Chapitre 10 : Le traitement

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Narrateur : Katsuki

On s'est donc retrouvé à cohabiter dans la même chambre Deku et moi, dans la minuscule aile réservée aux alphas et aux omégas de l'hôpital du centre-ville. On a chacun un lit qu'on peut séparer d'un rideau. Cependant la tringle de ce rideau est affreusement bruyante dès qu'on y touche, et surtout, je ne peux pas voir la télévision quand ce foutu rideau est fermé. Alors avec Deku, on a passé un accord silencieux comme quoi on le garderait ouvert le temps de notre hospitalisation. En même temps, dès l'instant où on a subi le grincement de l'objet du diable pour la première fois, c'est à peine s'il a fallu qu'on se regarde pour décider de ne plus jamais y retoucher. Au moins je peux voir la télé sans problème. Et quand on ne peut même pas poser le pied parterre, la télé c'est tout ce qu'on a pour ne pas mourir d'ennuie.

Normalement, Deku devait être alité aussi sans avoir le droit à aucune sortie du lit pendant une semaine, pour que ses tissus cicatrisent un minimum. Mais il ne respecte pas du tout cette règle. Il est sans arrêt à se lever hasardeusement pour chopper la télécommande à l'autre bout de la pièce qu'il avait lui même posé à l'autre bout de la pièce ; ou pour aller aux toilettes ou encore pour récupérer un t-shirt avec marqué « t-shirt » dessus dans son sac. Je grogne à chaque fois que je le vois poser le pied parterre et il me répond toujours « je reste pas longtemps debout Kacchan, c'est une urgence là » en soufflant. C'est souvent une urgence je trouve. Et pendant toute la première semaine c'est globalement les seuls moments d'interactions qu'on a eu : moi qui grogne et lui qui justifie ses conneries.

Cette atmosphère est horriblement dérangeante et j'ai juste l'impression qu'il me déteste plus que jamais. Je ne me sens pas du tout à l'aise. Ça me rappelle notre adolescence, les périodes qui succédaient nos premières discussions importantes de liés, sur les chaleurs notamment.

Donc pendant ces journées interminables, mon quotidien c'est télé, infirmière, médecin, manger pratiquement à la bequeté, sonde à pipi, spécialiste en tout genre, re-télé, et engueuler Deku quand il se lève. Franchement je ne sais même pas comment il fait pour se lever. Pour avoir été poignardé moi aussi, je sais à quel point ça fait un mal de chien au moindre mouvement. D'après l'infirmière, ce serait parce que son corps résiste mieux à ce genre de douleurs car il est adapté pour supporter un accouchement. La bonne blague. Plus ça va plus c'est Deku qui devient le protecteur fort et moi la victime fragile entre nous deux. Et ça picote pour mon égo.

Ah mais oui c'est vrai : il n'y a plus de « nous deux ». Deku et moi ne sommes plus liés, et c'est ça le plus bizarre dans cette ambiance : apprendre à revivre seul, juste à côté de celui qui a partagé ta vie pendant 14 ans.

Au final, la seule discussion qu'on a eu avec Deku cette semaine c'était pour se mettre d'accord vis-à-vis des visites. J'ai réussi à le convaincre de demander à nos amis de ne pas venir le temps de l'hospitalisation à cause des circonstances bizarres, mais je vais quand même devoir me taper les visites de la famille.

Du coup on a eu très souvent la visite de nos parents, mais ce qui fait bizarre, c'est qu'ils viennent toujours séparément. Inko vient voir son fils sans jamais manquer de discuter avec moi et prendre des nouvelles bien sûr. Mais ce n'est plus belle-maman, comme on avait pris l'habitude d'appeler nos « deuxième parents » avec Deku quand on était gamin. Et c'est encore plus bizarre de voir ma mère venir me voir moi à l'hôpital et à peine s'occuper de Deku alors qu'ils étaient proches quand on vivait encore tous ensemble. Comme quoi, ils ont bien intégré qu'à partir de maintenant, Deku et moi allions faire nos vies séparément... ils l'ont bien mieux intégré que moi en tout cas.

J'ai beau avoir moi-même été le premier à prétendre apprécier cette « libération » de notre ancien lien il y a quelques jours, je ne peux pas m'y résoudre. Alors pourtant que j'étais persuadé de détester cette idée, Deku reste « mon oméga ». Mais voilà, ce n'est pourtant plus le cas...

Liés Sans Le Vouloir (BKDK)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant