Chapitre 4

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J'aurais préféré ne pas décrocher. Sa voix me brûle le corps. Mes larmes menacent mes yeux. Je n'arrive pas à répondre. Aucun mot ne veut sortir de ma bouche. Ils sont bloqués. Pétrifiés.

— Ma puce ?

— Non...

Je n'arrive pas à articuler plus que ce mot dans un souffle. Impossible pour moi de penser et de verbaliser à voix haute tout ce que je ressens. Je pose ma main sur ma bouche pour retenir un sanglot et je laisse mon corps glisser le long de la porte pour m'asseoir au sol.

— Tu es là ? demande-t-elle doucement.

— Oui.

— Est-ce que tu peux écouter ce que j'ai à te dire ?

— Non maman. Je suis désolée mais je ne peux pas.

— S'il te plaît, insiste-t-elle, nous devons parler.

— Non. Non! Je n'ai rien à te dire, dis-je dans un violent murmure.

— Alors laisse moi au moins te parler.

— Non. Je ne veux pas t'entendre. J'en ai assez vu. 

- Justement, il faut que nous parlions de ce que tu as vu.

Je ferme les yeux, pour tenter de m'évader, loin de ce qu'il se passe dans ma vie de famille... Pourtant, dès que je tente d'oublier ce que j'ai vu, les images me reviennent en tête.

Mauvais souvenir...

— Lucy...

— Je dois te laisser maman, insisté-je en fermant les yeux et posant ma main contre mon front.

— S'il te plaît, écoute moi.

Je ne réponds rien. Je ne sais tout simplement pas quoi lui dire de plus, ni comment articuler mes pensées. Elles sont trop nombreuses. Trop flous.

— Lucy ! Tu dois m'écouter. Comment allons-nous fêter Noël dans de telles conditions ?

— Comment peux-tu encore penser que je serai présente pour Noël ? dis-je en riant.

— Tu ne rentre pas à la maison ? dit-elle alors que sa voix se casse.

— Non. Je pensais que ne pas répondre à tes messages était une réponse assez claire. Apparemment pas...

— En vingt-cinq ans nous n'avons jamais fêté Noël séparément.

- En vingt-cinq ans tu n'avais jamais trompé papa.

Un silence pesant s'installe entre nous, elle ne dit plus rien et je n'ai pas la force de continuer. Les mots sont sortis et ils m'ont brûlé la gorge.

— Lucy...

— Je ne serais pas présente pour Noël. Bonne soirée.

Je raccroche sans plus attendre, posant mon téléphone sur le sol près de moi. Je laisse le dos de ma tête rejoindre la porte et je ferme les yeux un instant. Souvenirs douloureux d'un moment qui bouleverse des vies. Ma vie. Celles de mes parents. Nos vies. Je pose mes coudes sur mes jambes et ma tête bascule en avant pour se réfugier entre mes mains. Bon sang.

— Lucy ?

Je me redresse et sèche mes larmes, la peur fait monter le battement de mon cœur, et j'ai mal à la poitrine. Je ne réponds pas, de nouveau paralysée par ce qui se passe. Mon corps ne veut pas agir. Il ne bouge pas. Ne répond pas. Il est juste présent dans une chambre d'un chalet que je ne connais pas.

— Lucy, tu es là ? demande la douce voix de Julie qui arrive à me détendre.

— Une minute.

Je récupère mon téléphone sur le sol, je me recoiffe rapidement et ouvre la porte. Quand elle se trouve face à moi, soudain je sens que mon corps va tanguer.

Un chalet pour Noël (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant