L'âme d'un dragon

Chapitre 15

PDV Silver :

Nous nous étions installés sur un banc en attendant les autres. Alissandra s'était plongée dans la lecture d'un de ses livres. Elle leva brusquement la tête et regarda le ciel. Je levai à mon tour le regard sur les nuages.

-Qu'est-ce qu'il y a ?

Elle regarda Lysandre qui était plongé dans son nouveau carnet et écrivait avec frénésie.

-C'est la pleine lune ce soir ? Murmura-t-elle.

-Oui. Pourquoi ?

Elle sembla pensive. Et ajouta :

-Il ne faut pas rentrer tard.

Je songeai qu'elle s'inquiétait à cause de l'effet assez étrange que la pleine lune avait sur les dragons. Je me souvenais encore de la première pleine lune que j'avais passée avec Yuki. Il n'était qu'un dragonnet quand c'était arrivé. Ses yeux s'étaient mis à luire étrangement, ils étaient presque fluorescents, son corps était parcouru de frissons et de spasmes. En grandissant j'avais compris que c'était la lune qui provoquait cela. En arrivant au Gouvernement j'avais appris une seule grande règle. Ne jamais entrer dans la dragonnerie un soir de pleine lune. Mais je savais aussi qu'Alissandra avait passé chaque pleine lune dans la dragonnerie. Son lien avec les dragons était puissant, elle savait tout sur eux. Parfois je me demandai même si ce n'était pas une dragonne enfermée dans un corps humain.

J'allais lui demander quelque chose quand j'aperçus Ignis, Castiel et Armin. Les deux premiers bavardaient tranquillement tandis qu'Armin semblait déprimé. Je me demandai pourquoi. Il s'assit à côté de moi et je ne pus m'empêcher de l'observer. Une mèche brune lui tombait élégamment sur le front, cachant un de ses magnifiques yeux bleus.

-Tout va bien Armin ? Lui demandai-je doucement.

-Ils sont méchants. Ils n'ont pas voulu me laisser dans mon magasin préféré.

Je rigolai doucement. Il ressemblait un peu à un enfant avec sa mine boudeuse. En l'observant un peu plus je lui trouvais une certaine ressemblance avec un garçon que j'avais connu quand j'étais encore une petite fille, avant que mon village ne soit détruit. Mais l'enfant de mes souvenirs lui n'avait pas de frère, encore moins jumeau et surtout il était mort.

Flash-back :

La cérémonie des orphelins avait eu lieu. Tous les œufs de dragons dont les parents étaient morts ou les avaient abandonnés à la merci des pilleurs de nids et autres charognards étaient désormais à l'abri dans les différentes familles du village. Ma famille avait été choisie pour la garde d'un œuf blanc comme la neige. Mes parents m'avait laissé le choix du nom et petite comme je l'étais j'avais opté pour Yuki, nom qui conviendrait pour un mâle comme pour une femelle. Mathéo était venu pour le voir, lui il avait eu l'année précédente un œuf  bleu clair incrusté de rubis. Son dragon avait éclot il y a peu et je venais jouer avec lui et le bébé souvent. Ce jour-là il m'expliqua comment s'en occuper. Il détonait dans le paysage blanc de la région, en dehors de lui, il n'y avait personne dans notre village qui ait des cheveux noirs et même ses parents voyaient cela d'un mauvais œil. Moi j'en m'en fichais, c'était mon meilleur ami. Nous avions le même âge et j'étais amoureuse de lui, ses yeux  bleu nuit m'hypnotisaient. Ses cheveux d'ébène flottaient librement dans le vent qui balayait en permanence Frost Mountain. Sa voix vibrait de passion quand il me parlait des dragons, cette passion me transperçait toujours autant, personne n'était autant passionné que lui. J'étais très timide mais avec lui je me sentais si bien que nos discussions duraient très longtemps. Il resta avec moi jusqu'au coucher du jour, des étoiles commencèrent à apparaître, mes parents nous apportèrent des vestes bien chaudes. Je veillais à ce que la température de Yuki ne baisse pas et j'observais le firmament. Soudain Rock, le dragonnet de Mathéo se redressa, fixant l'horizon, Mathéo se releva brusquement. Je fis de même serrant Yuki contre moi. Ma peau frissonna et il me sembla que mon œuf aussi. Rock se mit à émettre un son se rapprochant d'un feulement de félin. Le silence était tombé sur le village, il n'y avait plus de vent. L'atmosphère se chargeait d'une sourde inquiétude, quelque chose approchait. Soudain une violente explosion détruisit la mairie où avait eu lieu il y avait encore quelques heures tout le village de rassemblé. Les habitants sortirent de leurs maisons, affolés pour tenter de vaincre l'incendie. Mon père partit aider les autres tandis que ma mère resta avec nous. Rock tourna la tête vers l'ouest et feula de nouveau. Une nouvelle explosion balaya la zone de l'hôpital et de l'école. La panique montait de secondes en secondes. Soudain Rock poussa un cri de peur et se fut mon quartier qui fut la cible du terroriste invisible. Mathéo m'avait poussé juste avant que le souffle brûlant de l'explosion ne me blesse ou pire. Nous nous relevâmes difficilement au milieu des décombres, je cherchai ma mère des yeux et ce que je vis me glaça le sang plus sûrement que le vent qui s'était levé à nouveau. Ma mère, ou ce qui en restait, était allongée sur le sol, des morceaux de verre plantés un peu partout dans sa peau. Une des barres de fer de la fenêtre entraîné par le souffle de l'explosion  avait broyé sa tête qui sous le choc s'était séparé du reste de son corps. Je m'écroulais au sol. Mathéo me parlait, me secouait mais je n'entendais rien, la tête vide, fixant le corps de ma mère. Mathéo me gifla violemment et je repris mes esprits, des larmes dévalaient mon visage ravagé par la peur et l'horreur.