Chapitre 5

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Chapitre 5 ~ Une cabane dans les bois

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Quelques jours ont passé depuis la nuit des étoiles filantes. Depuis cette nuit-là, Ray semble m'éviter et Maman semble me porter bien plus d'attention qu'avant. Je ne sais pas si je dois me plaindre de ce soudain changement d'attitude de ces deux personnes-là.

Assise au pied d'un arbre, dans les bois qui entourent l'orphelinat de Grace Field, je réfléchis à la situation, profitant du calme qui règne autour de moi. Je ferme les yeux, me demandant où j'en suis dans cette vie, malgré mon jeune âge. A dix ans, je n'ai toujours pas été adoptée, tout comme Ray, Emma et Norman, alors que nous sommes les plus vieux de l'orphelinat. A onze ans, il faudra bien qu'on se fasse adopter, car je n'ai jamais vu d'adolescent à Grace Field, d'aussi loin que je puisse m'en souvenir en tout cas.

— Violet ! T'es où ? J'ai eu une idée géniale !!

Je rouvre les yeux en entendant la voix d'Emma percer le silence tandis qu'une antenne rousse apparait derrière quelques buissons, signalant la présence de la rouquine à quelques mètres de moi. Dans un soupir, je me lève et m'avance vers mon amie, essayant de faire un petit sourire pour éviter qu'elle ne s'inquiète.

— Qu'est-ce qu'il y a, Emma ?

— J'ai eu une idée géniale !!

— J'avais bien entendu la première fois, alors arrêtes de crier.

— Viens !

Elle m'attrape par le bras et m'emmène quelque part dans la forêt, jusqu'à une petite clairière où se tiennent déjà Ray et Norman. Le premier détourne le regard en me voyant tandis que le second me salue gentiment avec un petit sourire. Je souris en retour à Norman et aperçois Ray lancer un regard... assassin ? à son ami qui est son égal en intelligence.

— Alors, c'est quoi cette idée "géniale" ?

Emma reste silencieuse, un sourire amusé aux lèvres, faisant durer le suspense jusqu'à ce que le noiraud lui frappe gentiment la nuque avec son livre. Mon amie rouspète tandis que Ray lui tourne le dos, sans vraiment l'écouter ; la scène nous arrache un rire discret à Norman et moi, vexant légèrement Emma. Elle s'en remet bien vite car elle nous regarde, prête à enfin dévoiler son idée.

— Faisons une cabane dans les bois ! J'ai vu comment faire dans un livre et j'avais envie d'essayer d'en faire une avec vous ! Ray, tu as le bouquin ?

— Bien sûr ! Tu me prends pour qui, andouille ?!

Je les regarde s'engueuler, complices, avec un peu de jalousie qui me serre le cœur. Norman pose une main sur mon épaule et on échange un regard compréhensif. Nous sommes jaloux de la complicité qui existe entre nos deux amis pour qui nous avons des sentiments. Pour Norman, je le savais car il me l'avait dit lors de l'anniversaire d'Emma il y a quelques années ; mais pour moi, je l'ai compris il y a seulement quelques jours et j'ai préféré en parler avec Norman pour ne pas me sentir seule dans cette terrifiante épreuve qu'est l'Amour avec un grand "A". Même si c'est peut-être une simple amourette d'enfant...

En tournant la tête, je croise le regard de mon ténébreux qui semble énervé de voir la main de Norman sur mon épaule. Alors doucement, je me dégage et me diriger vers Emma qui commence à rassembler des branches pour construire la structure de la cabane.

Pendant des heures, on rit elle et moi tandis que Norman part chercher de la corde pour attacher les branches entre elles et que Ray nous guide - parfois en criant - sans être vraiment méchant. Tout ça me parait trop étrange, presque irréel. Mais la cabane prend rapidement forme et me permet de penser à autre chose.

Je pars me cacher sous la structure pour pouvoir guider les autres lorsqu'il y a un petit trou de lumière qu'il faut boucher avec des fougères ou de la mousse. Ray me rejoint dans la cabane et je lui fais un petit sourire qu'il me rend à peine, étant occupé à lire son livre pour vérifier que nous n'avons rien oublié pendant la construction de notre endroit "secret" dans Grace Field.

Lorsqu'on s'aperçoit que le soir est en train de tomber, c'est lorsque Maman vient nous chercher dans notre cabane alors que Norman nous racontait une histoire en caressant les cheveux d'Emma qui avait posé sa tête sur ses genoux.

— Maman ?

— Je viens vous chercher parce qu'il serait temps de rentrer pour le repas du soir. Vous aviez disparu pendant toute la journée.

— On arrive !

Emma se lève la première, vite suivie par Norman, puis moi et enfin Ray. Je laisse mes amis prendre un peu d'avance avec Maman avant de monter au sommet d'un arbre pour observer le coucher de soleil, voulant retarder le moment où mon impression d'être enfermée dans une cage me serrera le cœur à en pleurer, à en crier.

Le vent s'est levé pendant que je grimpais et me fouette le visage une fois que je suis assise sur l'une des plus hautes branches du sapin, me permettant de voir presque jusqu'aux terres encore éclairées par le soleil couchant. J'aperçois la lune qui se lève lentement avant de croiser le soleil qui continue de descendre. L'astre lunaire continue de grimper dans le ciel noir, mais je suis sortie de ma contemplation - ou de ma rêverie ? - par la voix de Ray qui provient du sol.

— Violet ! Viens, Maman va s'inquiéter si on ne rentre pas ! Sérieux, qu'est-ce que tu fous encore ?

Je le regarde simplement pendant quelques secondes avant de me mettre debout en continuant d'observer le ciel qui s'illumine doucement, les étoiles s'allumant une à une pour former les constellations. Une main sur le tronc, je tends mon autre bras vers le ciel, comme pour attraper l'une des étoiles et l'avoir toujours avec moi pour être sûre de pouvoir continuer à rêver.

— Violet ! Allez, descends, tu pourrais tomber avec la force du vent qu'il y a là-haut ! M'oblige pas à monter, sérieux !

Et à la fin, une fleur... || TpnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant