Chapitre 10

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Au lendemain Thomas retrouva Newton près de son visage. Le jeune homme fermait calmement les yeux, étirant ses longues jambes en poussant un soupir d'allégresse.

« L'heure ? grommela-t-il, la voix rocailleuse et endormie.

- Onze heures quinze. dit Thomas en souriant. Ne suis-je plus seul à ne pas être du matin ?

- Eh, je n'ai jamais aussi bien dormi de ma vie... C'était la nuit la plus formidable que j'ai jamais eue.

- Ceci changera une fois que tu en auras passé une avec moi.

- Ne prends pas le melon, coquin. Je n'envisageais que la douceur du matelas. répondit-il en ricanant. Allez, habille-toi. On va déjeuner. »

Gally avait laissé un petit papier sur la nappe de la table ronde. Newton s'en approcha doucement et le lut après s'être raclé la gorge : « Je suis parti au travail, ne m'attendez pas ce soir. Servez-vous dans le frigo et dans les tiroirs. Bonne journée, mes frères.

- Il a un sacré cœur... Quelle chance d'être tombé sur un homme aussi bon.

- Ces hommes sont rares, en effet. J'espère pouvoir le remercier comme il le mérite. »

Il prit un sachet de pâtes laissé près de la cuisinière, gesticulant au-dessus de la casserole tout en se pinçant les lèvres. Thomas l'observa hésiter avec un ricanement moqueur.

« Veux-tu de l'aide ?

- Ce ne serait pas de refus. »

Pendant qu'il assurait la suite et faisait lentement bouillir l'eau, Thomas se sentit lourdement pesé par ces billes noires et attentives, l'admirant tandis qu'il œuvrait sans même se mettre à penser.

« T, tout va bien ? demanda-t-il en rougissant, l'aîné fronçant les sourcils à sa question.

- Pourquoi ça n'irait pas ?

- J, je ne sais pas... tu me fixes comme si tu apprenais un sortilège... alors que je ne fais que des spaghettis.

- C'est que je ne comprends pas à grand chose à la cuisine...

- Tu n'as jamais fait des pâtes ?

- Une fois peut-être... à l'orphelinat...

- C'est une information précise.

- Tais-toi donc et explique-moi, plutôt que de te payer ma tête !

- Très bien, monseigneur ! pas d'inquiétude ! »

Ils déjeunèrent dans un affreux silence, emprunt de cette apesanteur irréelle dans laquelle ils flottaient depuis ces derniers jours, plus particulièrement ces dernières heures. Thomas murmurait parfois, répétant comme s'il éprouvait du confort à l'extérioriser : « J, Je n'y crois vraiment pas... Il y a deux semaines, je vivais chez moi, dans la maison que j'ai toujours connue, auprès de ces parents que j'ai tant aimés... Maintenant je m'apprête à vivre avec deux inconnus, que je n'ai pas même eu le temps de mieux connaître... c'est un chemin.

- C'est aussi mon cas.

- Mais Gally est ta famille, et tu es majeur. Tu es responsable de toi-même depuis longtemps.

- Plus d'un gamin de seize ans.

- Dix-huit !

- Déjà ?

- Tu ferais mieux de le retenir, la légère maturité de mon âge incrimine moins ta situation.

- Ma situation, Tommy ?

- Tu le sais. Je te parle de ces sentiments prenants et forts que tu éprouves envers le gamin de seize ans dont tu es responsable.

- Dix-huit. rectifia-t-il en rougissant légèrement. Tu vas remettre ça sur la table ?

Une saison en enfer - NewtmasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant