Chapitre 16

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Aux premières lueurs du jour, Flocon ouvrit les yeux. Il bailla et se redressa. Aussitôt, loin de la chaleur du corps de ses amis, le froid l'atteignit. Il frissonna. Même s'il savait que son corps s'habituait rapidement aux changements de température, les premières lunes étaient toujours difficiles.

- Bien dormi ? l'interrogea le loup noir en baillant à côté de lui.

Flocon fit quelques pas et grimaça. Ses pattes lui étaient douloureuses mais surtout, il sentait l'air glacé sur son moignon, qui faisait comme une sensation de brûlure. Il inspira profondément pour refouler la douleur et répondit à son ami.

- J'ai vu mieux, mais ça va, et toi ? ajouta-t-il en scrutant les yeux verts du loup qui semblait épuisé.

- Petite nuit aussi, souffla-t-il en guise de réponse

Ouragan le rejoignit et regarda autour d'eux.

- C'est beau quand même...

Flocon suivit son regard vers le ciel qui prenait des teintes rosées. Il devait reconnaître que ce n'était déplaisant a voir. Des nuages restaient bloqués autour des montagnes, leur donnant la possibilité de voir le ciel qui devenait bleu au fur et à mesure que le soleil arrivait.

- Il est où Topaze ? demanda tout à coup le loup noir, surpris.

Flocon se tourna vers les deux louves qui venaient de se réveiller à leur tour. Le Guérisseur n'était plus là.

- Il ne va tarder à revenir, lui répondit Edelweiss, d'une voix endormie. Je crois qu'il est parti chasser.

A peine avait-elle prononcé ses mots, que du coin de l'œil, Flocon perçut le vieux loup au loin. Ce dernier avança rapidement vers eux, un animal dans la gueule. Il les rejoignit promptement et déposa un mulot au sol.

- C'est pour toi Flocon, lança le Guérisseur en s'approchant de lui.

L'intéressé resta un instant interdit.

- Mais... et les autres ?

- Tu en as besoin, le rassura Ouragan. On ira chasser une plus grosse proie plus tard, ne t'en fais pas.

Le loup blanc acquiesça, peu convaincu. Il renifla le mulot. L'odeur de sang fit gronder son estomac et il l'engloutit aussitôt.

- Comment va ta patte ?

Flocon lécha le sang qui coulait sur sa fourrure avant de répondre à Topaze.

- Ça va, mentit-il pour ne pas l'inquiéter davantage bien que cette dernière commençait à le lancer de manière préoccupante.

Topaze hocha la tête et se tourna vers le reste de ses camarades.

- Si tout le monde va bien dans ce cas, nous pouvons reprendre la route. Avec un peu de chance, nous arriverons chez le Sans-griffe cette nuit.

Flocon soupira soulagé. Il pouvait tenir une lune de plus mais il avait des doutes si leur périple durait plus longtemps.

Mimosa passa à côté de lui.

- Elle a quand même un aspect étrange ta patte, lui glissa-t-elle à mi-voix.

Le loup blanc sentit son cœur s'accélérer.

- Comment ça ?

La jeune louve haussa les épaules.

- Je ne m'y connais pas trop mais quand ça prend une autre couleur, c'est pas vraiment normal.

Flocon serra les crocs. C'était bien ce qu'il craignait. La nuit avait été particulièrement agitée, son moignon avait été d'autant plus douloureux.

- Je vais bien, affirma-t-il en essayant d'accélérer le rythme pour rattraper ses camarades.

Mimosa lui jeta un coup d'œil dubitatif qu'il ignora. Il avait hâte de retrouver ce fameux Sans-griffe pour que toute cette histoire s'arrête et qu'ils puissent se concentrer sur leur vrai but, trouver le remède.

***

- Flocon !! Attention !

La voix de la jeune louve le sortit de ses pensées, encore. Depuis un moment, il n'arrêtait pas de tomber dans une sorte de somnolence. Il avait la tête lourde, tous ses membres lui étaient douloureux mais surtout plus il avançait plus la douleur de son moignon irradiait son corps. D'autant plus qu'il avait chaud.

- Évite de te coincer une deuxième patte, grommela le loup noir devant lui.

Flocon cligna rapidement des yeux pour se maintenir éveillé. Il ne savait pas bien ce qu'il lui arrivait, mais il se doutait bien que c'était lié à sa blessure. Le loup blanc regarda devant lui. Ses amis lui parvinrent flous mais il les voyait encore. Le soleil déclinait à présent lentement dans le ciel. Les couleurs dérivaient peu à peu vers le rose-orangé. Son regard bascula vers les névés autour d'eux. La neige étincelait au soleil. Il se surprit à penser à vouloir se rouler parmi elle, pour se rafraîchir.

Sa patte avant buta contre une pierre, le ramenant à la réalité. Le loup blanc contracta la mâchoire. Décidément il avait du mal à tenir le coup.

***

Flocon souffla bruyamment. Rester éveillé devenait de plus en plus compliqué, d'autant plus que la nuit était installée. Des yeux verts se tournèrent vers lui dans l'obscurité.

- Flocon ? Hé !

La voix de son ami parut venir de loin, très loin... Sa tête devint tout à coup très lourde, et sans Ouragan, il se serait effondré sur les rochers.

- Je suis fatigué... murmura-t-il, la voix endormie.

- Je sais, on arriva bientôt. Courage.

Le loup noir le soutint pour qu'il puisse se remettre à marcher.

- Topaze est parti devant pour voir où était le Sans-griffe. On n'est plus très loin.

Flocon acquiesça silencieusement. Il avait hâte de pouvoir s'allonger et de dormir.

Ils marchèrent ainsi pendant un long moment, dans l'obscurité. Par moment, il entendit Topaze parler avec ses camarades mais il ne comprit pas ses paroles. Il devait se concentrer sur une unique chose : marcher et ne pas s'endormir. A travers ses paupières qui devenaient plus lourdes à chaque pas, il vit tout à coup de la lumière. Cela le réveilla un instant et un regain d'énergie l'envahît. Il accéléra le pas.

- Doucement Flocon, lui recommanda le Guérisseur alors qu'il s'apprêtait à le dépasser.

La tanière du Sans-griffe se dessinait dans la nuit. Sans hésiter, la petite troupe avança vers elle. Flocon sentit tout à coup sa tête lui tourner. Des étoiles dansèrent devant ses yeux. Oh non ! s'alarma-t-il intérieurement. Mais il ne put lutter. Il fit quelques pas de plus et il s'effondra sur le sol, le sommeil l'emportant.

Il perçut tout de même des bruits, les voix de ses amis. Il sentit qu'on l'examinait. Quelque chose toucha son moignon, il tressaillit aussitôt. Mais la douleur ne lui suffit pas pour le réveiller. Un objet s'enfonça dans son flan et le sommeil se fit plus lourd, et il sombra dans un monde sans rêve.

Terre des loups Tome 3 - Le remèdeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant