3 - Pardon m'dame la névrosée

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Le 24 décembre 2022

Cela faisait dix minutes que le portable de Geoffrey sonnait. Dix minutes qu'à l'autre bout du fil, Jack s'énervait car la plus importante de ses poules aux œufs d'or n'avait pas encore pointé le bout de son nez. Et dix minutes que le concerné préférait tester différents whisky pour voir lequel avait le meilleur goût plutôt que répondre à celui qui n'avait aucun style vestimentaire.

— Mec, ton phone il sonne, l'informa enfin le barman.

Il faut dire que la sonnerie de Geoffrey ne passait pas inaperçue avec toutes ces guitares qui se répondaient.

— Ouais j'sais, lui apprit Geoffrey en haussant les épaules. C'est mon boss mais il me fait chier. C'est un tendu du string, il panique parce que je ne suis pas encore au bar dans lequel mon groupe et moi on joue ce soir. Alors qu'en vrai, ça va, j'ai presque une heure devant moi.

— T'as un groupe ? se ravit le barman.

Geoffrey croyait l'avoir déjà dit, mais visiblement non. A moins que le mec ait l'Alzheimer... Tant pis, il allait se représenter alors.

— Ouais, et on a un concert à 19 heures.

— Tu joues quel style ?

— Du rock, évidemment.

— Cool ! s'exclama le barman, ravit. Parce que j'ai mon cousin qui cherche un groupe justement et...

— Non, j't'arrête tout de suite, le groupe est bouclé. Désolé mec, mais tu comprends, on commence les contrats et tout là, donc ça devient sérieux et j'ai pas le temps de babysitter les petits nouveaux.

Le sourire du barman se fana et même si Geoffrey sentait l'alcool couler dans ses veines et planait légèrement, il fut en état de se rendre compte qu'il était sûrement temps de partir.

— En tout cas, cool le bar ! dit-il en tapant de la main sur le comptoir pour ensuite se soulever de son tabouret.

Il tangua un peu et trouva cela marrant. Jack par contre, n'allait pas rire.

— C'est ça ! aboya le mec en réponse, barre-toi. Petit merdeux de merde.

— Les pléonasmes, c'est moche.

Geoffrey se marra de sa propre remarque tout en quittant les lieux, sous les cris du gérant qui ne trouvait définitivement pas cela drôle.

D'un coup sec, il ouvrit la porte du commerce et il vit une masse rouge s'effondrer au sol. Ah bah voilà le problème avec les portes qui s'ouvraient à l'extérieur... Elles pouvaient faire des victimes.

— Oh putain, merde ! explosa-t-il de rire.

Geoffrey venait de foutre la porte dans la gueule de quelqu'un. Ce n'était que la troisième fois que ça lui arrivait cette année.

— Ça va ? demanda-t-il en se penchant vers la blonde qu'il venait d'accidenter.

Mais qui marchait à côté des portes de commerce ? Qui était assez fou pour faire ça ? Ou bien assez idiot surtout.

— J'tai pas vue, sinon j't'aurais évitée hein.

Soudainement, des yeux couleur noisette le toisèrent. Enfin, ils le toisèrent aussi bien qu'ils purent puisque leur propriétaire était toujours sur le trottoir.

— Aïe aïe, enchaîna Geoffrey dans un tic de jugement, les pulls de Noël, ça se fait plus depuis 90's.

Cette blonde aurait bien été avec son pseudo-manager, songea-t-il. Mais Jack avait dit qu'il avait déjà une femme alors... Même si un petit coup à droite à gauche, de temps en temps, ça pouvait faire du bien. Enfin, ça c'était l'avis de Geoffrey.

— Je ne vous ai pas causé vous ! répondit la petite blonde en se releva avec difficulté.

L'avantage, c'était que désormais Geoffrey avait la preuve qu'elle allait bien, non ? Sinon, elle n'aurait pas été en état de parler ?

— Puis vous vous êtes vu avec vos cheveux de punk et votre blouson de cadavre d'animaux ?

Oh la poisse, songea Geoffrey. Voilà qu'il venait de tomber sur une grand-mère vegan. La totale ! Le regard noir qu'il lui envoya la fit reculer.

— Désolée, s'excusa-t-elle alors en baissant la tête.

Tiens donc ? Alors c'était une de ces névrosées avec un bâton dans le cul qui essayait un jour d'ouvrir sa gueule mais finissait par baiser les pieds pour se faire pardonner ?

Le temps que Geoffrey passa à penser à cela, l'accidentée s'était éloignée et levait la main pour appeler un taxi. Son taxi. Celui que Geoffrey avait contacté pour qu'il l'amène au bar.

— Bonsoir, entendit-il lorsque la jeune femme se pencha vers la vitre du conducteur, je souhaiterais aller au...

— Ah c'est pas trop tôt ! la coupa Geoffrey en se pointant à son tour devant la voiture de taxi. J'ai bien cru que j'allais passer le réveillon sur le trottoir moi.

— C'est le premier qui l'a vu qui l'a ! répondit la blonde en fusillant Geoffrey du regard. Je souhaiterais aller au Lea...

Non mais elle a quel âge ? se demanda Geoffrey, amusé.

— Au Leader's, la coupa-t-il ensuite car après tout, il avait une affaire à gérer. Je suis le mec qui vous a contacté pour le Leader's.

A l'entente du nom de lieu de rendez-vous, l'accidentée regarda Geoffrey.

— Vous aussi vous vous rendez là-bas ? s'étonna-t-elle.

— Ouais, et moi j'ai réservé et payé, alors elle dégage m'dame la névrosée là.

— Névro...

Parce que le rockeur dont le blouson en cuir donnait un air de mauvais garçon détestable s'apprêtait à passer, la blonde prit son courage à deux mains et entreprit de le retenir pour essayer de prendre sa place dans le taxi.

— C'est question de vie ou de mort, vous ne comprenez pas, souffla-t-elle.

Mais que lui arrivait-il ? Elle qui se taisait toujours au boulot et n'avait jamais de réplique sanglante, même quand on l'attaquait... Pourquoi en avait-elle avec ce mec odieux ?

— Il s'agit de la survie de ma vie sociale.

— Ou la la, se moqua le rockeur, alors s'il s'agit de ta vie sociale... Eh bien vas te faire foutre !

La bouche de la blonde s'ouvrit sous la surprise et elle s'apprêtait à répondre lorsque la voix du conducteur se fit entendre :

— Bon, si je comprends bien, vous vous rendez au même endroit, alors vous n'avez qu'à monter tous les deux. Et vite, parce que l'heure tourne et que j'ai d'autres clients après vous.

— Je refuse de voyager avec ça, lança l'accidentée.

Enfin, pour les oreilles de Geoffrey, elle le murmura plutôt.

— Comme tu veux ma vieille, mais moi en tout cas, j'y vais, trancha-t-il en la poussant pour s'infiltrer dans la voiture.

Ce à quoi il ne s'attendait pas, c'était de voir la jeune femme au pull moche rentrer à son tour dans le véhicule.

— Moi je refuse de payer pour la névrosée hein ! informa-t-il le conducteur.

— Pour une ou deux personnes, ça ne change rien, je facture aux kilomètres, répondit le concerné.

Cela mit fin au débat et sans plus attendre, le chauffeur démarra.

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NDA : Et voici le troisième chapitre et surtout, la rencontre.

Alors, qu'en avez-vous pensé ? Cela s'annonce chaotique, n'est-ce pas ? xD

Un Noël Rock'n'roll (Prochainement autoédité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant