Dernière chance

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Présence d'esprit qui sauve des vies comme elle en détruit.

La trêve avait officiellement sonné, les combats cessaient enfin. La plupart des guerriers rentrèrent chez eux pour pouvoir conseiller à leurs proches de partir. Certains se laissèrent convaincre de quitter le champ de bataille avec eux pour être sûr qu'ils ne seraient pas tués quand le conflit reprendrait de plus belle. Partout dans le pays, la paix régnait en maîtresse et la vie reprenait peu à peu son cours. Quelques commerces rouvrirent pour permettre aux citoyens de s'approvisionner pour ce long voyage qui les attendait. On autorisa aussi les avions à repartir d'un endroit à l'autre sans craindre de se faire abattre en plein ciel tout comme les trains furent de nouveau opérationnels. Pendant ces sept jours, toutes les voies de communication et tous les véhicules étaient disponibles pour tout le monde, et ce, sans distinction de race. Tous logés à la même enseigne, tous avaient le droit de fuir pour protéger leur vie ou celle de leurs proches. Parmi ce tumulte foisonnant de voyageurs, une sorte de joie semblait résonner dans l'atmosphère.

Personne n'oubliait que cela serait éphémère, mais ils préféraient profiter de ce petit moment d'apaisement plutôt de que se plaindre de ce qui adviendrait. Face à la violence dont ils avaient été témoins, tous préféraient se concentrer sur leur présent et sur leur chance de pouvoir échapper à cette guerre insensée. Hélas, certains étaient résolus à demeurer sur cette terre sanguinaire. Cela provoqua des adieux déchirants, des disputes et des incompréhensions. Nul ne comprenait ces hommes et ces femmes dans la fleur de l'âge qui restaient pour défendre leurs semblables. Alors que si tous fuyaient, il n'y aurait plus personne à tuer, plus rien à conquérir. Ce déchirement d'espèces ne résidait que dans les esprits et les cœurs de quelques-uns, la majorité souhaitait seulement recouvrer son quotidien et l'espoir de voir de jours meilleurs. La plupart d'entre eux désiraient simplement reprendre leur routine et ne pas être inquiétés au moindre mouvement parce qu'ils étaient du mauvais camp. Tout ce qu'ils voulaient, c'était retrouver la quiétude d'un train de vie calme et banal. Pourtant, les plus jeunes et les plus téméraires décidèrent de participer à cette folie meurtrière. De s'engager pour s'assurer que leur camp gagnerait et que leur sacrifice fut utile à leur cause.

Ces gens n'étaient pas rares que ce furent de nouveaux militaires ou de simples civils, ils étaient persuadés qu'ils devaient mener ce combat pour le bien de leur communauté. Pour garantir qu'à l'avenir, plus personne n'aurait à prendre la décision entre fuir ou risquer sa vie. Ils demeuraient pour s'assurer que l'issue leur fut favorable. Seuls les idéaux défiaient leur instinct de survie et les recommandations de leurs aînés. Malgré tous les discours raisonnables qu'ils entendaient, aucun d'eux ne put se résoudre à partir et laisser d'autres mourir. Pour eux, ce serait une pure lâcheté que de s'enfuir au lieu de rester. Ce ne serait pas uniquement abandonner son pays, ce serait aussi exposer les siens au danger sans avoir réagi. Et pour certains, cela était impensable.

Derek Butler faisait partie de ces gens-là. Il avait fait en sorte de fuir sa famille pour ne pas avoir à leur rendre de comptes. Le rouquin ne voulait pas avoir à leur expliquer ce qui coulait de source, il ne pouvait pas encore mettre de mots sur cette douleur qui le rendait vide et qui semblait l'engloutir davantage chaque jour. Derek avait peine à y croire, cela ressemblait à un cauchemar duquel il était prisonnier, mais il avait dû se rendre compte de la dure réalité. Désormais, il était seul au monde, isolé dans ce monde froid, n'ayant plus personne à qui se confier. L'unique personne qui lui importait avait disparu, c'était comme si elle était morte et il dépérissait avec elle. La folie le gagnait peut-être, mais il ne pouvait se résoudre à fuir et à endurer davantage cette horrible plaie qui saignait son myocarde sans pour autant l'achever. Jamais le jeune homme n'aurait pu croire qu'une telle douleur fut possible. Pour lui, ce n'était que pures fadaises ces peines qui atteignaient tant le cœur que l'esprit, il ne pensait pas cela possible. Hélas, il goûtait à cet amer désarroi et cela le menait à des actes désespérés.

Les enfants de Samhainn : L'éveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant