14 || les retrouvailles.

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09 octobre 2021, Istanbul.

- Je te demande pas de choisir Paola, renchérit le pilote en posant sa main sur la sienne, mais quand tu as voulu avoir les deux, tu étais pleine de remords. Là tu en as aucun, et tu es triste. Si tu devais déterminer lequel te manque le plus, qui ça serait ? Lequel des deux t'apporte le plus de choses au quotidien ? Duquel tu ne peux pas te passer tous les jours ? Peut-être qu'une fois que tu réussiras à déterminer ça, tu y verras plus clair, et tu sauras par où commencer.

Elle hocha la tête, en essayant d'assimiler ce que venait de dire George. Il avait raison, elle ne pouvait pas tout régler en même temps. Si ces séances de psy lui avaient appris quelque chose, c'est qu'elle devait avancer un pas après l'autre. Elle devait déjà parler à l'un, puis à l'autre. Car à essayer de tout faire en même temps, elle s'y perdait. Et cela ne voulait pas dire qu'elle abandonnait l'autre. Seulement qu'elle était encore un peu fragile, et qu'elle avait besoin de temps. Mais comment savoir par où commencer ? Comment répondre aux questions de George ?

Et soudainement elle se mit à sourire. Bien sûr qu'elle connaissait la réponse à ces questions. Au fond d'elle, elle l'avait toujours su. C'était lui. Évidemment que c'était lui.

Son sourire envahit son visage et elle sentit un soleil naître dans sa poitrine. C'est comme si elle avait enfin trouvé la réponse qu'elle cherchait depuis qu'elle avait rencontré Pierre. George avait raison, elle ne pouvait pas choisir entre les deux, et il n'était pas question de le faire. Les deux pilotes lui apportaient tous les deux des choses différentes, et elle s'épanouissait et grandissait à leur côté. Mais elle savait lequel des deux lui manquait le plus à cet instant, lequel des deux était nécessaire à son quotidien. Et c'est en se rendant compte de cela, qu'elle sourit encore plus.

- Je sais, dit-elle en brillant de joie.

- Et qu'est-ce que tu vas faire maintenant ?

Elle attrapa la main de son ami, et la serra fort.

- Faut que je lui dise George, il faut que j'aille le voir.

Paola était à cet instant plus déterminée que jamais à aller le trouver. Mais avant ça, elle enlaça le pilote Williams.

- Merci, merci pour tout.

Il déposa un baiser sur sa tempe, et souffla :

- Je te souhaiterai bien bon courage, mais je ne sais pas si tu en as vraiment besoin...

Il lui sourit tandis qu'elle s'éloignait de lui. Paola fit rapidement demi-tour, pressée de trouver un taxi. Mais alors qu'elle était déjà à quelques mètres de George, elle fut prise d'un doute. Elle retourna et cria :

- Tu me demandes pas qui c'est ?

- J'ai pas besoin de savoir, je sais que tu as fait le bon choix.

Elle sourit et il ajouta :

- Puis j'espère bien que tu me raconteras tout ça demain.

Paola éclata de rire, et reprit sa marche folle. Autour d'elle, la ville semblait si vivante, si joyeuse, si colorée. Et elle avait l'impression d'être dans le même état d'esprit. Pendant des mois, la jeune rousse avait eu la sensation d'errer sans vraiment de but, sans vraiment trouver sa place, en se sentant toujours en décalage avec les autres. Elle se revoyait dans la vitre à Spielberg, après la victoire de Max. Cette image floue d'elle, presque transparente. C'est ce qui l'avait définie pendant des mois. Elle avait été un fantôme, une ombre. Mais là, dans Istanbul en cette soirée d'octobre, elle avait l'impression de revivre. Les couleurs de la ville déteignaient sur elle et coloraient ses émotions de mille arcs-en-ciel. Elle s'arrêta sur le bord du trottoir, hélant un taxi. Et lorsqu'il s'arrêta et qu'elle se vit dans les vitres, elle avait une certitude : cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas été si colorée, si vivante. Ses joues étaient rougies, ses yeux brillaient et ses cheveux semblaient en feu. Elle était de nouveau elle.

FAUX DÉPARTOù les histoires vivent. Découvrez maintenant