Amour et... Pot de miel! (WATTYS2022)

Chapitre 32

Le chauffeur ne pipe mot quand je lui ordonne de me conduire chez Guillaume. Je repense au discours de Antoine. Qu'est-ce qui lui a pris de me demander en mariage ? Et surtout pourquoi faire ça ce soir alors que nous célébrons l'union de nos amis ? Je trouve cette démarche tellement déplacée, et je ne dis pas ça parce que j'ai refusé. Même si j'avais eu envie de l'épouser, j'aurais quand même été embarrassée et aurais eu l'impression de voler la vedette à mon amie.

Ce moment gênant aura au moins eu l'effet de remettre mes idées en place. Si j'avais le moindre doute dernièrement quant à mes sentiments partagés entre Antoine et Guillaume, il est clair que dorénavant je suis sûre de ce que je ressens. Je me suis fourvoyée en pensant que j'aimais toujours Antoine. J'ai été troublée par son retour parce que nous sommes restés ensemble si longtemps et qu'il y a encore quelques mois je n'avais que lui dans la tête et dans mon cœur.

Puis il y a eu cette rencontre fortuite avec Guillaume et il a réussi à chambouler toutes mes croyances. J'ai cru pouvoir aller à l'encontre des sentiments que j'ai développé pour lui mais ce soir, quand j'ai lu dans ses yeux toute la peine qu'il ressentait mon cœur a su que c'est lui qui compte. Ce que j'ai pris pour de l'amour envers Antoine n'était en réalité qu'une pitié déplacée. Malgré son comportement dans l'autre réalité, il ne mérite pas que je le fasse souffrir à son tour. Il doit juste trouver son bonheur auprès de celle qu'il n'aura pas envie de larguer à la moindre difficulté.

Le trajet me semble terriblement long. Je traverse la limousine de manière à passer ma tête par la petite fenêtre qui sépare la cabine du conducteur du reste du grand véhicule.

— On arrive bientôt Monsieur... Monsieur le chauffeur de limousine ? demandé-je penaude.

Je me fais l'effet d'une enfant qui s'impatiente sur le chemin des vacances.

— Appelez-moi Carl, répond l'intéressé en me lançant un regard dans le rétroviseur. Le GPS indique environ quinze minutes, Mademoiselle. Il reste du Champagne au frais si vous le souhaitez.

— Oh non, j'ai suffisamment bu ce soir, et je dois garder les idées claires.

— En route vers votre destin c'est ça ?

Je souris faiblement en regardant au loin.

— Comme vous dites. En espérant qu'il ne soit pas trop tard.

Nous arrivons enfin devant l'immeuble. Je marque un temps d'arrêt, ne trouvant soudain plus la force de sortir. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir lui dire quand il m'ouvrira la porte ? Va-t-il seulement ouvrir la porte ?

— Allez, courage ma jolie. Je suis sûr qu'il n'attend que vous, me presse Carl.

— J'aimerais que vous ayez raison.

— Je vous attends ici. Prévenez-moi si vous n'avez plus besoin de mes services.

— Je ne veux pas vous retenir. Marylou et Jean pourraient avoir besoin de vous. Allez-y et au pire j'appellerai un taxi.

— Hors de question de vous laisser seule en pleine nuit. Vos amis me tueraient, vous ne croyez pas ?

Je lui suis reconnaissante d'être aussi dévoué. Je ne sais pas comment les choses vont se passer. Guillaume n'aura peut-être pas envie d'entendre mes excuses et je serai contrainte de rentrer chez Marylou. Il n'est pas envisageable de retourner au château et affronter le regard de Antoine. Peut-être a-t-il quitté la soirée lui aussi. Je ne peux pas m'empêcher de lui en vouloir un peu plus d'avoir pris cette initiative ce soir alors qu'il aurait pu attendre un autre moment.

Je frissonne à la seule pensée de ce qu'aurait pu être ma réponse si Guillaume n'avait pas été dans mon champ de vision. Son regard a lavé tous mes doutes et mon choix s'est imposé de lui-même. Mais si Antoine m'avait demandé en mariage dans l'intimité de son appartement, ou attablés au restaurant, qu'aurais-je répondu ? Est-ce que j'aurais accepté, aveuglée par ce que je pensais être des sentiments sincères ?