Chapitre 15

224 22 5
                                    

Chapitre 15 ~ Chaque lecteur vit plusieurs vies

______________________________________

- Vi ? Tout va bien ?

Je sursaute en entendant la voix de Ray dans mon dos. Puis je me rends compte qu'il a posé sa main sur mon épaule pour me forcer à me tourner vers lui. Mon noiraud soupire en voyant mes larmes et s'allonge à côté de moi en me serrant contre lui, jouant avec mes cheveux avec sa main libre.

- Qu'est-ce qui s'est passé dans le bureau de Maman ?

- Beaucoup trop de choses pour un cœur d'enfant... murmurai-je.

Un bisou se pose sur mon front puis sur ma joue. Son regard onyx plonge dans le mien, semblant chercher le problème dans mes yeux rougis par les pleurs. Je ferme les yeux et cache mon visage dans son cou.

Lui dire ou me taire ? Quel est le meilleur moyen pour qu'il continue d'aider les autres et de rêver à un monde libre ? Faut-il privilégier un mensonge rassurant ou, au contraire, préférer lui dire l'horrible destin qui m'attend ?

- Violet..., murmure-t-il. Tu peux tout me dire, tu le sais, hein ? Je tiendrai le coup.

- Et si je te dis que, ça, tu ne pourras pas le supporter ? dis-je de manière presque inaudible pour ne pas réveiller nos frères et sœurs.

- Qu'est-ce que tu ne me dis pas ?

Je me redresse en gardant le silence, me contentant d'observer les autres qui dorment paisiblement tandis que Ray serre doucement ma taille pour me dire que je peux lui dire ce que j'ai sur le cœur. Lentement, je sors de mon lit, l'obligeant à me lâcher, et avance vers la fenêtre pour observer le portail à travers les barreaux. Chaque jour qui passe me rapproche un peu plus du jour où je devrai aller là-bas avec Maman pour ma livraison...

- Ray, je...

Vais mourir.

- Tu ? me questionne-t-il doucement en se levant pour me rejoindre.

- Je...

Ne veux pas te perdre.

- Je..., fais-je pour la troisième fois. Je vais être livrée...

Voila, c'est dit.

Ray rit amèrement derrière moi et je me tourne vers lui pour lui faire face. Son regard s'est assombri, ses épaules tremblent, mes mains cherchent les siennes et il ne se dérobe pas. Finalement, il lève la tête pour que nos regards se croisent en retenant ses larmes alors que les miennes coulent à nouveau le long de mes joues.

- Tu le sais depuis quand ?

- Je l'ai compris depuis un moment. Et Maman me l'a confirmé lorsque je t'ai retrouvé dans la bibliothèque pendant que tu déprimais...

- Bordel ! Pourquoi tu nous as rien dit ?!

Je pose une main sur sa bouche pour éviter qu'il ne réveille les autres et l'emmène dans la bibliothèque de Grace Field pour que nous puissions discuter tranquillement. Une fois là-bas, j'enlève ma main de sa bouche et m'adosse contre une étagère tandis qu'il s'assied sur l'une des chaises qui entourent la table.

- Je n'ai rien dit pour éviter que vous ne perdiez espoir ou que vous essayez d'accélérer vos plans à cause de l'urgence que représentait ma livraison. Et puis, je voulais être la seule qui souffrirait jusqu'au moment où l'on devait être séparés...

- T'es quand même sacrément conne...

Je ne dis rien et mon noiraud se lève, sûrement pour quitter la pièce, mais à ma grande surprise, il vient près de moi et me prend dans ses bras en cachant son visage dans mon cou.

- T'es conne, mais je t'aime quand même... avoue-t-il en rougissant légèrement, me faisant rougir aussi.

- Moi aussi, je t'aime, Ray...

Nous restons un moment comme ça, dans les bras de l'autre, pour nous rassurer et nous calmer. Je me retiens de l'embrasser, même de façon fugace, alors que j'en ai terriblement envie. A la place, je me contente de lui faire un bisou sur la joue avant qu'il ne parte prendre quelques livres pour que nous lisons ensemble puisque nous sommes victimes d'une insomnie.

On part s'installer dans la mezzanine car il y a plein de coussins et de couvertures pour que nous nous croyons dans un cocon de douceur. Je serre mon coussin préféré contre moi - un coussin gris perle avec des pompons sur les coins -, faisant sourire Ray qui attrape l'une des couvertures - une bleue et blanche, toute douce - pour nous la mettre sur les épaules afin que nous n'attrapions pas froid.

Je pose ma tête sur le torse de Ray, mon coussin contre moi, et il passe un bras autour de mes épaules avant de prendre le premier livre de la pile qui se trouve être Harry Potter à l'école des sorciers, l'un de mes livres favoris. Un petit sourire étire mes lèvres tandis que mon noiraud me fait un bisou sur le front avant de commencer la lecture.

- Tu savais qu'un lecteur vit plusieurs vies ? l'interromps-je avant qu'il ne lise le premier mot.

- C'est-à-dire ?

- C'est-à-dire que plus tu lis de livres, plus tu vis d'existences différentes. Et tout ça grâce aux auteurs qui ont pris la peine d'écrire l'histoire qu'ils avaient en tête.

- Tu sembles bien comprendre le concept, dit-il en riant doucement.

Je souris et hoche la tête avant de lui murmurer à l'oreille que j'écris un livre que je cache sous mon matelas. Je lui murmure également qu'il aura l'occasion de le lire lorsque je serai partie. Son sourire triste me confirme qu'il le fera.

- Allez, tu peux lire, maintenant..., fais-je dans un murmure.

Ray hoche simplement la tête et commence à lire. Je ferme les yeux et me laisse bercer par sa voix tandis qu'il raconte l'histoire de Harry Potter.

C'est vers le septième chapitre que je commence à m'endormir. Et c'est vers le dixième chapitre que je m'endors de plus en plus. Et vers le douzième chapitre, je me sens sombrer dans les bras de Morphée tandis que Ray repose le livre sur la pile en marquant la page avant de me serrer contre lui et de caresser mes cheveux violets pour que je termine de sombrer dans un profond sommeil.

Un frisson me parcourt le corps lorsqu'il me murmure trois mots, sept lettres et une apostrophe :

- Je t'aime...

Et à la fin, une fleur... || TpnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant