JE LE PROMETS (Divergente)

Chapitre 39 - Dernier repas

En me levant ce matin là, j'ai comme une sensation bizarre au creux de l'estomac.

Mais cela doit être normal. Aujourd'hui, c'est le jour du Test d'Aptitude de Caleb et Béatrice, qui va leur indiquer pour quelle faction ils sont fait parmi les cinq qui existent. Et demain, à la cérémonie du Choix, ils décideront de celle à laquelle ils veulent appartenir, de leur destin, du reste de leur vie.

Juste avant de prendre le petit déjeuner, je monte avec Béatrice à l'étage, sur le palier, où se trouve le seul miroir de la maison, caché derrière un panneau coulissant. Les règles de notre faction autorisent à s'y regarder le deuxième jour de chaque trimestre, et c'est ce jour là que je coupe les cheveux de ma fille. Aujourd'hui, cela tombe le jour du Test d'Aptitude, et j'en profites donc pour lui faire une coupe de cheveux.

Béatrice s'assoit sur le tabouret tandis que je me tient derrière elle avec des ciseaux.

Je prends garde à ne pas trembler. C'est peut-être la dernière fois que je coupe les cheveux de ma fille... c'est un rite, une habitude que j'avais prise, et cela me permettait d'observer ma fille. À chaque coup de ciseaux que je donne, des mèches tombent par terre en formant de lourds anneaux blonds. J'ai toujours trouvé magnifiques les cheveux de ma fille. Caleb est brun, tout comme Andrew et moi, mais Béatrice en revanche est blonde. Depuis qu'elle est toute petite, je prends du plaisir à toucher ses cheveux, à les lui coiffer, à les lui couper, mais désormais cela ne sera peut-être plus comme ça.

Quand j'ai terminé, je rassemble tous ses cheveux et en fait une torsade que je noue en chignon.

Je jette un coup d'œil furtif dans le miroir. J'y vois une jeune fille frêle, avec un visage étroit, de grands yeux ronds et un long nez aquilin. Elle a toujours l'air d'une petite fille, avec ses joues... je la revois encore quand elle avait trois ans, avec ses longs cheveux blonds qui lui tombaient devant le visage. Ma fille vient d'avoir seize ans. Nous avons fêté leur anniversaire il y a quelques mois. Comme à l'accoutumée, nous avons offert un livre à Caleb, car c'est la seule chose qui lui fait plaisir. Et à Béatrice, nous lui avons offert une montre (le seul accessoire permis par les Altruistes, et seulement parce qu'il est utile). Elle est toute simple, le cadran est en verre et le bracelet est gris. Je ne sais pas si elle pourra le garder plus tard, si jamais sa nouvelle faction l'interdit, mais en tout cas, cela me fait plaisir de la voir la porter.

– Voilà, je dis en mettant une dernière épingle afin de faire tenir le chignon.

Son regard rencontre le mien dans le miroir. Elle a l'air d'avoir envie de tourner les yeux, comme si elle avait honte que je l'ai surprise en train de se regarder dans le miroir. C'est une tradition chez les Altruistes, ne pas se faire prendre en train de se regarder dans un miroir. Mais je ne peux pas en vouloir à ma fille... elle ne se voit pas souvent dans un miroir... et je crois que parfois elle a besoin de se rassurer en voyant à quoi elle ressemble. Je ne sais pas si elle a conscience de sa beauté. Elle est vraiment belle, autant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Elle a un cœur en or et je sais qu'elle reprendra le bonheur autour d'elle.

Comme pour la rassurer sur le fait qu'elle peut se regarder dans le miroir et qu'elle n'a pas à avoir honte, je lui souris.

Elle parait surprise par ma réaction, mais elle continue de me regarder dans les yeux à travers le miroir.

– Alors, c'est le grand jour, je dis, en brisant le silence.

– Oui, me répond ma fille.

Je sens qu'elle est inquiète, et je la comprends... j'étais pareille le jour de mon Test, je décide cependant de lui demander.

– Tu te sens nerveuse ?

Je la fixe dans le miroir.

– Non, me répond-t-elle. Le test n'a pas à modifier nos choix.