Chapitre 4

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Le lendemain, la matinée était bien avancée quand Ysalia, occupée avec l'intendance des courses à faire, vit Tania passer avec un plateau et se diriger vers le bureau. En la suivant des yeux, elle vit alors Hugo descendre les escaliers, habillé, mais se frottant encore les yeux de sommeil. Il la vit et s'arrêta au bas des marches.

- C'est cela de revenir chez soi, on dort comme un bébé et beaucoup trop longtemps.

Ysalia sourit, elle aussi avait bien dormi.

- J'ai commencé le livre que vous m'avez prêté.

Il lui fit signe de le suivre, tout en répondant.

- Ah, je suis content. Vous plait-il ? Suis-je tombé juste ?

Ils entrèrent dans le bureau où Tania venait de poser le plateau du petit déjeuner. Hugo en voyant la montagne de chose à manger, gémit :

- Bon sang Tania, tu sais qu'à mon âge, on grossit en moins de deux.

Tania rit doucement, puis sortit en disant :

- Comme ça, je suis sûre que vous utiliserez votre salle de sport !

Ysalia s'assit face à Hugo, qui touillait son café.

- Vous désirez partager Ysalia ? Car je ne mangerais jamais tout ça.

Elle secoua doucement la tête.

- J'ai eu la même chose, il y a trois heures de cela vous savez.

Il sourit :

- Sacré Tania, elle ne changera pas.

Il alluma son ordinateur puis la regarda :

- Alors ce livre ?

Elle repensa à cette soirée un peu hors du temps, qu'elle avait vécu la veille au soir.

- Magnifique. Je n'en suis qu'au début, mais je crois que je vais adorer.

Il s'adossa à son grand fauteuil, pensif et la dévisagea.

- Qu'est-ce qu'une jeune femme comme vous, fait dans ma maison pour une place temporaire ?

La question prit Ysalia au dépourvu. Sa mère finalement n'avait a priori pas dit grand-chose et elle en fut soulagée. Que lui dire ? Surtout qu'elle n'avait aucune envie de lui raconter sa vie. Elle reprit timidement :

- J'avais besoin de me ressourcer un peu.

Il eut son demi-sourire en coin et Ysalia se surprit à aimer ça. Il n'insista pas, ce qui lui plut également.

- Bon, visiblement, une femme à mystères, j'aime ça.

Son ordinateur émit alors un bip. Il se pencha dessus et regarda.

- Bien, l'un de mes meilleurs amis vient dans 10 jours. Je vais donc en profiter pour inviter d'autres personnes à diner. Vous vous sentez d'attaque pour tout organiser ? Je voudrais en plus du diner, une chambre pour lui. Je vous dirais pour le nombre exact des autres invités plus tard dans la journée. »

Tout à coup, Ysalia pris conscience du pourquoi de sa présence ici et se sentit coupable d'être si bien avec lui qu'elle en oubliait qu'elle était là pour travailler. Elle se morigéna intérieurement et se concentra, pensant déjà à tout ce qu'il faudrait prévoir.

- Oui, bien sûr, tout sera fait comme il vous convient.

Elle se leva prestement, la tête déjà dans tous les détails et décidée à se reprendre pour ne commettre aucun impair.

Elle sortit et la journée passa à vive allure. Elle n'entraperçut Hugo qu'une ou deux fois et ne monta que tard dans sa chambre, fourbue mais heureuse. Elle allait prendre son livre quand son téléphone sonna à nouveau : Ben. Son cœur se serra mais elle savait qu'il fallait qu'elle décroche.

- Ben ?

- Ysie chérie ? C'est moi.

Sa voix et son surnom. Elle ferma fort les yeux.

- Que veux-tu Ben ?

Elle le sentit hésiter à l'autre bout du fil.

- Je voulais savoir comment cela se passait, si tu allais bien. Je ... Je m'inquiète pour toi.

Elle soupira. Il avait le droit d'être inquiet.

- Ça va, retravailler me fait du bien et c'est une bonne maison. Mais il faut que tu arrêtes de m'appeler Ben. S'il te plait.

Un silence passa.

- Je voudrais qu'on se voit Ysie. Vraiment.

Elle hésita.

- Laisse-moi encore du temps et je te promets qu'on se verra. Je te laisse Ben.

Elle raccrocha doucement et à nouveau tous ses démons remontèrent. Une grosse angoisse lui broya les tripes et elle revit son bébé. Elle sortit sa photo qui lui servait de marque page et la posa contre son cœur, tentant de se calmer. Elle savait déjà que la nuit allait être mouvementée.

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A 4 h du matin, Hugo tourna dans son lit, sentant le sommeil se lever. Il regarda l'heure et soupira quand, soudain, il entendit des cris. Tout en se disant que c'était surement ce qui l'avait réveillé, il se leva précipitamment, enfila une robe de chambre et sortit. Cela venait de l'autre aile et il n'y avait qu'une autre personne là-bas : Ysalia.

Les cris avaient cessé, mais il y alla tout de même et frappa à la porte. Il entendit des gémissements, mais aucune réponse distincte. Il hésita mais se décida quand même à entrer dans la chambre. La fenêtre était ouverte et une légère brise faisait tournoyer les rideaux. Il la vit alors sous les draps, remuant et gémissant : visiblement, elle faisait un cauchemar. Il se sentit un peu gêné, mais il ne voulait pas la laisser dans un demi-sommeil sombre. Il s'approcha doucement et s'assit sur le bord du lit, ne sachant pas trop comment faire. Il posa doucement sa main sur son épaule et chuchota assez fort :

- Ysalia ? Vous m'entendez ? C'est Hugo !

Il la remua doucement et elle ouvrit alors de grands yeux sur lui.

- Hugo ?

A demi endormie, Ysalia ne comprenait pas tout, mais une chose était sûre, sa présence lui faisait du bien. Elle s'assit à moitié, encore un peu perdue.

- J'ai encore fait un cauchemar, j'en suis désolée. Je vous ai réveillé ?

Hugo rit doucement.

- Oui certes, mais peu importe, si vous allez bien, c'est tout ce qui compte.

Il s'assit au bord du lit et la scruta. Il la trouva à ce moment-là, si fragile, les cheveux détachés, encadrant son pâle visage, qu'il redemanda, inquiet.

- Ça va, c'est certain ?

Ysalia se sentait un peu gênée, mais surtout tellement reconnaissante. Elle lui prit la main, la serra et la relâcha, n'ayant pas de mot pour lui exprimer sa gratitude de l'avoir sortie de là. Ce geste toucha Hugo qui resta un peu interdit.

- Oui promis, ça ira maintenant. Merci d'être venu Hugo.

Troublé, il se leva et sortit. La maman d'Ysalia avait évoqué une épreuve terrible, un besoin de ressourcement pour sa fille. Mais il n'en savait pas plus et il s'avoua être intrigué. Cette femme pourrait presque être sa fille, mais elle l'avait interpellé et surtout touché, alors qu'il ne s'y attendait pas. Il retourna à sa chambre, pensif.

Après la pluie, le soleil.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant