Chapitre 7 : Le deuil

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Narrateur : Izuku

Ce n'est que le lendemain dans la soirée que j'apprends ce qui a tué Eijiro, et ça provoque en moi une nouvelle rage et une nouvelle crise de tristesse.

Je vis encore malgré moi. Mon quotidien pendant... je ne sais plus... 3 ou 4 jours, c'est faire les choses sans aucune conviction, sans aucune joie, exploser en pleure où insulter l'injustice de la Terre entière.

Puis un matin je reçois la date et l'heure de l'enterrement d'Eijiro. Les obsèques sont organisées par sa famille avec un courage que je n'aurais jamais. Ma première réaction est encore une fois de m'énerver. Je ne veux pas y aller. Parce que l'enterrement c'est la fin de l'histoire, et que je refuse que ça se termine comme ça.

Mais en entendant un gros bruit j'ai un déclic.

Kacchan s'est encore une fois pris un meuble, surement pour la soixantième fois depuis qu'il a reçu ce coup de file de sa mère qui a assombri sa vie pour toujours. Je le regarde faire. Il continue de marcher sans sourciller, sans boiter, sans montrer aucune douleur, sans lâcher une petite injure au meuble, sans même le regarder une seule fois. Comme s'il n'avait pas remarqué qu'il venait de s'écorcher dans le coin du meuble-télé. Ses jambes sont pourtant couvertes de bleus. Il divague comme un fantôme, sans but, comme si ses yeux n'y voyaient plus rien.

Je me suis tellement concentré sur ma colère et ma tristesse que je n'ai même pas chercher à ressentir les émotions de Kacchan.

Je n'en trouve aucune.

Pour la première fois depuis 14 ans je me retrouve réellement seul. Kacchan a disparu de mon esprit.

Et tout d'un coup une impression me glace le sang.

Kacchan est mort.

.

Eijiro est mort et j'étais tellement en colère que j'ai souhaité mourir à sa place. Kacchan lui n'a pas eu le choix. Il est mort sur le coup. Il a perdu son meilleur ami, son confident, celui qui sait le comprendre, le remettre en question. Celui avec qui il a tout partagé, avec qui il rigole tous les soirs. Devant qui il a déjà pleuré. Le seul devant qui il acceptait d'avoir mal.

Maintenant il ne sait même plus comment avoir mal.

.

Moi j'ai perdu mon ami.

Kacchan a perdu son frère.

.

Comment j'ai pu l'ignorer pendant 4 jours ? Je suis tellement illégitime de lui imposer ma tristesse alors que lui, la tristesse il n'est même plus capable de la ressentir. Je dois l'aider. Je dois m'occuper de lui. Je dois être là pour lui. Je dois le soutenir.

Non en fait je ne lui dois rien.

Mais j'en ai besoin, c'est viscéral.

J'ai besoin de le retrouver.

.

Alors je me reprends en main. Je commence par soigner sa main minutieusement. C'est à peine s'il le remarque. Puis je réponds au téléphone de Kacchan qui sonne en boucle depuis des jours et prend un long congé pour « raison familiale » et « deuil » auprès de son patron. Je m'assure que Kacchan mange ce que je lui prépare et l'emmène dormir dans sa chambre. Je sais pertinemment qu'il ne va surement pas dormir mais au moins il se repose.

Le matin de l'enterrement je viens le voir.

_Bonjour Kacchan... Aujourd'hui c'est... son enterrement. Il faut qu'on y aille. On va lui dire au revoir.

Quelques secondes il arrête de fixer le vide et me regarde. Son expression ne traduit rien. Puis il continue son chemin, errant dans son vide intérieur. Encore. Il m'a entendu cette fois. Mais c'est trop dur encore pour réagir.

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