CHAPITRE 8

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Fanart par LudoMako

« Tout ce qui est imaginé ne sera jamais perdu. » Clive Barker

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Donna venait de terminer le corps de sa dernière création et entendit aussitôt les applaudissements d'Angie. Celle-ci applaudissait toujours quand Donna terminait de confectionner une nouvelle poupée. Depuis qu'elle s'était mise à en fabriquer pour marcher sur les traces de son père et agrandir son cercle d'amis, elle avait crainte que sa poupée préférée devienne jalouse. Cette dernière n'avait finalement jamais montré le moindre signe d'hostilité envers ses congénères. Au contraire, elle se réjouissait toujours d'avoir un ami de plus, et ne doutait pas un instant de sa position de favorisée. Elle encourageait systématiquement Donna dans ses travaux afin qu'elles aient toutes les deux autant de compagnons de jeu que possible. Au fil du temps, la maison se remplissait.

Enjouée par la mélodie rythmée qui s'échappait de la radio – une musique irlandaise dansante que sa mère écoutait –, Donna examina le nouveau pantin sous tous les angles avec l'air sérieux d'une professionnelle. Plissant les yeux, elle passa en revue chaque détail avec une extrême minutie, désireuse de ne laisser échapper aucune imperfection. Il n'était pas rare qu'une poupée venant d'être sculptée aie besoin de retouches ici et là.

Non, pour une fois, elle était parfaite d'entrée de jeu. Un vrai travail d'artiste qui témoignait des progrès de Donna dans cet artisanat que son père lui avait transmis et qu'elle chérissait. Un artisanat qu'elle avait principalement appris par la pratique, seule, comme le piano, mais sous lequel planait l'ombre de son père. Elle avait passé des heures, petite, à regarder faire Pierrot et à l'assister lors de chacune des étapes. Elle avait même repris son habitude d'accrocher les membres des poupées au plafond de l'atelier et de les laisser pendre au bout de leurs fils pour qu'ils soient à portée de main. Ses premières créations avaient été médiocres, mais elle avait fait preuve d'une remarquable persévérance, travaillant d'arrache-pied en redoutant la déception qu'aurait éprouvé son père si elle n'arrivait pas à être son digne successeur. Cette peur lui avait servi de carburant pour s'atteler corps et âmes à la tâche, empiétant sur ses moments de lecture ou de broderie. La bonne nouvelle, c'était qu'elle était toujours aussi habile de ses mains. Travaillant avec calme et patience, elle avait pu constater une amélioration fulgurante à chaque nouvelle tentative, si bien que ses dernières œuvres égalaient presque celles que faisaient Pierrot. Réjouie de ce constat et de ce que cela impliquait, elle implanta deux petits yeux bleus au pantin qui renvoyaient la chaleureuse lumière du chandelier et, au milieu, la silhouette miniature de sa créatrice. L'enfant voyait ! Il la voyait. Sa mère. Sa nouvelle amie.

Il était fin près pour passer à l'étape maquillage. Donna avait décidé cinq heures plus tôt que ce serait un petit clown, ou plutôt une sorte de Pierrot de la lune. Il aurait le visage tout blanc avec des étoiles noires autour des yeux et aussi du noir sur le bout des lèvres. Peut-être une forme de cœur, peut-être une flèche, elle verrait bien. Elle lui graverait aussi une lune sur chacun de ses pieds, et enfin elle l'habillerait avec les vêtements qu'elle avait passé l'après-midi à confectionner avec la machine à coudre. Pour finir, elle lui trouverait un adorable chapeau pointu, et bien sûr un petit nom. Oui, il serait splendide, parfait.

Animée d'une allégresse d'enfant, Donna chantonna l'air de la musique irlandaise qui se diffusait dans l'atelier. Ce faisant, elle porta le nouveau-né sur sa table de peinture sans cesser de lui sourire. Comme elle était chez elle avec Angie pour toute compagnie, elle ne portait pas son voile, qui ne servait finalement que pour ses transactions avec Joseph. Elle pouvait exposer sa cicatrice à Angie sans crainte, ça ne l'effrayait pas et elle ne se moquait pas d'elle.

LA MARIONNETTISTE - Fan fiction Donna Beneviento - Resident Evil VillageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant