NIGHTMARE 3 - Chimérique [MxM] [terminé]

3 - la matraque des contrôleurs

La nuit qui me mena au lundi fut semée d'embûches. Je fis plusieurs cauchemars qui me réveillèrent. Le dernier se déroulait dans cette salle de béton. À force d'en rêver, je ne savais plus vraiment ce que j'avais vécu et ce qui appartenait au monde des songes. J'étais jeune et tout devenait flou dans mon esprit. Incapable de me rendormir, je m'assis dans mon lit et frottai mon visage afin d'évacuer les ultimes bribes de souvenirs qui voletaient sous mes paupières.

Immédiatement, je pensais à Éliah. Je n'avais toujours pas perçu d'accusé de réception et dans quelques heures à peine, nous serions à l'entreprise tous les deux. Je devais me racheter. Coûte que coûte. Si j'arrivais à lui parler, s'il acceptait ne serait-ce que de m'écouter, alors je serais peut-être en mesure de tout lui expliquer ?

La culpabilité grandit davantage au fond de moi. Je m'étais promis de faire attention à lui, de le soutenir et de le protéger du mieux que je pouvais. J'étais un piètre ami... un piètre amoureux... Comment est-ce que je pouvais encore prétendre avoir des sentiments pour lui ? Quel homme entiché agirait de cette façon ? « Logan, quand on veut quelque chose, il faut le prendre. Tu m'entends, mon chéri ? Personne n'est bon, personne n'est gentil et attentif aux autres. Tu dois te battre, écraser tes adversaires, même si ce sont tes amis ou ta famille. Il ne doit y avoir que toi qui comptes. »

Lorsque ma mère m'avait appris ça, j'avais acquiescé. Ses paroles ne reflétaient que trop bien notre vie. Maintenant, avec du recul, j'étais capable de dire qu'elle était instable et dangereuse. Mais quand on a cinq ans, nos parents sont des dieux tout puissants, des professeurs de qualités, des êtres célestes dignes de confiance.

En proie à un violent nœud de cerveau, je sortis du lit et filai vers mon sac de frappes. Une fois les gants enfilés, je cognais. Poings, tibias, chevilles, coudes, tout ce qui pouvait faire mal me servait à massacrer ce cuir rembourré. J'y envoyai toute ma frustration, toute ma colère, toute ma tristesse.

Lorsque le soleil commença à pointer le bout de son nez, je ralentis la cadence. J'allais prendre une douche, puis avalais trois tasses de café noir histoire de faire avancer le temps qui ne passait pas.

J'avais un plan. Il était simple, mais c'était le seul qui m'était venu à l'esprit. Tous les jours, Éliah se rendait aux archives. J'aurais donc plus de chances de le croiser là-bas si je voulais avoir une discussion avec lui. Il fallait que j'y aille avec délicatesse. Je ne pouvais pas me permettre d'aller le voir comme une fleur après la réaction qu'il m'avait montrée. Il devait être au fond du trou et je n'osais pas imaginer le week-end qu'il avait dû passer chez lui.

Une fois de plus, je me maudis. J'avais vu Éliah dans tant de situations difficiles que l'idée même qu'il souffre encore une fois m'était insupportable. Alors, savoir que c'était de ma faute me rendait encore plus misérable.

Quand il fut l'heure de partir, mon cœur contracté battait à un rythme soutenu à cause de ma peur d'affronter Éliah. Pour la première fois depuis des années, je me retrouvais démuni devant un p'tit gars qui ne devait pas dépasser le mètre soixante-dix. Et pourtant, s'il me montrait un seul signe de colère, mes deux mètres ne pourraient rien y faire ; je me ratatinerai face à lui.

J'arrivais au travail et briefais mon équipe avant d'aller m'enfermer dans mon bureau. Seulement quelques minutes plus tard, alors que mon ordinateur n'était même pas allumé, Annie, ma secrétaire, entra. En me voyant, elle haussa un sourcil.

- Tu t'es levé du pied gauche ?

Je grommelai pour toute réponse et elle soupira.

- On a pas le temps pour ça Logan, tu as la réunion avec le Directeur général à treize heures, me rappela-t-elle. Il ne va pas être content, tu ne vas pas l'être non plus vu ta mine, alors s'il te plaît, ne l'étripe pas.