FAUX DÉPART

13 || la discussion.

12 mars 2021, Bahreïn.

- Depuis quand le sais-tu ?

- Pierre, calme-toi s'il te plait, soupira Charles.

Son ami faisait les 100 pas dans son motorhome, la tête baissée, passablement énervé. Le pilote monégasque avait l'impression de se revoir un an et demi plus tôt, alors que Pierre appréhendait que Paola vienne sur le circuit. Sauf que cette fois, elle était là. Et que la situation était vraiment différente.

- Et qu'est-ce qu'elle foutait avec Max ? Tu crois qu'il y a un truc entre eux ?

- Pierre, Max est en couple, et je crois que c'est assez clair qu'elle n'a d'yeux que pour toi, et ce depuis longtemps maintenant. Est-ce que tu peux t'asseoir ?

- J'arrive pas à croire que tu ne m'aies rien dit...

Le pilote français s'assit, en passant sa main dans ses cheveux, désabusé.

- On lui avait tous promis de ne rien te dire, elle voulait te l'annoncer elle-même...

- Ouais, bah c'est raté.

Pierre soupira en levant les yeux au ciel. À cet instant, il n'arrivait pas à se calmer. Lorsqu'il l'avait vu enlacer Max sur la terrasse, il était partit presque en courant pour se réfugier dans son motorhome. Charles l'avait suivi, et essayait depuis de le calmer. Mais rien ne pouvait y faire, il était complètement perdu. Est-ce que c'était normal de ressentir tout ça dès qu'il la voyait ? Pourquoi est-ce que son cœur ne pouvait pas ralentir un peu ? Et pourquoi est-ce qu'il avait chaud et froid en même temps ? Et comment est-ce qu'elle allait ?

- Peut-être que tu devrais juste aller lui parler ?

- Pour lui dire quoi ? « Désolé de t'avoir plaqué et de t'avoir envoyé à l'hôpital », c'est ridicule Charles...

Le pilote Ferrari posa sa main sur l'épaule de son ami en la pressant gentiment.

- Ce qui serait ridicule c'est que vous continuez de rester loin l'un de l'autre...

Pierre lança un regard rempli de larmes à son ami, et Charles murmura :

- Ça me tue de vous voir aussi malheureux loin l'un de l'autre, alors que vous pourriez être heureux ensemble...

Il le prit dans ses bras et le pilote français ne répondit rien, profitant de l'étreinte de son ami dont il avait désespérément besoin. Au bout de quelques minutes, Charles se détacha de lui et l'informa qu'il était attendu pour une réunion post-essais. Pierre hocha simplement la tête, s'enfonçant dans le canapé sans savoir quoi faire.

Un milliard de questions tournait encore dans sa tête, et il ne savait pas comment obtenir des réponses. Il revivait encore et encore la scène qui s'était déroulée quelques instant plus tôt, alors qu'il avait croisé son regard doré et ses cheveux illuminés par le soleil. Elle était là, face à lui, après trois mois sans avoir aucun contact avec elle. Il ne pouvait pas effacer son visage de sa mémoire, son air surpris et triste. Ce visage qu'il connaissait par cœur et qu'il voyait toutes les nuits avant de s'endormir et tous les matins en se réveillant. Il se souvenait avoir parcouru du bout des doigts l'angle de sa mâchoire, avoir déposé ses lèvres sur ses paupières endormies, avoir frotté sa peau contre la sienne parsemée de taches de rousseur. Pierre se souvenait parfaitement de tout ça, et de bien plus encore. Il se souvenait parfaitement de leur discussion, quelques mois plus tôt dans la même ville alors qu'il lui avait dit qu'il l'aimait pour la première fois la veille.

07 décembre 2020, Bahreïn.

- Bien dormi mon amour ? Demanda le jeune blond alors que Paola ouvrit difficilement les yeux.