Partie VII

9 4 2
                                    

Pendant longtemps, Folker avait joué avec la mort. Pourtant, malgré les risques insensés qu'il prenait et, même, recherchait, jamais il n'avait envisagé de s'ôter la vie de sa propre main. Il savait qu'il n'aurait pas pu aller au bout d'un tel acte, non pas par lâcheté, mais parce qu'il estimait encore devoir veiller sur sa famille.

Alors, il vécut une vie d'errances, au cours de laquelle chaque jour était pour lui un recommencement perpétuel. Il n'avait aucune attache. Tel Sisyphe, il revivait sans cesse le même châtiment : les regards qui glissaient sur lui, les amis d'un jour qui redevenaient des inconnus le lendemain. Il évoluait comme un éternel étranger dans un monde qu'il connaissait par cœur.

L'un des avantages de sa condition consistait à passer inaperçu partout où il se rendait. Aucun de ses actes n'avait de conséquences. Il pouvait donc se permettre des folies avant de disparaître pour se faire oublier. C'est ainsi qu'il se rendait régulièrement à des meetings de hauts dignitaires nazis, pour se tenir au courant de l'évolution de la situation allemande, mais surtout des plans de son diabolique bourreau. La tournure que prenaient les évènements au niveau mondial lui donnait des haut-le-cœur. Après certains meetings, la sensation d'écœurement et de tournis ne le quittait pas pendant plusieurs jours. Il avait aussi pu se faufiler dans les alentours de camps de concentration. Jamais il n'avait eu autant envie de mourir.

Ce monde ne voulait plus de lui et il ne voulait pas de ce monde. Que faisait-il encore ici ?

Le pire était que tout cela se faisait en son nom. Enfin, le Diable avait au moins eu la délicatesse de changer de prénom... Folker devait sans doute sonner trop délicat ou trop faible à l'oreille de Lucifer.

Ce dernier avait installé l'une de ses résidences à Berchtesgaden, à quelques rues des restes calcinés de la maison de Folker. Un affront de plus, qui s'ajoutait à une liste dont la longueur avait fini de surprendre le soldat. Un jour, Folker apprit que son ennemi organisait une réception dans cette résidence. Il tenta de s'y incruster.

Le soldat inconnuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant