Chapitre 13 : Deux nuits distinctes

283 27 46
                                    

Point de vue de Draco



Après cette conversation, je n'ai croisé que de façon brève son regard. Hadès semblait avoir pris au pied de la lettre mes mots, le Manoir était grand et l'espace qui nous était offert lui permettait de me fuir.


Je ne lui en voulais pas, elle ne faisait qu'écouter mes demandes.


Je ne veux pas d'espoir pour nous, je ne veux aucune attente de sa part, je n'ai pas la force de décevoir une autre femme.


Je regrette seulement d'avoir répondu à ses interrogations, parce qu'en le faisant, je nous ai condamnés au silence. Elle a raison lorsqu'elle dit que je suis égoïste, le fait étant que je ne veux pas porter le poids de ses désirs, mais je ne veux pour autant subir son absence. Il n'y avait que la curiosité qui aurait pu la pousser à me parler à nouveau, mais en possession de mes réponses, elle m'avait tout naturellement évité, ne me comblant plus que par son ignorance.


Je me serais satisfait de la voir me supplier pour lui donner la vérité, qu'importe la nature négative qu'aurait eue cette conversation, il aurait s'agit d'un échange, et cela m'aurait suffit. C'est toute la toxicité que nous avons l'un pour l'autre : se satisfaire d'un rien, se satisfaire même souvent du mal, dans le simple but d'un instant passé ensemble.


Je ne veux pas l'avoir, je veux la voir.


L'avoir signifierait répondre à ses exigences, et endosser cette responsabilité terrifie, parce qu'à ce jour, je n'ai jamais vu une femme aimer aussi intensément qu'Hadès. Je n'ai pas su la chérir correctement lorsque nous étions des adolescents, et tragiquement, je ne voyais pas d'issue meilleure en étant adultes.


L'avoir signifierait aussi accepter les démons auxquels elle est confrontée, mais je sais que je ne pourrais plus jamais supporter l'observer se détruire, et surtout pas en étant mienne.


La voir est éphémère, un plaisir coupable sans son lot de conséquences.


Elle a écrit à Blaise à la suite de mes révélations, mais il ne semblait pas lui avoir répondu. Les premiers jours, j'ai remarqué qu'elle s'était rendue plusieurs fois dans la cuisine, en l'attente d'un courrier, mais elle a fini par abandonner.


Il se montrait dur envers elle, moi qui commençais à croire en son rôle de mari idéal. J'éprouvais presque de la peine pour Hadès, elle s'était fait un plaisir de me le décrire comme étant parfait, accentuant ainsi tous les vices que j'avais. Aujourd'hui, je me demandais si elle m'avait menti sur toute la durée de son mariage ou s'il avait réellement changé depuis qu'ils avaient déménagé.


Elle ne l'avait jamais vu à travers mes yeux, mais plus jeune, je trouvais son intérêt pour elle hypocrite. Hadès sonnait comme un défi pour lui. Il jubilait à l'idée de la courtiser alors que je la repoussais. J'avais à ce moment une mission et un mariage sur les épaules, et tout ce que je souhaitais le plus m'étais interdit. Je me souviens qu'elle n'avait pas cédé immédiatement à ses avances, et que cela m'avait davantage fait tomber amoureux. Elle se battait toute seule, pour nous deux, je lui en étais reconnaissante parce que faute de pouvoir le faire, elle, faisait vivre notre relation.

Inlassablement 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant