Chapitre 13 : La peur au ventre

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   Le roi allait venir cette nuit...

  Cette pensée tournait dans la tête de Noor avec une telle intensité qu'elle en était déconnectée du monde qui l'entourait. Elle n'entendit donc pas Kristina l'appeler, ni même lorsqu'elle lui demanda à deux reprises si elle allait bien. Focalisée dans ses tourments, elle revint brutalement à elle lorsqu'une main se posa sur son épaule. Le contact la fit sursauter de peur et avant qu'elle ne s'en rende compte, elle administra une claque violente à la main dérangeante. Le petit cri de douleur qui résonna près d'elle termina de l'arracher à ses pensées.

  Mais que venait-il de se passer ?

  Elle tourna son regard vers sa voisine de gauche et l'observa caresser le revers de sa main devenue rouge. La culpabilité lui tordit les entrailles. Elle avait frappé Kristina... Elle l'avait frappé dans un moment de trouble, alors qu'elle avait cru qu'il s'agissait du roi. Elle avait cru se faire attaquer par ce dégénéré et elle avait réagi. Ça avait été purement instinctif, comme un instinct de survie. Elle avait bougé la main sans même s'en rende. 

  _ Je... Je suis désolée Kristina, marmonna-t-elle sincèrement, je ne voulais pas.

  Le sourire qui se dessina sur les lèvres de la concubine destabilisa Noor. Ça devait bien être la première fois que Kristina souriait. Elle était toujours si calme et réservée, comme si tout n'était qu'ennui autour d'elle. Peut-être était-ce réellement le cas après tout ? La concubine n'était pas comme toutes les autres. Noor lui trouvait une aura particulière, dans sa gestuelle, son port de tête, sa manière délicate de parler. Et puis son regard d'un bleu presque inhumain brillait parfois d'une lueur particulière, comme de la perspicacité, ou mieux de l'intelligence.

  _ Ne t'inquiète pas pour ça, ce n'est rien, murmura-t-elle comme à son habitude.

  Le disant, elle remua la main endolorie sous ses yeux inquiet.

  _ Tu vois, continua la concubine, rien du tout. Je ne suis pas si fragile tu sais.

  De ça Noor en doutait encore. Kristina semblait de constitution fragile. Elle était trop mince, trop pâle, trop malingre. Elle était belle comme un cœur, mais un peu trop maladive selon elle. On aurait dit que le moindre choc aurait pu la blesser. Noor était certaine qu'elle aurait pu lui briser le poignet si elle l'avait serré trop fort.

  _ Ta main est très rouge, soupira-t-elle faiblement.

  _ J'ai la peau sensible, elle marque tout le temps pour un rien.

  Pour couper court au sujet, la concubine passa ses mains sous la table. Noor comprit qu'elle ne voulait plus en parler et garda le silence. Le brouhaha joyeux que causait les concubines emplit de nouveau ses oreilles. Leurs cris de joie et leurs rires face à la venue du roi lui montèrent très vite à la tête au point de lui  donner la nausée. Elle se fit violence pour ne pas rejeter sur la table les quelques aliments qu'elle avait réussi à ingurgiter.

  Pourquoi diable était-elle encore assise là ? Elle n'avait même plus faim. Et puis cette ambiance joyeuse ne faisait qu'accentuer son mal être. Regarder ces femmes célébrer l'homme qui la terrifiait autant était abominable.  Comment pouvaient-elles attendre son arrivée avec autant d'impatience ? Ce n'était qu'un être abjecte pourtant, un tyran sans foi ni loi qui prenait sans sourciller ce qu'il voulait des gens et foulait au pied leur consentement. Un porc ! Alors pourquoi ?

  _ C'est la venue du roi qui te met dans cet état, chuchota Kristina de sa faible voix.

  C'était plus une affirmation qu'une question à laquelle Noor ne dû l'écoute qu'à la proximité de leurs sieges. Les autres n'avaient très certainement rien capter de ses dires. De toutes façon leur attention était obnubilée par autre chose.

La favorite du roiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant