18 - Conditionnement à la fidélité

291 6 0
                                    


Évidemment, j'ai dit oui. Pas le choix ! Ils m'ont fait signer un tas de décharges, m'ont confiné en isolement jusqu'à la fin de la cure, à l'écart des autres. Le psy me tournait sans cesse autour, comme une mouche à merde. Bizarrement, depuis qu'on lui avait donné l'autorisation de bidouiller mon cerveau, il était beaucoup plus sympa avec moi. Comme un gosse excité par un nouveau jouet, j'imagine.

On m'a gavé de séquences vidéo sur l'adultère, en me branchant des pinces électriques un peu partout (et pas seulement sur les tétons !). J'ai dû avaler des tonnes de pilules, à en être malade comme un chien. Les derniers jours, l'idée même de me rendre aux séances biquotidiennes de training mental me filait de l'urticaire, des sueurs froides, une tachycardie de chevreuil acculé par une meute de chasseurs.

Le plus spectaculaire, à la fin du traitement, c'était les griffures et les ecchymoses sur tout le corps. Impressionnant mais pas grave du tout. J'ai même fini par m'en réjouir, imaginant que ça pourrait jouer en ma faveur auprès de Nathalie, un élément supplémentaire pour la convaincre de me reprendre. Je m'y voyais déjà : le retour triomphal du mari volage devenu women-proof, définitivement guéri par sa traversée de l'enfer, un périple accompli pour la seule femme qui compte, la sienne !

Je ne serais plus jamais en mesure de la tromper, la simple évocation du mot « infidélité » jouant pour moi le rôle d'un crucifix brandi à la face des lycanthropes. Même les créatures les plus bandantes de l'univers ne parviendraient plus à me faire dévier de ma route (peu importe que ce soit par les vertus d'un conditionnement médical, et non par ma force de caractère). J'essayais de m'en réjouir, me disant que j'avais fait le bon choix. Débarrassés de mes problèmes d'inconstance, nous allions retrouver notre vie de couple, mener enfin à bien notre projet d'enfant...

Lorsque les pinces crocodiles cessaient de grésiller sur ma peau et qu'on me diffusait du bonheur conjugal prêt à consommer, je fermais les yeux pour y substituer mon propre film : Nathalie et moi nous promenant le long de la Garonne, embarquant pour des destinations ensoleillées à mille lieues de nos soucis, faisant l'amour au pied d'un chêne, sur la nappe à carreaux d'un repas champêtre...

Qu'il est bon d'aimer sur ordonnance !

Mon stage chez New LifeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant