En allant me coucher, je ne pouvais cesser de me tourner et me retourner dans mon lit, les mots écrits finement à la plume par Adariya gravés dans mon esprit. J'étais en colère contre elle. Je ne voulais plus entendre parler d'elle. Pour quelque raison que ce soit.
Le lendemain matin je me suis remise à ma place habituelle, pensant que Mademoiselle changerait spontanément de place. Mais en la voyant se diriger vers le fond de ma rangée, j'ai mis mon sac sur le bureau adjacent au mien et ai posé les pieds sur la chaise à côté de moi.
- C'est déjà pris.
Ai-je dit d'un ton sec et le regard vide.
- Arrête tes âneries Lylith. Je suis assise là depuis des mois.
- Trouves une autre place alors.
Mon ton était sans appel. Elle a soufflé et s'est assise au fond sur le rang du milieu. J'ai repris mes bonnes vieilles habitudes: je terminais mes nuits en classe, j'ai recommencé à ne plus manger et mon assiduité est retombée à zéro.
Au point où Madame Kentalaa m'a attrapée un jour alors que j'allais sortir de classe.
- Mademoiselle Lylith... Vous aviez des supers résultats il y a à peine quelques semaines et là tout redégringole. Vous n'êtes plus du tout investie dans votre travail, vous redormez en classe... Que se passe-t-il ?
- Rien. Tout va bien Madame.
Elle a reniflé un peu et m'a demandé :
- Vous fumez ?
- Qu'est-ce que ça peut vous faire?
- Vous aviez arrêter pourtant. Je vous connais bien Lylith, qu'est-ce qu'il se passe?
Madame Kentalaa était une des rares si ce n'est la seule professeur à se préoccuper de mon cas. Elle était sévère mais elle avait un si grand coeur... Cela faisait deux ans qu'elle se battait avec moi et pour moi afin que je puisse me débrouiller. Alors j'ai fini par tout lui raconter.
- Lylith... Il ne faut pas vous arrêter à une peine de coeur. Mademoiselle Adariya a forcément de bonnes raisons de prendre ses distances avec vous malgré que vous lui plaisiez. Avez-vous pensé à lui demander si elle avait eu des problèmes dans ses précédentes relations? Amicales ou amoureuses? Cela peut expliquer parfois un comportement craintif vis à vis des relations sociales.
- Vous avez raison Madame. Vous voulez venir en fumer une avec moi ?
Elle a esquissé un sourire et m'a suivie dans l'arrière cour du bahut malgré le fait qu'elle sache pertinemment que c'était interdit. Heureusement qu'elle était là. Ce n'était pas seulement une prof de lettres incroyable c'était aussi une deuxième mère pour moi. Je sais que je peux tout lui dire, elle aura toujours la solution pour moi.
J'ai terminé ma clope et l'ai enlacée :
- Merci Madame d'être là pour moi. Merci de croire en moi.
Elle s'est doucement détachée de moi et m'a répondu :
- C'est normal Mademoiselle, allez. Courez la chercher et ayez une vraie discussion. Et arrêtez d'être si rancunière envers les gens! Ils ne sont pas tous comme votre beau-père !
Elle avait bien insisté sur le terme «vrai» et sur ses dernières phrases. Je l'ai saluée de la main et ai parcouru tout le bahut, cherchant Adariya pour lui parler, en vain. Déçue, je suis retournée à mon duplex.
«De toute manière j'allais lui dire quoi? "Heyy salut Ada! Comment ça va? Ouais désolée de t'avoir traitée comme une pestiférée ces dernières semaines, sincèrement. Sinon t'as eu des relations toxiques dans ton passé?"»
Je me suis frappé le front de dépit. Je n'y arriverais jamais.
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Ma vie pour la tienne
RomanceDepuis le décès de maman, je me fiche de tout. Je n'éprouve plus rien. Je bosse le minimum du syndical, je ne prend pas particulièrement soin de moi et je ne vais plus aux groupes de soutien psychologique. Jusqu'à... son arrivée à l'internat.