Les Chroniques de Londres T.1 Le fantôme de Whitechapel

CHAPITRE 6

           Lena ne voulait pas rentrer chez elle. Pas encore. Elle risquait à nouveau d'être envahie par de vieux souvenirs et de sombres pensées, chose qu'elle voulait éviter. Sans compter qu'elle craignait de s'endormir et de rêver. Elle ne voulait pas se retrouver à nouveau dans cette ruelle.

           Guidée par son instinct, la détective décida de se promener dans les rues de Londres. La nuit était tombée et la température aussi. Il y avait même une légère brise, mais il ne faisait pas si froid que ça. Malgré tout, la jeune femme frissonna et ferma sa veste. Elle sortit des écouteurs de son sac, ainsi que son téléphone. Elle aimait écouter de la musique quand elle se baladait. C'était une sorte de barrière entre elle et les autres. Ainsi, elle n'était pas agressée par le bruit de la ville et pouvait se promener l'esprit libre. Quand les premières notes envahirent ses oreilles, elle se sentit aussitôt plus détendues. C'est là l'effet qu'avait la musique sur elle. Elle pouvait se décontracter en à peine quelques secondes. Oublier tous ses tracas.

           La jeune femme marcha au rythme de Cat Stevens, un chanteur qu'elle affectionnait pour son talent de guitariste et la douceur de sa musique. Elle se laissa aller, ignorant royalement les gens autour d'elle. En ne les entendant pas, il ne lui était pas difficile de faire comme si elle était toute seule dans la rue. Il n'y avait personne d'autre qu'elle et c'était merveilleux.

            Alors qu'elle se laissait guider par son instinct, Lena fut surprise par l'absence soudaine de luminosité. Elle mit la musique sur pause et regarda autour d'elle. Elle se trouvait dans une ruelle sombre. Au bout, se trouvait les rambardes de sécurité, posées là pour le Yard sans doute. Il ne fallut que quelques secondes à la détective pour deviner où elle se trouvait. Whitchapel. Elle avait marché jusqu'à Whitechapel. Son instinct l'avait mené à la ruelle de son rêve, sur Duward Street. On voulait définitivement qu'elle soit mêlée à cette fichue affaire. Comme la ruelle était déserte, la médium laissa aller sa curiosité et avança vers les barrières de sécurité. Passer sur une scène de crime ne la dérangeait pas, ce n'était pas la première fois qu'elle faisait ce genre de chose et elle se savait assez intelligente pour ne pas laisser de traces ou se faire attraper.

           Il y avait encore des traces de sans là où on avait retrouvé le corps. Lena se dirigea vers elle et se connecta à la ruelle. Aussitôt, elle vit deux silhouettes blanches. La première était sans nulle doute la victime. Elle se trouvait au sol et se vidait de son sang. Devant sa détresse, Lena dû se faire violence pour ne pas chercher à la secourir. A quoi ça servirait? Elle était déjà morte. La deuxième, le meurtrier, tranchait une ligne verticale de son nombril au bas de ses seins. Il prit un malin plaisirs à écarter les chaires pour en sortir les intestins. La prostituée n'étant pas encore morte, la douleur se fit ressentir dans la connexion. Lena gémit et porta une main à son ventre. C'était comme si la souffrance lui appartenait. Elle ressentait tout. Il lui fallut énormément de courage pour ne pas fermer le lien. Au bout d'un instant, la femme finit par mourir. Un froid glacial l'envahit, alors qu'elle se redressait. Lena s'appuya sur le mur froid et visqueux, le temps de reprendre son souffle puis reporta son attention sur la scène.

           La médium pouvait sentir son sentiment de pouvoir, ce plaisir qu'il ressentait à faire du mal. Il jubilait. Lena soupira. Son chapeau haut de forme l'empêchait de voir son visage. Elle aurait aimé pouvoir le reconnaître et le mettre hors d'état de nuire. Comment? Elle ne savait pas encore, mais elle aurait trouvé un moyen. Comme toujours.

            L'homme se leva d'un coup, la faisant sursauter. Il se tourna et commença à marcher. Il ne se pressait pas, comme s'il savait qu'il ne se ferait pas attraper. Le meurtrier était vraiment sûr de lui et semblait savoir ce qu'il faisait malgré la sauvagerie du meurtre. Peut-être était-ce un médecin? Mais la jeune femme en doutait. Ce qu'elle savait en revanche c'est qu'à être trop confiant, il finirait par commettre une erreur qui lui serait fatale et se ferait alors attraper. Le plus vite serait le mieux. D'après ce qu'elle venait de voir et de ressentir, il n'avait pas l'intention de s'arrêter là, il avait beaucoup trop aimé ça. C'était un tueur en série en devenir. Étrangement, et ce malgré le métier de la victime, il n'y avait aucune connotation sexuelle dans ce meurtre. Du moins pas d'après ce que Lena avait pu constater. Il n'avait pas abusé de la victime, ne l'avait pas déshabillée, il ne s'était même pas masturbé sur son cadavre. Elle n'avait pas ressentit non plus d'excitation sexuelle ou d'envie. Avait-il pour but de la punir pour sa vie de débauche? C'était probable.