Chapitre 41 - Squelettes anormaux

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Des murmures choqués et horrifiés où se mêlaient également la stupeur et l'incompréhension traversaient l'assemblée de volontaires qui se massait de l'autre côté de la banderole de police se déroulant au milieu des arbres du bois.
L'inspecteur Aciari avait appelé l'équipe scientifique dès que l'un des bénévoles l'avait prévenue de sa découverte : une main affleurant à la surface de la terre meuble. En attendant son arrivée, il lui avait fallu délimiter le périmètre de sécurité et éloigner les autres volontaires.
Cela faisait un peu plus d'un quart d'heure que ses collègues scientifiques s'affairaient et ils avaient commencé à dégager le haut d'un squelette humain. L'inspecteur Aciari sentait sa gorge se nouer alors que les lumières crues des projecteurs dispersés autour de la tombes éclairaient ces ossements.
Tout le monde songeait à la même chose, la même crainte pesant sur la poitrine de chacun et asséchait la bouche de tous. Après tout, ils étaient venus chercher Richa et il aurait semblé qu'ils l'avaient trouvée.
La culpabilité écrasait l'inspecteur Aciari. Pour une raison ou une autre, elle nourrissait la sensation qui c'était de sa faute mais elle n'était pas la seule à être profondément affectée par cette exhumation et elle l'était certainement moins que d'autres.
Les dents enfoncées dans sa lèvre inférieure, elle se tourna vers le châtaigner sous lequel se tenaient Jonah, Vinciane, Ludovic, Elio et Albane. Le regard de l'inspectrice s'attarda un peu plus longuement sur cette dernière. La jeune fille étant en haut de la liste des suspects dans cette affaire, constater sa réaction devant cette découverte se révélait intéressant.
Les yeux bleu glace d'Albane semblaient luire de larmes à moins que ce ne soit le reflet des puissantes lampes. Ses épaules tremblaient et elle évitait soigneusement tout contact, même de la part de son frère qu'elle repoussait, comme si toucher quelqu'un dans ces circonstances risquait de lui faire prendre conscience de la terrible réalité de la situation.
L'expression légèrement absente, hagarde, elle secouait la tête de gauche à droite à répétition sans cesser de fixer le squelette partiellement mis à jour.
D'après ces observations, il apparaissait plutôt évident qu'elle ignorait totalement qu'un corps avait été enterré ici et elle semblait aussi choquée que tous les autres, le plus affecté étant évidemment Jonah.
L'inspecteur Aciari détourna à nouveau le regard, les dents mordant encore plus profondément sa chair. Elle ne savait que dire ni ne trouvait ses mots. Après tout, quelles paroles restait-il à adresser à un père dont on venait vraisemblablement de déterrer le cadavre de la fille ? Elle devait cependant le faire. Il fallait qu'elle lui adresse au moins un mot.
Un soupir gonfla sa poitrine.
S'accordant encore plusieurs secondes pour réfléchir, elle se reprit en adoptant de nouveau son masque neutre d'enquêtrice détachée et elle ordonna aux membre de l'équipe scientifique de l'avertir si ils relevaient un indice puis elle franchit la banderole qui interdisait à quiconque de s'approcher.
Sans plus manifester d'émotion, elle s'approcha de Jonah, un nœud obstruant sa trachée à tel point qu'il lui devenait difficile de respirer.
Son bouleversement fut visible dans la manière dont elle passa une main dans ses cheveux, dérangeant les mèches de son carré parfaitement coupé, pour ensuite jouer distraitement avec l'une de ses boucles d'oreille alors qu'elle déclarait :

« Pour le moment, on a aucune certitude. Il va falloir faire des analyses et des recherches complémentaires. Vous serez les premiers informés quand on en saura plus mais il faudra attendre les résultats pour ça. Ecoutez, ce n'est plus la peine que vous restiez ici. Ce sera mieux si vous rentrez chez vous.
- Non, je... Commença à s'opposer Jonah.
- Vous n'avez pas compris, Monsieur Todh, je ne veux pas que vous restiez ici. Je veux que vous rentriez chez vous, que vous essayiez de ne pas penser à tout ça et que vous vous reposiez. C'est compris ? (Jonah acquiesça piteusement, plus car il n'avait pas l'énergie de lutter que parce qu'il acceptait). Bien. Et je ne veux pas que vous restiez seul non plus. Vous pouvez rester avec lui ce soir ?
- Bien sûr. On sera là. Assura Ludovic et Vinciane opina également.
- Mademoiselle Liort ? (Albane se réveilla soudainement). Ne restez pas seule non plus.
- Je m'occupe d'elle. La rassura Elio.
- Inspecteur !

Le Souffle de Kaëv'ah - Tome 3 : La Piste du Sang-mêlé [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant