10 || l'abandon.

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12 septembre 2021, Monza.

Paola ouvrit l'application instagram et commença à taper un message au pilote français. Ils s'étaient à peine parlé les trois jours précédents, ne faisant que se croiser au milieu des motorhomes. Le souvenir de leur discussion sur son canapé, ces gestes brûlants et ses doux baisers avaient hanté l'esprit de la jeune fille. Et à chaque fois qu'ils s'étaient croisés, elle l'avait évité du regard, rougissant, ce qui avait fait particulièrement rire le jeune homme. En arrivant ce matin, George lui avait appris que Pierre partait de la pit lane, à cause de nombreux changements effectués sur sa monoplace, suite à son accident la veille en course sprint. Et c'est pour ça qu'elle voulait lui écrire. Pour lui montrer qu'elle croyait encore en lui. Elle osait à peine imaginer sa déception, lui qui l'an dernier avait gagné cette course, décrochant sa première victoire.

À @pierregasly : Tu peux y arriver, crois en toi.

La jeune fille hésita à appuyer sur envoyer, avant de tout effacer. Non c'était trop nul, elle ne pouvait pas lui dire ça.

À @pierregasly : N'arrête pas de te battre.

Elle soupira, avant d'effacer de nouveau son message. Pourquoi est-ce que tout ce qu'elle écrivait lui semblait si impersonnel ? Les mots qu'il lui avait dit quelques jours auparavant tournaient en boucle dans sa tête.

« Parce que malgré tous les sentiments que j'ai pour toi, au fond je sais que quelque chose s'est brisé. Et c'est la confiance. Je sais que tu as encore peur que je te fasse souffrir. »

Paola savait que le pilote avait raison, elle avait toujours peur qu'il la fasse souffrir de nouveau. À quoi bon accorder sa confiance si il allait de nouveau la briser ? Décider de lui refaire confiance, c'était comme sauter dans le vide. Mais peut-être que c'est ce dont elle avait vraiment besoin, être impulsive. Parce que finalement, la soirée qu'ils avaient passé ensemble à Paris, lorsqu'elle avait décidé de se laisser aller, était la meilleure soirée qu'elle avait passé depuis longtemps. Alors est-ce qu'il ne fallait pas qu'elle passe par ce saut dans le vide pour être heureuse ? Et est-ce qu'elle doutait encore vraiment de lui ?

Il avait plaqué sa copine, il l'avait attendu, il lui avait laissé le temps. En fait, tout ce qu'il avait fait ces dernières semaines n'avait fait que lui confirmer qu'elle pouvait lui faire confiance. La jeune rousse sentait qu'il voulait faire les choses bien. Et puis elle le connaissait, retourner vers lui ce n'était pas sauter dans le vide, parce qu'on ne sait pas ce qu'il y a au bout du vide. Mais là, elle savait très bien ce qui se trouvait au bout. C'était les yeux bleus océan de Pierre. Alors ce n'était pas un saut dans le vide. C'était un plongeon dans l'océan. Et elle avait toujours aimé l'océan.

À @pierregasly : J'imagine à quel point tu es déçu, mais je sais que tu peux faire des miracles, tu l'as déjà prouvé. Je serai derrière toi toute la course, je ne te lâcherai pas des yeux.

Paola appuya sur envoyer, un sourire sur les lèvres. Peut-être qu'elle plongeait de nouveau, mais cette fois, elle était mieux préparée. Elle n'allait pas se noyer, parce qu'au fond d'elle, elle savait que jamais il ne la laisserait couler.

*

Les feux rouges s'allumèrent un à un, faisant monter la tension dans tout le paddock. Paola sentait l'ambiance électrique autour d'elle et esquissa un sourire. Elle adorait ça. Elle s'était prise de passion pour le stress qui précédait l'extinction des feux, pour la tension lors des dépassements, pour l'euphorie à quelques tours de l'arrivée et pour la joie qui explosait au podium. Et au bout de plusieurs mois sur les paddocks, elle était sûre d'une chose : elle ne pouvait plus être autre part. À côté d'elle, Charlotte était tout aussi fébrile. Les feux s'éteignirent, et les monoplaces démarrèrent, les moteurs rugissant dans le calme plat qui précédait le premier virage. Si Max partait en tête, il fut très rapidement doublé par Daniel, qui s'envola tel une fusée, scotchant tout le public. La surprise se fit sentir dans le paddock, tout comme la joie.

FAUX DÉPARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant