4 - Le trajet avec un fou

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Deux minutes. C'était le temps qu'avait duré le silence dans la voiture avant que le téléphone du châtain ne sonne. Et à l'entente des guitares qui gueulèrent, Louise roula des yeux.

— Ouais mec ! lança le fou à côté d'elle en décrochant. Ouais ouais je sais, soupira-t-il. Ouais je sais que ça débute à pile mais relaxe, j'suis dans un taxi là. J'arrive bientôt.

Louise choisit de regarder par la vitre pour s'occuper car elle n'avait pas l'intention d'écouter la conversation téléphonique de celui qui lui avait foutu une porte dans la gueule. A cause de lui, elle était tombée et elle avait encore mal à la tête. Sans oublier qu'elle avait sali le coude de son manteau. Qu'allaient penser ses collègues de travail en la voyant dans cet état ?

La plupart des lumières de la ville étaient allumées, ce qui rendait le chemin presque féérique. Malgré les restrictions de cette fin d'année, ils avaient visiblement réussi à trouver des solutions. Et Louise en était ravie. Parce qu'un Noël sans décoration, ce n'était pas un Noël.

— Oh mais tu fais chier Jack, ça va, j'arrive. Quoi ? Répétition ? Ah ouais, c'était prévu ça ?

Malgré l'envie de Louise de ne pas écouter la conversation, le châtain parlait tellement fort et l'homme à l'autre bout du fil gueulait tellement, qu'elle ne put se concentrer sur autre chose.

Apparemment, le danger public qui l'avait traitée de névrosée devait faire une représentation et son groupe l'attendait. Un musicien ? A cette pensée, la jeune femme choisit de regarder le concerné.

C'est vrai qu'avec son blouson de cuir, ses cheveux éclatés, son jeans noir et ses rangers, il avait tout du rockeur.  Puis, même s'il n'était pas du tout son genre, Louise dut reconnaître qu'il avait une belle gueule. Le genre de gueule qu'elle voyait sur ces bouquins de badboy dans les supermarchés.

Durant une fraction de seconde, elle s'imagina être la protagoniste d'une histoire du genre et cela lui sembla si ridicule qu'elle étouffa un rire. Rire qui attira l'attention de celui qui ne cessait de soupirer au téléphone.

— Qu'est-ce qu'elle a la névrosée ? demanda le châtain.

Lui en tout cas, il avait tout de ces mecs dans les bouquins, le job, la gueule et surtout, la mentalité.

— Ouais allez, c'est ça, à dans quelques minutes. Tchao.

Le rockeur raccrocha et Louise se sentit soudainement observée.

— C'est quoi ton problème toi ?

La question de l'homme surprit la jeune femme qui haussa un sourcil avant de tourner la tête vers lui.

— Pardon ?

— Tu m'agresses comme une putain de névrosée, après tu te soumets comme la dernière des faiblardes et maintenant tu me mates comme si t'allais me bouffer ?

Louise s'étouffa avec sa propre salive et commença à tousser. Cela valut un coup d'œil de la part du conducteur qui se demanda sûrement si la femme allait mourir dans sa voiture. Il était peu probable qu'il s'inquiète vraiment pour Louise, la concernée le savait bien.

— Je vous demande pardon ? s'indigna-t-elle.

— Oh la, m'dame j'ai un balai dans le cul est outrée, se moqua le rockeur en l'imitant d'une main maniérée.

Même si Louise fut une fois de plus perturbée en réalisant qu'elle lui répondait alors qu'elle ne le faisait jamais dans la vie, elle décida de porter son attention sur le chauffeur.

— Excusez-moi, il y en a encore pour longtemps ?

Elle croisa le regard du conducteur qui semblait lui aussi être blasé par la situation. Mais peut-être était-il blasé d'elle et non pas de l'insolant ? Louise ne le savait pas.

Un Noël Rock'n'roll (Prochainement autoédité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant