Chapitre 8

268 32 0
                                    

Le parking de l'hôpital était bouclé. Chaque accès était surveillé par un officier en uniforme. Le Lieutenant Thomasson attendait Kelly Michaels près d'une voiture, notant des informations sur son calepin.

— Bonjour Tom. Qu'est-ce qu'on a ? demanda-t-elle en le rejoignant.

— Ce véhicule est garé ici depuis ce matin, dit-il en montrant une voiture à l'écart. Jusque là rien d'anormal. Un agent de sécurité fait le tour, mais n'y prête pas plus attention. À un autre passage, il remarque que le ticket en évidence sur le tableau de bord n'est pas celui de cet hôpital. En s'approchant, il a vu ceci sur la banquette arrière, dit-il en lui montrant une photographie sur son téléphone.

— Sérieusement ? demanda-t-elle en regardant la boîte de transport posée sur la banquette.

— J'ai préféré vous attendre avant d'appeler les fédéraux.

— Attendez une seconde, fit-elle en ouvrant sa mallette pour en sortir du scotch noir qu'elle colla sur la camera de son téléphone.

— Que faites-vous ?

— Vous allez voir. J'ai une appli sur mon téléphone et... En passant son téléphone sur elle, Kelly voyait le compteur Geiger réagir lui donnant une lecture réaliste des radiations auxquelles tout le monde est exposé, tous les jours, en microgray par heure. J'y vais, dit-elle, tout de même moyennement rassurée, tenant son téléphone pointé devant elle. Pas d'élévation du niveau de radiation. Ça me semble normal, Tom. Mais par précaution, je vais prévenir le CDC. Qui s'est approché de la voiture ?

— L'agent de sécurité, qui a été isolé, moi et vous. Mais il y a aussi tous ceux qui ont pu se garer près de la voiture.

Kelly s'éloigna un instant le temps de passer son appel, expliquant ce qu'elle voyait, ce qu'elle avait fait. Le CDC confirma qu'ils ne seraient pas longs à arriver, et qu'en attendant, elle devait s'isoler des autres. Aussi, elle retourna auprès de son collègue.

— Il faut récupérer les enregistrements, et nous, nous mettre en isolement tant que rien n'est sûr.

— Déjà fait, sauf vous. C'est efficace cette appli ?

— Normalement, oui. Dites donc, vous vous êtes mis en quatre pour passer du temps avec moi, Tom, dit-elle en souriant pour dédramatiser un peu la situation.

— Vous savez que je vous apprécie, Kelly, tente-t-il de sourire. Merci pour les yaourts, ils sont délicieux.

— Ce n'est rien, je vous assure.

— Kelly... vous pensez que c'est...

— Je ne pense pas Tom, ne vous inquiétez pas. Parlez-moi, tenez, il était bon le match hier ?

— Quel match ?

— Je ne sais pas, n'importe lequel. Qu'est-ce que vous avez vu de bien au cinéma ou à la télévision récemment ? Faites-moi des suggestions, j'ai envie de renouveler mon stock de séries télé.

— Pas grand-chose de neuf, je crains.

Au temps pour lui faire changer les idées, pensa-t-elle, bon ! C'est l'heure des confidences.

— Vous savez que je connais le Commissaire depuis que j'ai quinze ans ? Il m'avait arrêté dans un parc pas très loin d'où j'habitais. C'est véridique, et demain je nierais tout. Je sortais d'une fête d'anniversaire de chez une copine, complètement saoule. C'était ma première fois. La première fois que je buvais. J'essayais d'enjamber le portillon pour sortir du parc, mais j'étais coincée. Imaginez un portillon haut de cinquante centimètres, j'étais incapable de l'enjamber. Ma veste s'était prise dans les motifs du portillon et je n'arrivais plus à me détacher. Cela m'avait énervée et vous savez comment je suis dans ces moments-là, j'ai la voix qui porte. Le Commissaire était Capitaine à l'époque. Il passait par là quand il m'a vu. Il a voulu m'aider, mais je l'ai engueulé comme il faut, lui disant que j'y arrivais très bien toute seule. Des officiers en uniforme sont arrivés, vu tout le raffut que je faisais, quelqu'un les avait appelés. Eux m'avaient reconnu, malgré mon état. J'avais toujours eu de bons rapports avec la police, jusqu'alors, depuis toute petite. Ils se sont occupés de moi. Ils m'ont ramenée chez moi et sont revenus me voir le lendemain pour s'assurer que j'allais bien. Je les ai accompagnés au Commissariat où je me suis excusé auprès du Capitaine, j'ai eu le droit à un sermon, mais il avait enquêté sur moi auprès des collègues, tous les flics de mon quartier n'avaient que des bons mots, aussi il a mis ça sur « ma première fois » et l'affaire fut oubliée. Il y en a eu une deuxième, et ce fut la dernière, c'est là est plus...

Le véhicule du CDC se gara près d'eux, interrompant Kelly dans sa confession. Le Lieutenant avait au moins pensé à autre chose, c'était le but et il l'avait compris.

— Merci, Kelly.

La porte du fourgon s'ouvrit sur un homme, sa tenue à moitié enfilée. Finissant de se protéger, il enfonçant sa tête dans son casque, puis s'équipa d'un compteur Geiger avant de s'approcha de Kelly et de son collègue.

— Lieutenant Michaels ? demanda-t-il derrière son masque, pointant son compteur sur elle. Niveau de radiation normal.

— Lieutenant Thomasson... tout va bien. Vous me montrez le véhicule ?

S'approchant, le compteur Geiger ne détecta pas grand-chose. Essayant d'ouvrir la portière, il demanda à un collègue de lui apporter un pied-de-biche qu'il utilisa pour fracasser la vitre arrière. Le compteur ne s'affolait pas, ce qui était bon signe. Le passant sur la boîte, il n'y avait rien. Retournant vers les Lieutenants, l'agent du CDC retira son masque pour expliquer que tout était correct. Qu'ils allaient maintenant placer la boîte dans un coffrage où ils allaient pouvoir la manipuler avec des gants au cas où le contenu serait bactériologique et non radioactif.

— Restez-là, Tom. C'est mon boulot de faire ça, vous allez suivre en direct ce que je vais faire et voir. Vous pourrez tenir le téléphone, agent...

— James Finoli. Pas de problème.

Kelly appela Tom en visio tout en s'approchant. Des techniciens du CDC refermaient le coffrage quand elle approcha. Donnant son téléphone à l'agent Finoli, elle glissa ses mains dans les gants.

— C'est un loquet tout simple, je ne vois pas de fil de détente, je ne constate rien sur les côtés ni au niveau des charnières. La boîte est très légère. Comme si elle était vide. Pas de bombe en tout cas, trop légère. J'ouvre.

Lentement, elle souleva le couvercle, anxieuse.

— Toujours pas de filage, pas de point de contact apparent.

Kelly ouvrit le couvercle plus grand, encore plus, complètement.

— Une fiole, vide, scellée. Et... un message. « Bouh ». C'est quoi, une blague ? demanda-t-elle en regardant son téléphone et tous les agents qui la regardaient.

— Nous allons étudier la fiole, voir ce qu'elle contient ou a pu contenir, affirma l'agent du CDC.

— Il faut que l'on relève les empreintes d'abord, avant que tout soit contaminé, expliqua Kelly en refermant le couvercle de la boîte.

— J'ai une tenue pour vous, habillez-vous, Lieutenant Michaels.

Équipée de son scaphandre jaune – pourquoi tous les autres sont en blanc ? se demanda-t-elle – Kelly balaye l'éprouvette de poudre, mais ne découvre aucune empreinte. Elle colle tout de même son étiquette autocollante dessus, au cas où il y aurait des particules. Elle procède de même avec la boîte, puis demande à tous de lui faire de l'ombre afin qu'elle photographie la note, pour la passer sous différents filtres, espérant ne pas trouver un message invisible, croisant les doigts pour que ce soit une mauvaise blague, mais en doutant au plus profond d'elle-même.

— Nous vous ferons parvenir les résultats au plus tôt, voici ma carte pour me rejoindre.

— Voici la mienne, répondit-elle en souriant. Ravi de vous avoir rencontré. Ne le prenez pas mal, mais j'espère ne pas vous voir trop souvent.

— Rassurez-vous, c'est souvent l'effet que l'on fait. Je vous tiens au courant, dit-il en remontant dans sa fourgonnette.

— Eh bien, Tom. Vous m'accompagnez au labo, que je passe cette note sous des filtres, vous devez avoir aussi hâte que moi de voir s'il y a un message caché ?

— J'espère que ce ne soit qu'un canular.

Il avait tort, le filtre révéla un « Vous » sous le Bouh, nous donnant des sueurs froides et une nouvelle interrogation. À qui le « Vous » s'adressait-il ?

Fausse piste (WATTYS WINNER 2022)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant