Tome 3 : LOVE ME

03 - AARON

  Elle est en couple. Quand j'ai vu ce foutu mec aux allures de surfeur l'embrasser sur la joue je me suis senti mourir, littéralement. L'air a quitté mes poumons, mon cerveau a cessé de fonctionner et ce qu'il restait de mon cœur a éclaté. Elle lui a sourit, l'a embrassé en retour. Elle était rayonnante à ses côtés et putain, la partie égoïste qui fait de moi un sacré connard aurait peut-être préféré qu'Alyssa soit heureuse avec moi.

Elle me déteste et cette fois j'ai bien compris que je n'aurais aucune chance de me faire pardonner. C'est trop tard, j'ai trop attendu. La haine dans ses magnifiques yeux bleus m'a fait l'effet de multiples coups de couteau dans le bide dont les plaies ne cicatriseront jamais. Alyssa ne m'aime pas, elle préférerait que je ne sois jamais revenu et m'a clairement fait comprendre qu'il valait mieux que je reparte.

Quand je pensais avoir suffisamment encaissé, il a fallu que Zack vienne exprimer toute la colère qu'il avait à mon encontre. Je ne peux même pas lui en vouloir, je l'aurais haïs s'il était parti du jour au lendemain sans me prévenir comme je l'ai fait. Merde, j'aurais dû le laisser me frapper. Je n'aurais pas dû me défendre et encaisser les coups parce que je ne mérite que ça. Comment ai-je pu croire un seul instant que mon retour serait apprécié ?

Je jette mes dernières affaires dans ma valise et lance un regard dans la pièce vérifiant que je n'oublie rien. Cet appartement pue le renfermé et est rempli de poussière, je ne m'y sens plus chez moi. À vrai dire, je crois bien que je n'ai jamais été aussi perdu, je n'ai aucun « chez moi » désormais. Je me dirige vers la chambre dans laquelle je ne crois pas être allé depuis mon retour juste pour être sûr d'avoir bien récupéré toutes mes affaires. Une vague de nostalgie me prend et je ne peux m'empêcher d'approcher du lit. Si seulement je n'avais pas pris peur après la tentative de suicide de ma mère, si seulement ça ne m'avait pas renvoyé dans la gueule toutes mes erreurs et ma culpabilité...Peut-être que je n'aurais pas fait le choix de quitter Chicago.

Je me laisse tomber sur le matelas en soupirant épuisé par ma seule journée ici. J'ai quitté la fête parce que je m'en voulais d'avoir frappé Zack, j'étais vraiment désolé d'avoir foutu la merde à la réception de ma soeur. J'avais honte d'être ce que je suis et ça me faisait trop mal de me rendre compte que personne ne voulait de moi. Et puis, j'avais la haine bordel. Je suis en colère contre cette emmerdeuse, contre moi-même. Je l'ai laissé partir, je voulais qu'elle m'oublie et soit heureuse auprès d'un autre mais ça fait mal maintenant que c'est en train d'arriver sous mes yeux. Je passe mes bras sous les coussins pour les ramener sous ma tête et ouvre les yeux en sentant quelque chose. Je me redresse et attrape l'objet que je sens sous mes doigts pour le détailler. Je fronce les sourcils parce que l'univers se fout ouvertement de ma gueule. Pourquoi le foutu collier d'Alyssa est dans mon lit ? Elle l'avait autour du cou à la gare, le jour où je suis parti, comment a-t-elle fait pour le perdre ici ? La vue du petit pendentif qui lui allait si bien me donne envie de tout détruire ou de chialer ou peut-être même de faire les deux. Putain, j'ai envie de jeter ce bijou à l'autre bout de la pièce, de le piétiner, j'ai envie de le briser autant qu'elle a brisé mon coeur en se mettant avec Nate. Mais je n'y arrive pas, je reste comme un con à le serrer dans mon poing me noyant dans ma peine.

J'ai bu avant d'aller à la cérémonie de fiançailles parce que je pensais que ça serait plus simple à affronter en étant un peu alcoolisé mais l'alcool me donne juste un profond sentiment de désespoir. Je n'arrive pas à comprendre ce que je ressens, tout ce que je sais c'est que je souffre abominablement et que je donnerai n'importe quoi pour ne plus rien ressentir du tout. Je me laisse retomber sur le dos ramenant ma main qui serre toujours le collier sur mon torse, tout proche de mon cœur. Je ferme les yeux essayant de reprendre sur moi. Seize mois sont passés, seize foutus mois interminables. Je ne peux pas être aussi anéanti après autant de temps, je ne peux pas être aussi faible. Mes amis vont bien, ma sœur est comblée et l'emmerdeuse est heureuse, c'est tout ce qui compte. Je vais simplement repartir et continuer ma vie.