What's left of us - Cha Eunwoo

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Je fais le tour de la villa. C'est tellement grand que j'ai l'impression d'avoir marché deux heures en voulant vérifier que je n'avais rien oublié dans chaque pièce.
Les déménageurs ont chargé tous les cartons et sont déjà partis les déposer dans le nouvel appartement, tandis que les agents d'entretien qui viennent d'arriver s'affairent à astiquer chaque recoins de la bâtisse.

Je mets un pied dehors et marche jusqu'à la piscine, je n'en ai pas vraiment profité le temps de mon séjour ici.
Je descends l'allée et décide de mettre les voiles en jetant un dernier regard à la villa.

Je quitte le quartier avec les quelques affaires personnelles que j'ai tenu à transporter moi-même.

L'appartement que mon parrain m'a trouvé est situé un peu avant le plein cœur de la ville, c'est bien plus animé ici que dans le quartier riche où je vivais jusqu'à présent. Un peu plus craignos aussi, mais ce n'est qu'un détail.

Je me gare dans le parking souterrain, me charge de mes affaires et emprunte l'ascenseur jusqu'au dernier étage, le dixième. Je trouve rapidement la porte d'entrée et y glisse la clef.
L'appartement est spacieux et lumineux, il y a des baies vitrées qui donnent sur la ville.

Je pose mes affaires au milieu des cartons que les déménageurs ont laissés et monte à l'étage du duplex, il y a deux chambres, dont une qui est bien plus grande que ce qu'il ne faut, une salle de bain avec douche a l'italienne et un accès au toit-terrasse aménagé avec salon de jardin.

Plus je visite mon nouveau lieu de vie, plus les pièces rénovées avec goût se succèdent et je m'en veux immédiatement. Je n'ai pas l'impression de mériter tout ça. C'est bien trop.

Mon téléphone sonne dans la poche arrière de mon jean, me coupant dans ma réflexion. Le nom de Rose s'affiche à l'écran.

- Allo ?
- Salut ! Comment tu vas ?
- Bien et toi ? Je viens d'arriver dans mon nouvel appart.
- Tu veux que je vienne t'aider à vider tes cartons ?
- Seulement si tu apportes de la bière !
- Tu me prends pour qui ?, lâche-t-elle, faussement offusquée.

Je lui donne l'adresse avant de raccrocher et commence à ouvrir les cartons du salon en attendant mon amie.
Je n'ai pas beaucoup d'affaires et l'appartement est déjà meublé, le rangement ne devrait pas prendre longtemps.

La sonnerie de l'interphone me fait sursauter une vingtaine de minutes plus tard, et Rose monte rapidement jusqu'au dixième.

Après être entré et s'être exclamée un millier de fois devant toutes les pièces de l'appartement, nous ouvrons deux bières et commençons à ranger mes affaires, sans oublier de lancer une playlist pour nous mettre dans l'ambiance.

Deux heures plus tard, je m'affale sur le canapé d'angle, ma troisième bière à la main. Rose éteint l'aspirateur et me rejoint.

- Enfin fini !, s'exclame-t-elle.
- Je pensais que ce serait moins long. Tu as faim ? J'irai bien manger un truc à l'extérieur.

Elle hoche la tête tout en buvant une gorgée de bière.
Après être passées prendre a manger dans un fast-food, nous nous dirigeons vers une des nombreuses collines de la ville. Nous nous installons sur l'herbe fraîche, l'horizon nous laissant une vue panoramique sur le coucher de soleil au-dessus des nombreux immeubles.

- On est vraiment trop bien ici, dis-je en croquant mon burger, tu crois que les autres sont dispos ?

Elle hausse les épaules, vraiment associable cette fille. Je prends mon téléphone et écrit dans notre groupe WhatsApp.

Charlie
Vous êtes dispos ? On est sur la colline avec Rose.

Nathan
Nope ! Je suis de service ce soir, désolé.

Olivia
Pas possible pour Léo et moi non plus, on est à un repas de famille :(

Charlie
Pas grave les enfants, on se capte plus tard !

Rose zieute l'écran de son téléphone à côté de moi, et je comprends qu'elle lit la courte conversation elle aussi.

- Ça devient de plus en plus difficile de se retrouver tous ensemble ces derniers temps, remarque-t-elle.
- C'est vrai, mais on se connaît depuis tellement longtemps. On a grandi, chacun bosse, c'est fini le temps de nos dix-sept ans où on se voyait quasiment sans interruptions.

Me remémorer mon groupe d'amis il y a quelques années m'envoie une petite claque de nostalgie derrière la tête.
Au lycée, nous étions toujours fourrés ensemble, on se voyait quasiment sans interruptions. Rares étaient les fois où nous rentrions dans nos maisons respectives après les cours. Il fallait toujours qu'on soit tous chez l'un ou chez l'autre. Même si nous ne faisions rien de particulier, discuter et rire ensemble nous suffisait.

Aujourd'hui, nous sommes toujours aussi soudés malgré nos hauts et nos bas, mais chacun d'entre nous a fait son chemin, c'est normal après tout.
Entre Léo qui est parti plusieurs fois à l'étranger, Nathan qui accepte plein de petits boulots qui lui prennent tous son temps et Olivia qui part souvent en déplacement pour son travail, c'est parfois difficile de se retrouver.

- Donc, commence Rose, tu vas bosser pour ton parrain, mais pour quelle célébrité exactement ?
- Je t'avoue que je n'ai même pas demandé. Sûrement un chanteur, il m'a parlé d'un futur album ou quelque chose comme ça.
- Je trouve ça trop excitant comme boulot !
- Oui enfin... Quand il m'a décrit le boulot, il a parlé d'aller trouver du poulet à trois heures du mat. "Excitant" n'est pas le premier mot qui me vient à l'esprit du coup, dis-je en souriant.
- Sauf si tu peux aussi manger du poulet, répond-elle à mon sourire.
- Grosse bouffe ! Et toi ? Le boulot alors ? Ça se passe mieux ?
- Pas vraiment, j'y vais avec la boule au ventre tous les matins.

Son regard dérive sur la ville et elle perd son sourire instantanément.

- Tu devrais vraiment changer Rose, tu vas finir par te rendre malade à force de prendre sur toi face à ton patron.
- J'aimerais vraiment changer, mais je suis tellement bien payée actuellement. J'ai un vrai dilemme entre mon confort de vie avec ce salaire et mon confort psychologique et ma santé.
- Penses a ta santé, la question ne se pose même pas, il n'y a rien de plus important. Si tu restes et que tu fais un burn-out, tu seras peut-être dans l'incapacité de travailler pendant un petit moment avec des revenus moindres, et ça reviendra au même que de changer de boulot en étant payée un peu moins.
En plus, ce n'est pas humain de se faire insulter tous les jours alors que tu fais de ton mieux. Penses-y, vraiment.

Elle me lance un regard qui en dit long. Je vois bien qu'elle souffre. J'aimerais qu'elle quitte son travail pour son bien, mais je comprends aussi son désarroi. J'imagine qu'elle met de côté ses sentiments pour pouvoir continuer à se lever tous les matins mais je sais qu'un jour, ça ne suffira plus. Elle joue avec le feu.

Nous finissons de manger en parlant de tout et de rien jusqu'à ce que la fatigue s'invite au milieu de notre conversation, nous décidons donc de rentrer.

Je propose à Rose de rester dormir chez moi mais elle décline l'invitation.
Ses problèmes la rendent plus distante ces temps-ci et bien sûr, je ne lui en veux pas. J'aimerais juste qu'elle me parle plus, ou du moins, j'aimerais pouvoir la soulager de ses soucis.