Le chaos régnait en maitre dans la cour principale, des blessés tentaient de fuir cette scène, en vain. Des livres scolaires volaient, accompagnés de pierres d'une taille plus ou moins importante. Les coups de feu tirés dans le ciel par un directeur qui tentait sans succès de calmer cette bagarre abattirent plusieurs oiseaux, qui tombèrent sur un élève, augmentant encore plus le niveau de la panique à présent général. Ce dernier, en guise de réconfort, se pris également un coup de balai en pleine tête par une enseignante qui avait pour seul et unique rôle de ramasser les cadavres des volatiles.
Lorsque William arriva sur les lieux, une seule question lui vint à l'esprit.
Qu'est-ce qu'il avait bien pu faire pour que toute cette histoire parte aussi loin ?
***
- Alors William ? Pressé de marcher sur les traces de ton frère ?
Le jeune garçon adressa un sourire discret à son père à travers le rétroviseur.
- Bien sûr papa, comment ne pas l'être ?
A son tour, l'homme esquissa un sourire ravi en direction du pré adolescent, ses yeux brillants de fierté. Après quelques secondes, ce regard si joyeux s'assombrit, se dirigeant vers le rétroviseur de l'automobile. Ses sourcils se froncèrent et sa main tapota nerveusement sur le volant.
- Si seulement Fabien pouvait être aussi ponctuel que toi... On va finir par être en retard ! Marmonna-t-il, laissant échapper un soupir.
Le jeune garçon leva la tête de son livre, jetant un regard vers le porche de la charmante maisonnée. Cependant, contrairement à l'homme, il ne put apercevoir grand-chose de l'agitation dont la résidence devrait pourtant être le témoin : un individu, les cheveux grisonnants et le teint pâle, s'efforçait de placer les bagages du garçonnet dans le coffre de l'automobile. En dépit de sa taille plutôt marquée et de ses vêtements sophistiqués, cette tâche s'avérait être compliquée pour lui : il avait le souffle court, et des gouttes de sueur perlaient sur son front.
- Monsieur Facturus, émit faiblement l'âgé personnage entre deux respirations alors qu'il enfournait la dernière valise, êtes-vous vraiment sûr de ne pas vouloir que je me charge d'accompagner votre fiston ? La route est si longue, et je ne voudrais pas que vous preniez du retard dans vos obligations professionnelles...
- Albert, je ne manquerais la rentrée de mon benjamin pour rien au monde voyons ! Une première année à Watterfall High, ça n'arrive qu'une fois dans une vie !
Non sans une pointe de fierté, le fils de la famille fit tourner la manivelle à sa gauche, tenant comme il le pouvait le lourd ouvrage.
- Au revoir maman ! Lança-t-il, sortant furtivement sa tête à travers la fenêtre du véhicule.
Sur le porche de la maison, il distingua un signe de main que lui adressa la femme, qui, emmitouflée dans son épaisse fourrure, attendait le départ de la voiture. Sans perdre une seconde, le garçon tourna activement la manivelle, le froid ayant commencé à lui geler le bout des doigts.
Le moteur de l'automobile se mit à vrombir, le pot d'échappement laissant échapper une épaisse brume blanche.
- ATTENDEZ-MOI ! Retentit une voix affolée.
Le pré-adolescent perçut des pas précipités dans la terre à l'arrière de l'automobile, et ne daigna même pas accorder un regard au nouvel arrivant tandis que ce celui-ci claquait bruyamment portière, s'étant replongé dans sa lecture.
- Merci... Merci papa, murmura le garçon, essoufflé.
Sévèrement, le père de famille observa le nouvel arrivant une brève seconde dans le rétroviseur, tandis que l'automobile progressait dans l'allée boisée.
Fort heureusement pour le jeune homme, l'homme se ravisa bien vite : le regard rayonnant, il détourna son regard vers son benjamin, qui feuilletait toujours son vieil ouvrage. Sur la couverture de ce dernier, écrit en tout petit en haut, on pouvait difficilement lire : 1000 et une raison de commencer l'astronomie.
- William, le dérangea son père tandis que l'automobile quittait la voie escarpé, est-ce que tu réalises que tu vas rentrer à Watterfall High ?
- Oui papa, répondit lentement son interlocuteur, tournant une page de son manuscrit.
- Es-tu également conscient que les résultats que tu obtiendras dans cette école seront déterminants pour le reste de ta vie ?
- Oui papa.
- Bien.
Un silence s'installa dans la voiture, l'adulte scrutant scrupuleusement le chemin qu'il était censé emprunter. La route devenait de plus en plus fréquentée, le ciel de plus en plus gris et morose. L'aîné, qui avait laissé sa fenêtre ouverte en dépit de la basse température, tourna à son tour la manivelle.
- Je tiens à te prévenir aussi que... Reprit le père de famille à l'attention de son plus jeune fils.
L'aîné, qui avait prêté attention au petit jeu de l'homme, notifia un nouveau regard de la part de ce dernier en direction de son frère dans le rétroviseur. Ce regard empli de tendresse, d'une fierté incontestable lui serra le cœur. Pourtant, comment pouvait-on être fier d'un enfant dont on ne distinguait actuellement que le nez fin, les yeux rivés sur un ouvrage (qu'il avait dû lire une bonne cinquantaine de fois) et des mains frêles, incapables d'accomplir un quelconque travail manuel ?
Amer devant cette tendre scène, le jeune homme reporta son regard sur le paysage. Bientôt, il oublierait bien vite cette ignorance dont il était victime.
- Cet établissement est un des plus respectables du pays... que dis-je, du monde. Des étudiants, tout comme toi aujourd'hui, viennent des quatre coins de la planète afin de pouvoir y étudier. Il faudra te montrer reconnaissant envers le savoir qu'ils t'apporteront, et avoir des résultats plus que satisfaisants...
Le père de famille jeta un regard appuyé en direction de son aîné, qui trouva subitement la houle maritime particulièrement captivante.
- Mais je ne me fais aucun souci pour toi mon bonhomme. Tu réussiras et tu nous honoreras, comme tu as l'habitude de faire. Fais-toi des amis, de préférence de famille influente, trouve ta voie et surtout étudie du mieux que tu peux.
- Oui père. Je ne vous décevrais pas, toi et maman.
Aux anges, l'homme de famille continua le trajet, satisfait, jetant des coups d'œil régulier envers son benjamin. Néanmoins, sa perception semblait avoir des failles, car il ne notifia pas les larmes perlant aux yeux de son ainé.
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Rocas
Teen FictionLe chaos régnait en maitre dans la cour principale, des blessés tentaient de fuir cette scène, en vain. Des livres scolaires volaient, accompagnés de pierres d'une taille plus ou moins importantes. Des coups de feu tirés dans le ciel par un directeu...