque tu es...

- Homo, ouais. coupa-t-il amèrement. On ne t'a pas viré pour cette raison, Tommy ?

- Si...! se reprit-il. Oui, c'est le cas ! justement...! Je veux en avoir l'exacte certitude, je veux être certain de ne pas avoir fait un sacrifice idiot... »

Alexander se tut quelques secondes. Il répondit, le regard incliné : « Ouais, j'ai déjà eu quelqu'un. » Thomas croyait les morceaux de son cœur s'éclater contre ses côtes, il sentait ce déchirement brut et étrange qui l'inondait de malheurs idéals.

« C'était un homme gentil, légèrement plus âgé que moi, mais avec une bonne situation. Il était mignon, pourtant je n'en n'ai jamais été amoureux. ajouta-t-il finalement, le cadet reprenant un semblant de souffle. Il se sentait seul, alors il m'a proposé un marché ; il m'hébergeait et me nourrissait contre quelques services. Je l'aidais majoritairement à entretenir le bar dont il était le propriétaire. La proximité était extrêmement secondaire, mais nous étions tous les deux jeunes, intéressés l'un par l'autre, alors il nous prenait de se laisser aller. C'est de l'histoire ancienne, cela n'a pas beaucoup d'importance. J'avais dix huit ans. »

Une rage ambitieuse et ferme poignardait Thomas à son tour. Son pas s'éclaircit, il lui prenait de grandes foulées que James emboîta en trottinant. Il l'arrêta, attrapant son épaule avec une main inquiète : « Que te prend-il, beau brun ? Es-tu jaloux ?

- J... Jaloux ! Non ! C'est simplement que ce n'est pas la plus idéale des relations... je veux mieux pour toi.

- Ne sois pas ridicule, beauté. Nous vivions confortablement, sans jamais connaître d'algarade. Il ne m'a jamais forcé, moi non plus, et nous n'avons jamais passé le cap. Ce n'était que des baisers prudes, peut-être quelques caresses, et ce uniquement quelques fois, rien de plus. Nous étions seuls tous les deux, et nous nous entendions bien ; la compagnie était devenue nécessaire. La seule différence est qu'il était amoureux, et je ne l'étais pas. Je l'appréciais, évidemment, cependant il était à mes yeux un ami proche, pour lequel je ressentais des attractions, de la gratitude et de l'attachement, jamais plus profond. Il le savait, mais il avait pour moi une affection si intime, qu'il me traitait avec douceur et préciosité malgré tout.

- N'as-tu jamais encore été amoureux ?

- "L'amour est une fleur délicieuse mais il faut avoir le courage d'aller la cueillir sur les bords d'un précipice affreux." Je ne veux pas braver un malheur pour un petit bonheur. J'aime ma présence, elle peut me suffire.

- Oui, elle le fait avec la mienne. »

Hayden rit, passant un bras autour de sa nuque afin de susurrer à son oreille : « Avec la tienne, beau brun. » Thomas rougit férocement, ce à quoi James sourit davantage, si cela était faisable : « Je te remercie.

- Pour ?

- Tes mots doux.

- C'est que je t'aime bien...

- Je l'avais remarqué, beauté. »

Thomas l'observa, un moment absorbé par de fabuleuses rêveries, dans lesquelles James et lui s'unifiaient en un amour. Cet homme était beau, était tout, il n'avait pas de manque, ni de faille, malgré ces conditions de vie miséreuses qui n'avaient rien de sa chevalerie.

« Ne me regarde pas comme ça, Tommy. Tu n'auras rien de moi. Du moins, pas aujourd'hui. Je suis trop crevé pour le sexe.

- Q... Quoi ?

- Tu baves, beau gosse. Voilà ce que je veux te dire.

- M, Merde, pardon, je... je ne voulais pas te gêner...

- Tu ne le fais pas. Mais attends de savoir mon nom et mon âge pour m'imaginer collé à ton cœur. Tu t'attaches extrêmement vite. Sûrement que tu découvres le lyrisme, le vrai... adorable.

- Qu'est-ce qui te fait dire ça ? je ne suis absolument pas attiré par toi.

- Ah ?

- Tout à fait.

- Alors pourquoi rougis-tu dès que je te parle ? »

Thomas devint davantage rouge, ce à quoi Alexander rit à gorge déployée.

« Et puis, insista-t-il, tu as littéralement hurlé vouloir me baiser, la dernière fois.

- M... Moi ? Quand ça ?

- Au club, pardi. Ton regard m'a déshabillé du torse à l'entrejambe. J'ai sincèrement cru qu'on allait le faire dans ces vieilles douches.

- J, j'étais juste curieux, c'est tout.

- Es-tu souvent curieux de cette façon, beau brun ? si c'est le cas, tu en feras des heureux.

- Veux-tu essayer ? »

James le regarda un moment avant de sourire : « Si tu me le proposes aussi gentiment. »

Une saison en enfer - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant