22. Starman

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Eddie se sentait flotter, l'esprit embrumé. Ce qu'il avait ingurgité au long de la soirée faisait enfin effet. Probablement la conséquence de son addiction. C'était là le cercle vicieux de la dépendance. Plus il consommait, plus il s'habituait, et il glissait dangereusement vers l'extrême, aspiré par la spirale infernale de l'accoutumance.

Il s'était laissé rattraper l'ambiance euphorique de ses anciens camarades. Ou plutôt il s'y était plongé pour éviter de trop penser. La musique lui vrillait les tympans. Il ne savait plus vraiment depuis combien de temps il était ici. Il déglutit difficilement, la gorge sèche. Il devait boire quelque chose de frais. D'un pas instable, il se dirigea vers la cuisine. Eddie prit le premier gobelet qui était à sa portée et le plongea dans le punch. Il grimaça. Il remplit son verre au robinet et bu une rasade d'eau pour effacer le goût sirupeux et sucré.

Il avait chaud. Bon sang, il mourrait de chaud. Il releva ses cheveux en un chignon négligé. Eddie s'appuya un instant contre le mur. La pièce bougeait trop vite. Non. C'était sans doute lui. Malgré ses efforts pour l'ignorer, ses pensées le ramenaient inlassablement au regard blessé d'Harrington. Il chassa d'une main les quelques mèches rebelles qui tombaient sur son front, puis ferma les yeux.

Il pesta intérieurement. Il avait déjà été amoureux. Il avait déjà été rejeté. Cette fois-ci n'était pas si différente des autres. Il n'avait qu'à flirter avec un mec, une fille, peu importe, tirer un coup, fumer un joint, oublier sa peine. On prend les mêmes, et on recommence. Alors pourquoi n'arrivait-il pas à sortir Steve Harrington de son esprit ?

Son cerveau bouillonnait. Eddie n'arrivait plus à réfléchir correctement. La chaleur et la foule l'étouffaient. Les lumières trop vives, la musique trop forte, le bruit trop intense. Tout tournait. Tout était « trop ». Il se dirigea vers la sortie. Il voulait rentrer à la maison.

Eddie s'arrêta. « Rentrer à la maison ». Chez Harrington.

- Merde, geint-il.

Il passa une main sur ses yeux. Il ne pouvait décemment pas rentrer après ce qu'il s'était passé. Il pouvait aussi aller s'étaler n'importe où dans la maison de Mike, comme bon nombre de fêtards qui resteraient pour la nuit, trop saouls pour rentrer.

Il sortait fumer une cigarette quand une main agrippa son épaule et le força à se tourner. Eddie se laissa mollement faire, trop stone pour réagir à une potentielle menace. Il baissa les yeux sur une Robin furibonde.

- Steve est un abruti.

- A qui le dis-tu, Buckley.

Il coinça la cigarette entre ses lèvres et attrapa un briquet qui trainait sur le bord d'un guéridon. Il le remettrait en place plus tard. S'il y pensait. Sans se soucier du fait qu'elle le suive ou non – il savait qu'elle ne lâcherait rien -, il ouvrit la porte et s'installa dans la pelouse, loin des autres. Elle s'installa face à lui et le fixa, attendant visiblement le feu vert pour parler.

Il alluma sa cigarette et inspira plusieurs bouffées en fermant les yeux. L'air frais lui faisait du bien.

- Qu'est-ce que tu veux, Buckley ?

Son ton était dénué d'hostilité. Il était simplement fatigué de cette situation.

- Steve est un crétin.

- Tu l'as déjà dit.

Sa tête bascula vers le ciel et il expira sa fumée dans un soupir de soulagement. De l'air frais, enfin. La pression redescendait.

- Eddie.

Il baissa les yeux vers son amie. Elle n'utilisait que rarement son prénom, il s'agissait donc d'un sujet sérieux.

Nothing Else MatterOù les histoires vivent. Découvrez maintenant