1 - WELCOME IN THE EVIL

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En ce mois d'octobre, l'air se refroidissait petit à petit laissant place à la saison automnale. Le trottoir me paraissait encore plus froid que d'habitude, l'été commençait déjà à me manquer. Mon rituel matinale se constituait d'une longue promenade dans les rues encore ensoleillées de Manhattan, puis de me poser dans Morningside Park. Je passais le plus clair de mon temps là-bas, et les gens me dévisageaient toujours autant. C'est dégueulasse de faire ça, surtout quand on sait que ça peut arriver à n'importe qui.

Je ne répondais jamais aux provocations des gosses qui me lançaient des pierres et qui m'insultaient en passant à côté de moi, ou ces femmes qui me méprisaient et qui avaient peur que je kidnappe leurs enfants. Non mais la blague.

Personne ne se soucie des autres, tout le monde s'en fout. Tu peux être en train de mourir sur un trottoir, aucune aide ne te sera accordée, quand tu vis dans la rue c'est soit-disant "de ton propre gré" comme ils aiment le dire. Chacun vit pour sa gueule, ça marche comme ça dans le monde. Nombreux sont ceux qui croyaient que la vie serait facile, maintenant tout le monde regrette d'avoir laissé le bénéfice du doute à qui a osé dire ça. Moi le premier, je hais mon père pour la merde dans laquelle il m'a mis en me foutant dehors.

— Barre toi d'ici gamin, tu fais chier, me lança un homme en me poussant du banc où je m'étais installé.
— Lâche moi connard, crachais-je en lui rendant son coup.
— Mauvaise pioche petit.

Il rigola avant d'enfoncer son poing dans ma mâchoire, me faisant tomber au sol. Ses pieds rencontraient abondamment mon estomac, et ma tête. La douleur me montait, alors que mon corps se recroquevillait sur lui-même pour l'empêcher d'attendre à nouveau les zones déjà bien touchées. Il m'avait battu sous les regards des passants qui ne jugeaient pas nécessaire d'intervenir. Un homme d'à peu près mon âge se décida enfin à intervenir, mais l'homme en avait déjà fini. Il m'aida à me relever, et me raccompagna dans un endroit un peu plus fermé avant de me laisser seul, encore.

Les blessures présentes sur mon corps ne se comptaient plus sur les doigts de la main, elles se comptaient en centaine. Les coups de couteaux, les cicatrices créés par des coups de feu, les coups reçus. Mon corps en portait les marques, et ne cicatrisait plus autant qu'avant, mon corps était devenu un putain de jeux pour les autres, et un supplice pour moi. La violence gratuite infligée par les sdf en quête de nourriture est la pire, ils sont intraitables sur leurs coups. Soit tu as de la change et ils finissent par abandonner, soit tu y passes réellement, et nombreux sont ceux qui sont morts sous mes yeux.

J'ai toujours eu des coups de chance, je n'ai jamais succombé à leurs coups. Je me souviens juste que certains ont réussi à me foutre dans le mal le plus profond, j'ai frôlé le comas la plupart du temps. Rien ne m'empêchait de ne pas les laisser continuer, je me laissais toujours porter par les coups. Je ne me défendais pas, pas tant que je me disais que ma vie ne pouvait devenir meilleure. Je la voyais comme un échec permanent, pas comme une espèce de réussite. Tout à foiré, rien n'a jamais marché.

Même le jour où j'ai voulu me jeter du haut d'un pont je n'ai pas réussi, j'ai eu le regret de voir l'image de ma mère à ce moment-là. Elle m'aurait détesté de l'avoir fait. Et tu ne te le serais jamais pardonné. Ma faiblesse d'esprit me buttait comme une merde, je subissais ma propre vie.

Les rues défilaient sous mes yeux, à la recherche de la mienne. Mon petit coin me manquait, je voulais le retrouver et me morfondre comme à chaque fois sur mon sort. Le seul repère que j'ai eu à ce moment, c'est le clochard qui habite le coin de la rue. Il marchait, il errait comme tous les jours. Chacune de ses journées ressemblait aux miennes, on a tous les mêmes journées. On ne fait rien si ce n'est que errer comme des merdes, et manger dans les poubelles, comme des putains d'animaux. On faisait putain de pitié.

𝗧𝗛𝗘 𝗕𝗢𝗬 𝗪𝗛𝗢 𝗛𝗜𝗗 𝗕𝗘𝗛𝗜𝗡𝗗 𝗧𝗛𝗘 𝗗𝗘𝗩𝗜𝗟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant