Chapitre 13

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Je dois avouer que je n'avais pas résisté à l'envie d'aller voir la match de foot de ce soir et je ne regrettais en aucun cas d'être venu, surtout qu'Analia a joué sur le terrain en prouvant à tous ceux, moi compris, qui ne l'avaient pas inclue, qu'ils étaient des idiots. Son jeu était remarquable, elle avait littéralement ridiculisé tous les joueurs adverses en leur piquant la balle sous le nez à plusieurs reprises. En rentrant chez moi, je m'installais sur le canapé en soupirant et ma mère s'assit à côté de moi en me caressant doucement les cheveux comme elle le fit si bien et comme seule une mère sait le faire.

« Qu'est-ce qui te tracasse mon ange ? me demanda-t-elle doucement »

Je haussais les épaules. Je ne sais même pas ce qui me dérangeais si ce n'est son absence.

« Tu sais, j'ai déjà vu ce regard. Me dit-elle

-Quel regard ?

-Le tien. Tu as le regard vide, tu es plongé dans tes pensées et tu ne semble plus faire attention à rien. Mais je sais à quoi tu songes.

-Comment pourrais-tu le savoir maman ?

-Les mères ont un sixième sens pour sentir les choses. »

Je tournais la tête vers elle, vers ses grands yeux pleins d'amour et de compréhension et hésitais quelques secondes à tout lui dire avant de me raviser.

« Je vais bien, je suis juste un peu fatigué par ma journée. »

Elle hocha la tête même si au fond de moi je savais qu'elle savait que je mentais. Elle sortit en le laissant seul avec mes pensées. C'est sur le canapé que je m'endormis.

C'est ma mère qui me tira du sommeil le lendemain matin. Elle arborait un éternel sourire, qu'elle refusait de voir quitter son visage. Je me levais et pris une douche avant de m'habiller simplement d'un jean noir troué aux genoux et un tee-shirt blanc. Je pris ma paire de chaussures blanche avant d'aller au lycée. Quand j'entrais dans l'établissement, je remarquais immédiatement un attroupement au fond de la cour. Félix et Jim vinrent vers moi.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? demandais-je. Une bagarre ?

-Une nouvelle star. Analia est devenue l'objet d'attention de la moitié des personnes de cet établissement après le match d'hier et ils la harcèlent depuis qu'elle est arrivée pour savoir s'ils peuvent prendre des photos et avoir des autographes. »

Je ris devant la stupidité de la situation et la sonnerie retentit. Je vis Analia s'échapper en courant vers la salle de philo et s'asseoir. Je m'approchais d'elle et m'accoudais à la table.

« Analia, je peux avoir un autographe s'il te plait ? demandais-je en faisant mes yeux de chien battu.

-Ah non ! ne t'y met pas toi parce que je n'aurais aucune gêne à t'encastrer dans le mur, dit-elle en riant à moitié. »

J'éclatais de rire et m'assit à ma place au moment où le cours commença. Pendant quarante-cinq minutes, on étudia des œuvres à valeur philosophiques. Quand le prof nous montra la dernière œuvre, il demanda ce qu'elle signifiait.

Sur le tableau, il était projeté une œuvre d'un certain René Magritte représentant une pipe. Mais le plus étrange c'est qu'il était écrit en dessous « Ceci n'est pas une pipe ». Le prof demanda ce que cela signifiait mais personne ne leva la main sauf une personne.

Analia.

Comme l'autre fois, le prof l'interrogea sur la signification de ceci, à quoi elle répondit :

« Comme l'indique la ligne calligraphiée en dessous du dessin, ceci n'est pas une pipe. C'est l'image d'une pipe. La pipe est un objet matériel alors que son dessin n'en est qu'une représentation. Donc ceci n'est pas une pipe, c'est l'image d'une pipe. »

Le prof la félicita pour son sens de l'observation et je restais surpris par sa réflexion sans faille. La sonnerie retentit et tout le monde sortit de la salle. Je voulus parler à Analia mais elle était entourée par des dizaines de personnes qui la félicitait soit pour le match d'hier, soit pour sa déduction en cour de philo alors je la laissais à ses admirateurs et me dépêchais d'aller en anglais. Elle arriva quelques secondes à peine avant que le cours ne commence et passa son heure à griffonner dans son carnet. Je me demandais ce qu'elle dessinait car cette fois, contrairement à l'autre jour, son visage était fermé. Pas l'ombre d'un sourire n'étirait ses lèvres, ses sourcils étaient froncés et ses traits tirés. Elle ne dessinait pas quelque chose de très joyeux je pense. Et si ce qu'elle dessinait était triste, c'est qu'elle l'était aussi.

Quand la fin de l'heure arriva, elle ne sembla même pas entendre la sonnerie, trop plongée dans ses pensées pour percevoir ce qu'il se passait autour d'elle. Je m'approchais et posais ma main sur son épaule. Elle revint immédiatement à la réalité.

« Ça a sonné, lui dis-je doucement.

-Je sais, répondit-elle. Je n'ai juste pas envie de sortir si c'est pour que des dizaines de gens que je ne connais pas viennent me voir pour me féliciter du résultat du match d'hier. Je n'étais pas seule sur le terrain mais c'est moi qu'ils harcèlent. Regarde. »

Elle me tendit son carnet que je repoussais. Je ne voulais pas m'immiscer dans sa vie et dans sa tête.

« Je t'y autorise, profites-en ça n'arrivera pas souvent. »

Je baissais les yeux vers le carnet et le prit en main pour regarder le croquis qu'elle avait fait. C'était une cage, avec une petite fille à l'intérieur et tous les gens autour essayaient de forcer la cage pour entrer. Mais la petite fille, elle, était recroquevillée au sol, comme si elle voulait juste dormir pour échapper à tous ces gens, des bêtes qui dérangeaient sa vie. Même si le fond était triste, le message qu'il faisait passer était magnifique et le dessin, tout simplement éblouissant par la maitrise des ombres et du relief.

« Cameron, ça va ? me demanda-t-elle »

Je relevais la tête vers elle, je crois que j'avais les larmes aux yeux.

« C'est magnifique. Murmurais-je dans un souffle, à peine plus fort qu'un murmure »

Elle sourit tristement et je la pris dans mes bras.

« Je vais t'aider à les éviter si tu veux, je sais à quel point tes dessins sont spontané donc si tu as dessiné autant de mal-être c'est vraiment que ça ne va pas. Allez, viens. »

Je lui pris la main et l'entrainait avec moi le long des couloirs jusqu'à notre salle de physique, qui était, et heureusement, vide.

« Cameron ? m'appela-t-elle doucement.

-Oui ?

-Merci, merci pour tout. »

Elle me sourit et je parlais avec elle jusqu'à ce que la sonnerie retentisse et que le cours commence. 

Le badboy et la prétendue badgirlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant