Forest by Nimphradora - Deviantart
Celtic Fairy Music - Derek Fiechter's Music
Des jours passèrent, peut-être même une semaine ou deux. Personne ne s'était dit pouvoir déposer Edel dans la navette le jour où ils étaient arrivés en ville, mais personne non plus n'avait anticipé qu'il fallait attendre au moins un mois pour cela. L'espoir ardent qui les avait animés tous les deux faiblissait peu à peu. Chaque jour répétait le précédent : réveillés à cinq heures pour prendre le petit-déjeuner avant les clients de l'auberge. Ensuite sortis de la ville par la porte Est, la moins surveillée, pour s'enfoncer dans la forêt et s'entrainer jusqu'au soir, et enfin, souvent de nuit, rentrer capuchonnés en se faisant passer pour un paysan lambda avec sa fille. Bien sûr, les entrainements étaient différents les uns des autres, Edel apprenait vite, Aaron devait s'adapter à son élève. Les armes, d'abord en bois, puis en fer émoussé, étaient dissimulées dans les souches creuses de la forêt, afin de sortir et entrer dans la cité sans soupçon. Sans l'immense horloge solaire de l'église près de l'auberge, la notion du temps s'effacerait des esprits et l'on mangerait tous quand l'envie se présenterait, et l'on dormirait en même temps que le soleil, ce qui n'est pas chose conseillée si l'on veut faire fructifier l'économie et la production d'un peuple. Qui contrôle le temps, contrôle les gens. Afficher cette horloge au centre de la place publique permettait aux habitants de Vieux-Cerf de se sentir constamment pressés de faire leurs tâches quotidiennes, ce dont nos deux amis étaient exempts en forêt.
Ce matin-là, Edel semblait plus fringante que d'ordinaire, presque satisfaite de se lever pour une énième journée à attendre un signe de changement. Aaron le remarqua immédiatement lorsqu'elle descendit dans le hall où Azaël nettoyait les tables.
— Qu'est-ce qui te met de si bonne humeur ? demanda-t-il en marchant son morceau de fromage.
— Aujourd'hui, c'est mon mensiversaire ! Ce soir j'ai cent-quatre-huit lunes !
— Ça fait déjà un mois que tu me colles ?
— Vous n'êtes pas sympa !
— C'est une blague mouflette, dépêche-toi de manger, on va partir.
— Cent-quatre-huit lunes ? répéta Azaël.
— L'âge des Illumineux se compte en pleines lunes, reprit Aaron, ce qui veut dire qu'elle a douze ans.
— Puisque c'est mon jour, est-ce que j'aurai le droit de me promener en ville quand on reviendra ?
— Non, tu le sais, ne me demande plus.
— Mais... !
— Il n'y a pas de « mais » ! Ça voudrait dire que je t'offrirai un cadeau tous les mois ? Les enfants Illumineux sont une ruine. On en a déjà parlé, c'est notre contrat ici pour tous nous maintenir à l'abris, Azaël, toi et moi. On risque gros si quelqu'un comprend que tu n'es pas une Fourvoyarde.
Edel soupira en laissant tomber au sol toute la motivation qu'elle portait au réveil. Aujourd'hui sera comme hier, qui était déjà comme avant-hier, éternellement ainsi. Elle ne connaissait la cité que depuis la fenêtre de sa chambre.
— Est-ce qu'on sait quand il y aura une navette... ? questionna-t-elle à tout hasard.
— Nous ne le savons toujours pas, lui répondit gentiment la jeune femme, qui voyait bien le moral de la petite flancher de jour en jour. Mais qui sait, peut-être que demain on en saura plus !
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Edel (en pause)
Fantasía« Il y a longtemps maintenant, les Hommes atteignirent le stade critique de l'Humanité et une guerre dénuée d'espoir éclata entre les nations du monde. Ce chaos dura dix ans. Lorsque ce conflit prit fin, un nouvel ordre vit le jour dans l'espoir de...