2 - Début de stage et prises de contact

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Je me rappelle mon arrivée chez « New Life » comme si c'était hier. Quelle idée d'aller foutre ce stage au sommet d'une montagne ! J'ai bien dû redemander trois fois mon chemin, avant de trouver la route qui menait à ce vieux mas perdu entre Font-Romeu et Andorre. Du coup, j'y suis arrivé à la nuit tombante, sans même prendre le temps de m'arrêter pour manger un morceau.

À ma descente de voiture, un couple est venu m'accueillir. Malgré le froid, ils étaient tous deux vêtus d'une sorte de toge romaine, une tunique claire attachée à l'épaule par des cordelettes. Ils portaient des espadrilles catalanes, avec de longues ficelles noires lacées sur les mollets. Et ils semblaient très jeunes.

- Patrick Hibanez ? m'a demandé le type, à peine un gamin malgré sa touffe de poils au menton.- Oui...

- Enchanté. Nous sommes Luc et Deborah... On t'attendait un peu plus tôt. Tu t'es perdu en chemin ?

J'ai eu envie de répondre : « Ben non, Ducon. Je suis allé ramasser des cèpes dans la forêt, histoire de flâner un peu avant de m'enterrer dans votre trou à rat ! » mais au lieu de ça, je me suis entendu dire :

- Légèrement. Je n'ai peut-être pas compris toutes les indications de la brochure...

- C'est pas très grave. Par contre j'espère que tu as dîné en route. Ici, le repas se prend en commun, et j'ai bien peur qu'on ait passé l'heure.

Là, j'ai failli m'énerver. Six mille euros et même pas un casse-dalle ? Y avait de l'abus au pays de Mickey !

- En fait non, je n'ai rien pris depuis ce matin, ai-je répondu. Il vous reste peut-être un bout de pâté et une miche ?

En parlant de miches, la poulette qui accompagnait le jeune en avait de sacrément belles. Sous le drap de lit qui lui couvrait le buste, c'était rond et ça semblait plutôt ferme. Les gentilles organisatrices avaient un look sympa dans le coin, c'était déjà ça ! Quant au type, il m'a regardé d'un air surpris, ne sachant pas trop si je me fichais de sa gueule ou pas.

- Deborah va te trouver de quoi faire une petite collation... Mais d'abord, il y a la remise des diplômes du groupe précédent. En tant que nouveau, tu es tenu d'y assister.

J'ai donc suivi le couple dans une cour pavée, où des gens déguisés en chanoines traînaient de-ci de-là. Il leur manquait plus que la tonsure ! Leur truc, ça commençait à ressembler méchamment à une secte... Bon Dieu, mais qu'est-ce que je foutais là ?

Un peu à l'écart, il y avait une petite troupe en civil, cinq hommes et deux femmes. Certains d'entre eux tiraient sur leurs clopes avec nervosité. Tous faisaient la gueule, apparemment aussi désolés que moi d'être là, à se les cailler. Ce devait être les « nouveaux »... Le groupe des « anciens » aurait été ravi de se casser d'ici !

Luc a fait les présentations. Attention, ici, tutoiement obligatoire !

- Alors voici Marianne, Anne-Sophie, Ludovic, Sébastien, Alexandre, Pierre et Christian...

Pour tout le monde, j'étais « Patrick ». Je n'ai pas fait l'effort de retenir les prénoms, sauf pour les filles. Ça viendrait plus tard. Les autres ayant déjà fait plus ou moins connaissance, j'ai tapé l'incruste avec les deux nanas. Physiquement, elles n'étaient pas trop mal.

Notre petit groupe s'est alors avancé à l'intérieur du mas, à la suite de Luc. Nous nous sommes retrouvés dans une grande pièce blanchie à la chaux, avec au plafond des poutres noires de suie. En dehors de deux longues tables et de quelques bancs, la déco était réduite au strict nécessaire. Chez New Life, ils faisaient dans le rustique minimaliste...

D'autres gens sont entrés, détendus et très souriants. Ceux-là même que j'avais vus dans la cour, vêtus de leurs longues toges grises. Les futurs « diplômés », probablement. Diplômés en quoi ? En sex-contrôle ? Recordmen d'abstinence ? On s'est poussés au fond de la salle pour leur faire de la place. Il y a eu des murmures dans notre groupe, des petits rires crispés. On les enviait de repartir vers le monde civilisé, de rejoindre leurs familles. Confusément, on savait tous qu'on allait en chier...

La porte s'est ouverte à nouveau et Gandalf le Blanc est arrivé dans son chiton immaculé (en réalité, un post-soixante-huitard décomplexé répondant au doux nom de Rémy Espérendieu). Il n'avait pas sa grande canne noueuse, mais une barbe presque aussi longue que l'original. Le silence s'est imposé aussitôt.

Mon stage chez New LifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant