1 - Passager clandestin

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 En le voyant s'éloigner sans que je ne puisse rien y faire, une vague d'amertume m'envahit. J'étais officiellement l'homme le plus stupide que cette terre ait un jour porté. Je savais que tout lui avouer serait difficile, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il s'en aille sans rien dire. Je m'étais préparé à de la colère, du ressentiment, mais pas à un silence et de l'ignorance. Finalement, c'était bien pire. Il n'avait pas souhaité écouter mes explications et de toute façon, qu'aurais-je bien pu lui dire ? J'avais conscience d'avoir gravement fauté et je m'en voulais d'avoir été aussi bête.

Abattu, je retournai d'un pas lent à ma voiture, me maudissant et ce ne fut qu'une fois à l'intérieur que je laissai éclater ma fureur. Mon volant reçut plusieurs coups qui m'esquintèrent quelques phalanges. Je me détestais et pourtant, j'étais convaincu qu'il me haïssait encore plus. Je subsistais à l'arrêt de longues minutes, n'ayant aucune envie de rester seul puis décidais de me rendre chez ma mère, Léah.

Je roulai une belle demi-heure afin de quitter la ville et d'entrer dans la campagne qui la bordait. Dans une petite commune d'à peine cinq mille habitants, je rejoignis la maison dans laquelle j'avais grandi par intermittence. Je gravis l'allée au pas, essayant de ne pas abîmer le dessous de mon auto avec les gros cailloux qui formaient le chemin de deux cents mètres qui nous séparaient de la route puis me garai sans vraiment faire attention à mon placement. Une nouvelle fois, la rage prit le dessus sur mes sentiments et je fermai les yeux afin de tout refouler. J'avais la haine.

On toqua à ma vitre. En tournant la tête, je vis ma mère, un panier rempli de cerises à la main qui me souriait. Je sortis de la voiture et l'enlaçai immédiatement. Du haut de son mètre quatre-vingt, je n'avais aucun mal à la tenir contre moi et son contact me calma un tantinet. Assez pour que je puisse lui montrer un air amical, même s'il était feint.

En s'écartant, elle replaça l'une de ses mèches noires derrière son oreille et me tendit la corbeille que je saisis dans l'instant. Tout en marchant vers la maison, elle me questionna.

— Que me vaut le plaisir de ta visite, mon bichon ?

— J'avais besoin de voir des visages familiers.

Elle se retourna dans ma direction puis plissa les yeux en ouvrant la porte.

— Qu'est-ce que tu as fait, Logan ? Est-ce que tu vas avoir des problèmes ?

Les démons du passé refaisaient surface.

— Non. Rien de sérieux à ce point-là. J'ai seulement fait du mal à quelqu'un que... j'apprécie.

Elle me tint le battant afin que j'entre et nous nous dirigeâmes vers le salon où mon père, assis dans son gros fauteuil en cuir brun, regardait la télé d'un air distrait. Lorsqu'il me vit, il se leva et vint me serrer la main.

— Alors fiston ! C'est bien que tu passes nous rendre visite !

— Il a fait de la merde, lui apprit ma mère.

— Ah... est-ce que tu veux en parler ? me proposa-t-il.

— Avec du café et des cerises à grignoter, ajouta Léah.

Je pouffai.

— Si tu me prends par les sentiments...

En quelques minutes, nous lavâmes les fruits, fîmes couler le délicieux nectar foncé, puis nous installâmes tous les trois au salon.

— Raconte-nous, m'intima Sébastien avec un regard doux.

Je soupirai.

— Je ne saurais même pas par où commencer. Pour faire simple, j'ai trouvé un gars sur une appli. On s'est bien entendu et on a fait des rendez-vous à l'aveugle, dans le sens où je le voyais, mais lui n'a jamais su qui j'étais. Le problème, c'est qu'après notre première rencontre, je me suis rendu compte qu'il bossait dans mon entreprise. Et qu'en plus, je le terrorisais. Mais par message sur l'appli, on avait un bon feeling ! Du coup...

NIGHTMARE 3 - Chimérique [MxM] [terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant