What's left of us - Cha Eunwoo

27

Le voir là, dans mon salon, est presque irréel. Aussi doux qu'un rêve mais noirci par le début d'un cauchemar.

Je sais que nous devrions avoir une discussion parce qu'il est revenu et que j'ai ouvert la porte, mais j'angoisse et ma bouche reste close.

Milo s'est jeté sur Eunwoo comme s'il l'avait reconnu, faisant sourire le coréen qui s'est accroupi pour le caresser.
Ce sourire me foudroie. Je dois être maso parce que je ne veux pas que ma mémoire me laisse de répit, je ne veux pas oublier ses lèvres qui s'étirent si joliment. J'essaie de le graver quelque part dans mon esprit, observant Eunwoo comme s'il était une œuvre d'art.

Il se redresse et ses yeux tombent dans les miens. Je lui propose quelque chose à boire parce que c'est tout ce que je suis capable de faire. Il accepte une bière et, parce que je me sens à l'étroit dans cette pièce avec lui, je lui propose de monter sur le toit-terrasse.

Une fois à l'étage, Eunwoo s'installe dans le salon de jardin et je m'éloigne volontairement de lui, préférant contempler la ville par-dessus la balustrade. Je sens ses yeux brûler mon dos au fer rouge.

- Tu m'as demandé ce que je faisais là.

Je frissonne et baisse la tête, incapable de répondre. La rue en bas est animée et mes yeux se perdent sur les phares des voitures qui passent.

- Je suis venu parce qu'il faut que je te dise ce que je n'ai pas pu te dire l'autre soir.
- Pourquoi tu fais ça ?, je demande à voix basse.
- Parce que ça me fait mal de savoir que ce qui me mène jusqu'à toi est interdit, mais c'est encore plus douloureux de le repousser.

Je mords nerveusement ma lèvre inférieure. Eunwoo est la contradiction de ma vie : je voudrais le rejeter en l'ayant quand même, je voudrais ne l'avoir jamais rencontré tout en voulant le voir sans cesse. Je voudrais que mon cœur qui bat la chamade s'arrête alors que cette mélodie qui monte jusqu'à mes tempes est la plus belle que je n'ai jamais eue à écouter.

Je sens soudainement sa présence dans mon dos. Il s'installe contre la rambarde à côté de moi. J'ose le regarder un instant, les lumières de la ville éclairant son visage.

- Tu m'as demandé de t'aider ce soir-là, comme si j'étais la seule chose qui pouvait te sauver. Je ne sais pas si ça vient de ta demande ou de ton regard triste, mais j'ai réalisé que je voulais vraiment le faire.

Ses yeux trouvent les miens encore une fois, et ils s'y ancrent avec ferveur, me coupant presque le souffle alors que mon cœur me supplie de le laisser sortir des os qui l'entravent.

- Je voulais vraiment te guérir. Comme si c'était devenu ma raison d'être.

J'ai envie de l'embrasser alors que ses yeux vacillent sur mon visage.

- C'est chavirant et terrifiant à la fois, et je me réveille tous les matins avec pour seule pensée le regret de t'avoir mise à la porte comme si ça ne représentait rien.

Sa main glisse sur la rambarde, rejoignant presque la mienne.
Je sais que s'il me touche, mon corps me rappellera à quel point il réclame le sien, mais je n'enlève pas ma main pour autour.

- C'est terrifiant parce que c'est inconnu, interdit et douloureux, mais c'est chavirant parce que c'est puissant et inévitable.

Des larmes montent jusqu'à mes yeux, menaçant de les quitter à tout instant.
Eunwoo se rapproche doucement de moi et j'ai la sensation de fondre comme neige au soleil. Tout son aura m'enveloppe et je réalise que j'avais oublié sa capacité à nous transporter dans une bulle de coton.

- Tu ne veux pas l'entendre mais je suis amoureux de toi, et chaque jour m'y ramène.

Mon cœur se gonfle, mes larmes s'échappent et sa main touche la mienne. Il l'a dit et la lueur sincère dans ses yeux ne fait qu'attiser mes sentiments.
Je ne peux plus reculer, je ne peux plus rien repousser. Mon cœur me hurle d'accepter et le creux de mon ventre s'anime.