What's left of us - Cha Eunwoo

30

Les journées qui se succèdent sont un parfait mélange entre l'extase de vivre le moment présent et la crainte de voir le soleil se lever sur la suivante.
Lorsque la nuit tombe, la nostalgie m'envahit, et même si j'essaie de ne pas le montrer et que nous n'en parlons pas, je crois qu'Eunwoo ressent la même chose.
Dormir est devenu une perte de temps alors nous restons éveillés, ne voulant gâcher aucune heure qui passent.

Je me bats avec des baguettes lorsque le chanteur réapparaît dans le salon, l'objectif de son téléphone braqué sur moi.
J'avais envie de manger des sushis ce soir mais j'aurai dû éviter de passer commande. C'est honteux, mais je n'ai jamais réussi à tenir des baguettes et Eunwoo bataille depuis deux bonnes minutes pour m'expliquer.
Alors qu'il se moquait allègrement de moi, il s'est rendu compte que nous n'étions pas en train de filmer, voilà pourquoi je me retrouve enregistrer sous tous les angles, râlant à chaque fois qu'un maki s'échappe de mes baguettes qui ne cessent de se croiser.
Je parviens finalement à manger, non sans mal et sous le rire d'Eunwoo auquel je ne cesse d'envoyer de petits coups dans l'espoir de le faire taire.

Après manger, une bonne partie de la soirée est consacrée à discuter en finissant la bouteille de blanc de la veille. L'une de mes jambes est repliée contre moi alors qu'Eunwoo est assis en tailleur à côté de moi.

- Les journées passent trop vite, il dit doucement.
- Beaucoup trop vite, j'ajoute dans un murmure en posant mon menton sur mon genou pour le regarder.

Eunwoo place quelques mèches de mes cheveux derrière mon oreille puis son pouce  vient caresser doucement ma pommette.
La lumière chaude de la grande lampe du salon réchauffe son teint, et je ne peux m'empêcher de me dire qu'il est la plus belle chose qui me soit arrivé. Tout ce que je croyais savoir sur l'amour s'est effacé au contact d'Eunwoo, parce que je n'ai jamais rien connu de tel, de si fort.

Penser que je ne pourrais plus jamais toucher sa peau, embrasser ses lèvres et me blottir contre lui me fait tellement mal que la douleur en devient physique.
Je me redresse alors qu'une larme s'échoue contre le pouce d'Eunwoo.

Ses yeux rencontrent les miens et tous les sentiments que ce simple regard provoque en moi me coupe le souffle.
Je suis amoureuse de cet homme, d'une façon qui me dépasse, et il va me quitter.

Ma main se pose sur la sienne, cajolant toujours ma joue, et je renifle, inspirant profondément avant de prendre la parole :

- Je t'aime, je murmure alors que mes larmes redoublent.

Il ne réagit pas tout de suite. Il semble presque étonné que je lui avoue ça maintenant. Je sais très bien qu'il le savait, il n'est pas stupide, mais Rose avait raison : le savoir est une chose, l'entendre en est une autre. Je suis simplement déçue d'avoir à lui dire dans un moment où je pleure, parce que ce n'est pas l'aimer qui est douloureux, c'est le voir partir.
Sa bouche s'entrouvre légèrement, comme si l'air autour de nous venait de disparaître et qu'il cherchait à happer ce qu'il en reste.

- Je t'aime tellement...

Mes mots sont hachés lorsqu'ils glissent hors de ma bouche dans un murmure déchirant.
Cette fois, Eunwoo se met en mouvement et mon dos rencontre le tissu du canapé alors que ses lèvres m'aident à respirer en embrassant les miennes.

- S'il te plaît, il chuchote contre ma bouche, arrête de pleurer. Ça me fait trop mal.

Il se redresse pour pouvoir me regarder tandis qu'il essuie les larmes qui s'accumulent sur mes joues.
Mon souffle s'échoue contre son visage, faisant virevolter quelques mèches de ses cheveux teints.

- Embrasse-moi encore.

Je quémande d'une voix brisée.
Il prend quelques secondes pour me regarder de ses yeux brillants et accède à mon souhait.
Nos langues se trouvent, et la façon dont elles s'accompagnent toujours de la sensation qu'elles se connaissent depuis des années, m'ébahit.
Je crois que je n'expliquerai jamais ce sentiment de reconnaître Eunwoo. J'ai tout simplement arrêter d'essayer de comprendre tout en sachant que, si mille mains me touchaient dans un noir complet, je reconnaîtrais les siennes sans hésiter.