Eddie poussa rageusement la porte. L'air froid le percuta brutalement. Mais ses pensées étaient trop confuses pour s'en soucier.
Merde. Qu'est-ce qu'il espérait ? Que Steve Harrington, qui enchaînait les filles au lycée – avant Nancy –, allait devenir grâce à lui un bébé gay extraverti? Eddie se sentait stupide. Il ne serait jamais une fille. Il ne serait jamais assez bien. Et Harrington ne se sentirait jamais assez à l'aise avec une potentielle bisexualité. Le regard des autres compterait toujours bien plus à ses yeux. Il connaissait la chanson. Eddie conviendrait, à la rigueur, pour une baise d'hétéro-curieux, qui finirait sur un « on s'est bien éclatés, je voulais juste tenter ». Ou même un plan cul occasionnel, à condition de le garder secret. C'était ce à quoi les conquêtes d'Eddie l'avaient habitué jusqu'ici. Et cela lui convenait. Pourquoi cela changerait-il ? Parce qu'il avait plus qu'un béguin, cette fois-ci ? Quelle blague.
Il coinça une cigarette entre ses dents et se vengea sur son briquet qui refusait de fonctionner. Après quelques instants, la pierre produisit une petite étincelle et il parvint à faire une flamme suffisante. Il inspira longuement, avant de rejeter la fumée. Il en voulait à la Terre entière. A ses conquêtes de le traiter de cette manière. A Harrington de lui envoyer des signaux avant de faire marche arrière. Mais surtout, il se détestait. Il se détestait de se laisser utiliser, de se laisser tomber amoureux en sachant qu'une vraie réciprocité ne pourrait jamais exister.
Il continua sa flagellation mentale en s'appuyant contre le mur. Il allait sûrement chopper la crève.
- Faudrait que t'en achètes un autre.
Il repoussa ses cheveux pour regarder l'objet de ses pensées. Les mains dans les poches, une veste sous le bras, il trépignait. Quand Steve Harrington trépignait, c'était que quelque chose le gênait. Il avait un air penaud. Eddie se contenta de le fixer. Son malaise palpable sembla s'amplifier lorsqu'il n'obtint pas de réponse.
- Le briquet je veux dire. T'en n'as pas souvent un qui marche, j'ai l'impression, crut-il bon d'ajouter.
Eddie reporta son attention sur sa cigarette. Il était trop en colère – ou dépité – pour lui parler. Il ne voulait pas ruiner leur amitié en lui reprochant des choses dont il était l'unique responsable, comme ses espoirs inutiles. Harrington soupira et vint s'adosser au mur, à côté de lui. Après quelques instants, il lui tendit la veste qu'il avait sous le bras. Eddie l'observa sans bouger.
- J'ai pensé que ... Enfin, il fait froid et ...
L'hésitation dans sa voix lui faisait presque de la peine. Il accepta l'offre et l'enfila. Elle sentait Steve. Il s'autorisa à respirer discrètement le parfum qui s'en dégageait. Ce garçon le torturait.
- Et toi ?
Son ami haussa les épaules.
- J'ai l'habitude de courir quand il fait froid.
Le silence se réinstalla. Eddie se maudit intérieurement. Si Harrington faisait un pas vers lui, il pouvait au moins réagir autrement que comme un crétin. Il lui tendit une cigarette et son briquet. Steve persévéra quand le briquet fit des siennes. Après avoir réussi à l'allumer, il rendit lui rendit son zippo.
Ils fumèrent côte à côte, dans la nuit. Le projecteur extérieur du bar projetait à peine assez de lumière pour leur permettre de distinguer ce qui se trouvait devant eux. Suffisante pour esquisser le contour du corps de Steve. Assez pour qu'Eddie puisse détailler ses bras puissants. Le t-shirt qu'il lui avait emprunté était légèrement petit pour lui – c'était l'un des plus larges d'Eddie. Il ne s'en plaignait pas. Le tissu dessinait sa musculature et laissait la possibilité d'admirer ses biceps saillants.
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Nothing Else Matter
FanfictionHawkins, 1987. La bande profite de la tranquillité pour se reposer et surmonter ses traumatismes. Juste vivre calmement. Sauf Steve, dont l'esprit s'emballe à cause d'Eddie Munson. Evidemment : Spoils de TOUTES les saisons L'univers appartient aux f...