3. Width Of A Circle

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Alors qu'il allait expliquer en détails le rôle du paladin à Steve, Eddie regarda l'horloge au mur.

- Je t'en dirais plus une autre fois Big boy ... dit-il en désignant l'heure d'un signe de tête.

Harrington leva son regard et fronça les sourcils. Il tourna la tête vers l'horloge, puis baissa de nouveau les yeux sur son poignet.

- Merde je vais être en retard ! s'écria-t-il en se levant rapidement. Pourquoi ma montre n'est pas à l'heure ? Tu penses pouvoir être prêt dans vingt minutes, maximum ? demanda-t-il à Eddie. Si on part rapidement, je peux te déposer à l'heure.

- Je vais y aller à pied, pas de panique, comme ça tu ne seras pas trop de retard, avança-t-il.

Steve s'arrêta et se tourna vers lui. Cela faisait peu de temps que le médecin avait annoncé à Eddie que ses blessures internes étaient complètement guéries. Bien que le traumatisme persiste. Il avait néanmoins insisté sur la nécessité de faire attention, de se ménager. Et d'éviter de traîner dans les bois remplie de bandes de chiens enragés. Eddie avait doucement ri. Une excuse bidon et absolument pas métal. Cela semblait avoir fonctionné. Malgré son scepticisme, le médecin n'avait pas posé davantage de questions. La présence de Hopper y était sans aucun doute pour beaucoup.

Mais depuis sa sortie de l'hôpital, la bande s'inquiétait. Ce qui était compréhensible vu l'état dans lequel était restée Max durant un an et demi. Eddie avait réussi à écoper une peine hospitalière moins lourde. Il avait obtenu de pouvoir fuir cet endroit au bout de quelques mois. Bien qu'il y retournât pour voir Maxine chaque semaine. Néanmoins, depuis sa sortie, les membres de la bande le surveillaient à tour de rôle. Comme si ses blessures pouvaient se rouvrir. Même lorsque le médecin avait annoncé que tout était bon. Comme s'il pouvait s'effondrer à tout instant. Ç'en était étouffant. Harrington était sans doute le plus inquiet constamment. Il le couvait sans cesse.

- Tu plaisantes ?

- La boutique n'est pas loin.

- Je t'emmène, décréta Steve d'un ton sans appel. Sois prêt dans vingt minutes.

Il arborait son air de mère poule. Dans ces moments-là, il valait mieux ne pas le contredire. Eddie abdiqua.

- Oui Maman Steve, le taquina-t-il en lui donnant un léger coup d'épaule.

Harrington leva les yeux au ciel. Il débarrassa le petit déjeuner tandis qu'Eddie montait pour se préparer. Lui aussi risquait d'être en retard. Mais le vieux disquaire lui en tiendrait certainement moins rigueur que Robin. Il enfila un jean et son t-shirt Megadeth et se dirigea vers la salle de bain, son peigne et sa brosse en main. Il ouvrit la porte à la volée et manqua de percuter Harrington qui était juste derrière. Il sursauta et recula rapidement. Eddie ne put s'empêcher de remarquer qu'il ne portait qu'un caleçon.

- Si ton but était de me faire faire une crise cardiaque Munson, t'étais pas loin.

- Oh Harrington, qui pourrait vouloir priver cette Terre de ce si joli minois, minauda-t-il.

Son ami ne répondit pas et se contenta d'enfiler son pantalon en secouant la tête, amusé.

- Ça te dérange si je me coiffe ici ? demanda Eddie.

Steve lui fit signe d'approcher et se décala, lui laissant la place à gauche, devant le miroir. Eddie posa son peigne et entreprit d'ordonner autant qu'il pouvait ses boucles. Les cheveux frisés étaient une plaie. Il se souvenait vaguement – Wayne le lui avait sûrement raconté - que son père lui rasait le crâne. Sa mère, qui s'occupait de lui de manière aléatoire, ne les lui avait pas coupés une année entière. « Les cheveux longs, c'est pour les gonzesses et les tarlouzes » avait-il annoncé avant de s'emparer de sa tondeuse.

Eddie était content que son paternel ait disparu de la circulation à sa sortie de prison. En voyant sa touffe de cheveux, il l'aurait sans doute scalpé aujourd'hui. Quoique ses boucles brunes seraient sans doute le cadet de ses soucis s'il était de retour. Il jeta un coup d'œil à Harrington qui appliquait avec précision sa laque, sculptant sa coiffure. Avec son père, vu l'importance qu'il accordait à sa chevelure, Steve aurait sans doute fini chauve. Eddie pouffa à cette idée

- Qu'est-ce qui te fait rire ? demanda son ami.

Eddie finit de se coiffer et se tourna vers Harrington. Il ne put s'empêcher d'apprécier ce qu'il voyait. Il était vraiment beau. Les épaules nues de Steve étaient parsemées de grains de beauté. Il avait envie de les relier entre eux pour en faire des constellations. Il avait envie d'embrasser sa nuque. Ses yeux descendirent le long de son torse, vers ses fesses. Il se rendit compte qu'Harrington l'observait dans le miroir en attendant une réponse. Il était pris la main dans le sac. Eddie se redressa et enfila ses bagues en souriant.

- Toi.

- Moi ? Pourquoi ? ricana-t-il.

- Tu as oublié des mèches.

Harrington scruta ses cheveux avec attention dans le miroir. Il repassa son peigne encore une fois, concentré.

- Où ça ? J'ai pourtant fait comme d'habitude.

- Attend, sourit Eddie.

Il se rapprocha lentement, un sourire charmeur aux lèvres. Lorsqu'il ne fut qu'à quelques centimètres de lui, il s'arrêta et l'observa. Harrington s'était figé. Ses grands yeux bruns le fixaient. Il posa ses mains sur les épaules de Steve pour l'inviter à se tourner face à lui. Il obtempéra sans dire un mot. Eddie savoura la sensation de ses doigts sur sa peau nue. Elle était juste comme il l'imaginait. Douce. Elle dégageait une odeur de gel douche, de laque et de parfum. Il avait envie d'y apposer ses lèvres. Il ne parvenait pas à décrocher son regard de celui de Steve. Il avait envie de l'embrasser. De caresser l'entièreté de sa peau blanche constellée de grains de beauté.

Une main d'Eddie quitta son épaule et saisit une mèche imaginaire qu'il ramena dans sa coiffure savamment travaillée, derrière son oreille. Il voulait saisir chaque prétexte pour le toucher, juste encore un peu. Ses doigts glissèrent le long de sa jugulaire et suivirent la ligne de son cou jusqu'à sa clavicule. Il avait envie de le mordre, de l'embrasser, de le goûter.

- Munson ? souffla Harrington.

Son nom le fit brusquement revenir sur terre. Il était dans la salle de bain, avec Steve, dans une position bien trop intime pour de simples amis. Il cligna des yeux et constata que son ami attendait toujours.

- Ma coiffure ?

Eddie déglutit. Il était bien trop proche. Et bien trop sérieux. Recomposant son masque habituel, il fit mine d'inspecter sa chevelure en se penchant de tous les côtés. Il fronça les sourcils.

- Juste ici, il y a des mèches mal coiffées.

- Où ? demanda son ami sans le quitter des yeux.

- Ici.

Eddie plongea ses mains dans les cheveux laqués et les ébouriffa. Harrington cria et se mit à pester. Sans attendre son reste, il partit en courant dans la maison en riant.

- Munson, je vais te tuer ! hurla Steve depuis la salle de bain.

Cette fois c'était définitif. Ils allaient bel et bien être en retard.



***

Width Of A Circle - David Bowie

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