Son regard m'entaille le cœur. Elle renifle sa peine mais ses larmes débordent déjà de ses yeux, finissant par glisser sur ses joues creuses.Les événements s'enchaînent trop rapidement pour elle. Ma mère a beau être une vraie guerrière, elle a en elle un cœur très sensible. Elle tente de le cacher du mieux qu'elle peut, mais parfois la souffrance est trop grande qu'il est impossible de la dissimuler.
Puisque tôt ou tard, elle finira toujours par exploser.
Ma mâchoire est encore déposée sur ses doigts qui tremblent et finissent par partir sur son visage meurtri. Cette fois, j'ai l'impression qu'elle a davantage besoin de réconfort. Alors je quitte ses mains et la prend contre moi, dans une étreinte affectueuse. Ses bras s'enroulent et tombent derrière ma nuque, pendant que je caresse doucement son dos.
La guerre, le départ puis le retour à la forêt, mon coma, et en plus de ça, Lo'ak qui s'en va.
- Je suis désolé mon enfant... elle échappe, entre deux sanglots.
Je sais qu'elle n'aime pas se montrer si vulnérable et si anéantie devant son fils. Cependant, j'aimerais tant lui dire que ce n'est pas grave, qu'elle a le droit et que ça ne fait pas d'elle quelqu'un de fragile. Mais je comprend sa honte, parce que ça a toujours été comme ça : on ne montre pas ses failles et on s'accroche malgré tout. Pourtant, pleurer ne veut pas dire être faible, cela veut seulement dire que l'on a été fort un peu trop longtemps.
Ma mère est courageuse, alors elle a le droit.
À la regarder, j'ai bizarrement l'impression qu'elle ne m'a pas dit quelque chose. Qu'est-ce qui m'échappe ?Ses pleurs s'abandonnent le long de mon dos, et elle prend finalement la parole, néanmoins avec difficulté :
- Spider... il... il-, balbutie t-elle, sans jamais finir sa phrase.
Il ne m'en faut pas plus pour deviner de quoi il s'agit. Malheureusement, je me tétanise avec l'angoisse de rechuter dans un malaise profond après cette nouvelle. La culpabilité me noie soudainement et j'époumone de l'intérieur, les souvenirs me heurtant l'abdomen.
Spider est mort,
Mais il n'est pas seulement décédé.
Il est parti par ma faute,
Je l'ai tué.En plus de tout les événements, ma mère a dû éponger la souffrance qu'a laissé le départ du bonhomme. Kiri et Lo'ak ont dû être tellement dévasté que je n'arrive pas à imaginer leur douleur.
Et tout ça, à cause de moi.
Parce que je n'ai pas arrêté cette flèche qui venait dans sa direction.
Parce que j'avais peur,
Peur de la perdre,
Peur de ne pas être à la hauteur,
Peur de les décevoir si je n'y arrivais pas.Les paroles de Lo'ak ressurgissent dans mon crâne, affichant sur mon front l'étiquette du : « parfait petit soldat ». J'ai peut-être du mal à le comprendre, lui et sa solitude, le fait d'être incompris et d'être mis de côté. Il souffre, mais moi aussi. Et tout ça à cause de mon statut, car l'ainé « doit montrer l'exemple, et il doit agir en tant que tel ». Sauf que quelqu'un est mort par ma faute, en raison de cette foutue pression sur mon dos qui m'enfonce continuellement.
La pression d'être parfait,
Car aux yeux des autres,
J'ai l'impression d'être parfait.——
Ce matin des patrouilles ont été envoyé dans toute la forêt, ils sont revenus cette après-midi, mais rien. Lo'ak et Meliana sont introuvables, ce qui a le don de mettre mes parents dans un état second.
J'aurais voulu les aider dans leurs recherches, mais je suis coincé au laboratoire jusqu'à une durée indéterminée. C'est une torture de ne rien savoir, de n'être au courant de rien. Moi qui accompagne toujours père dans ses escapades, me voilà cloîtré ici, sans savoir ce qu'il se passe à l'extérieur.
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Je te vois.
Fanfiction! EN PAUSE ! Explications dans les derniers chapitres. Alors que Meliana, une jeune scientifique humaine démunie n'a plus que quelques jours devant elle, la famille Sully débarque au clan Metkayina. Neteyam, le fils aîné qui essaye tant bien que m...