Chapitre 13

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Le nouvel éveil de l'hyperactif se fit dans un brouillard des plus entêtants. Sans doute avait-il dormi des heures durant, et pourtant... Il se sentait fatigué, la tête extrêmement lourde et ses épaules, écrasées d'un poids bien trop important à supporter. Aucune pensée particulière ne sortit du lot dans son esprit saturé d'informations. C'était justement là le problème : il y avait tant de choses en lui qu'il ne savait pas sur quoi se concentrer. Il choisit d'ailleurs de ne s'attarder sur rien. Il venait de se réveiller alors... Il valait mieux qu'il s'accorde le temps adéquat pour parvenir à réfléchir plus tard. Pour cela, sans doute devait-il se lever, faire un effort qui lui donnerait l'occasion de réveiller chaque cellule de son corps, chaque muscle, chaque membre. Mais il ne bougea pas. Trop fatigué. Epuisé. Combien de temps avait-il dormi ? Aucune idée. Peut-être dix minutes. Peut-être deux heures. Ouvrir les yeux l'aida un peu : le ciel se parait doucement de rosé. Il faisait toutefois encore suffisamment jour pour qu'il n'ait pas besoin d'allumer la lumière. Néanmoins, il ne savait pas quoi penser, ni ce qu'il était censé faire. Se lever, ou bien rester couché ? Lui en voudrait-on de se reposer alors qu'il n'était même pas chez lui ? De toute façon, c'était Jackson qui l'avait remis au lit, alors... Stiles fronça les sourcils. Jackson. Oui, Jackson. Jackson, qu'il avait appelé au secours parce qu'il menaçait de s'effondrer dans le couloir. Jackson, qui l'avait porté. Jackson, qui s'était montré – il s'en rendait compte à présent – inquiet.

- Est-ce que t'es encore là ? Murmura-t-il en refermant les yeux.

Depuis le temps qui avait dû s'écouler, le sportif avait déjà dû rentrer chez lui, retrouver sa super famille, ses supers parents, sa super vie... Si ce genre de réflexions ne suintait pas un peu la jalousie ? Peut-être un peu, oui. Peut-être qu'effectivement, une certaine amertume s'insinuait en lui alors qu'il se rendait compte que l'entièreté de son cerveau était réveillée. Forcément, souvenirs et émotions étaient de la partie. Et là, seulement là, les graines plantées par Jackson commençaient à éclore. Si Stiles s'était bien rendu compte que la manière dont le traitait son père le rendait triste, il voyait désormais la différence, sans toutefois en être complètement conscient pour l'instant. Disons qu'il savait que les parents de Jackson, bien qu'adoptifs, aimaient leur fils et qu'ils l'acceptaient comme il était, en leur âme et conscience. Si monsieur Whittemore avait l'air hautain, le regard qu'il posait sur le blond les rares fois où l'hyperactif les avait aperçus ensemble ne trompait pas : il était fier de lui, fier de ce fils pour qui il voulait le meilleur. Et lui ? Lui, Stiles Stilinski ? Ces derniers temps, il devait nettoyer chaque poignée de porte qu'il touchait avec du gel hydroalcoolique. Comme s'il était sale. Comme un parasite, une bactérie. Les seuls regards auxquels il avait eu droit dernièrement étaient des regards de haine ou de dégoût. Ou les deux. Et Jackson qui avait vu la manière dont Noah le traitait. Il n'avait pas assisté à grand-chose, néanmoins, impossible pour lui de ne pas avoir remarqué la froideur du shérif à son égard. Ses paroles glaciales. Ah, elle était belle l'image qu'il lui avait renvoyée... L'image d'un hyperactif pitoyable détesté par son propre père. Et après, il osait s'étonner du fait que Whittemore le prenne pour un con les quelques fois où ils se voyaient au lycée ? La bonne blague... Il se mit également à penser à ce devoir qu'ils devaient faire en binôme et qu'ils avaient à peine commencé chez lui. Stiles soupira. Avait-il réellement besoin d'une préoccupation supplémentaire sachant qu'il se trouvait chez Lydia, que son père l'avait potentiellement – il lui accordait encore un peu le bénéfice du doute – empoisonné, que Jackson avait semblé s'échiner à l'aider... Alors non, penser à ce devoir ne l'arrangeait pas tellement. Et puis même, il n'y avait pas que ça.

Si Noah Stilinski avait réellement cherché à l'empoisonner et s'il avait véritablement sous-entendu, dans l'échange entre lui et Jackson sur son propre téléphone, qu'il songeait à l'envoyer dans un camp de conversion... Pouvait-il songer à rentrer chez lui au moins passer la nuit ? C'était idiot, mais cette idée le fit frissonner comme si au fond, son instinct le mettait déjà en garde contre ces choses qu'il n'avait pas voulu voir avant. Les graines semées par Jackson étaient là et maintenant qu'il était plus calme et « lucide », Stiles commençait à entrevoir la possibilité dans son ensemble, pour ne pas dire qu'elle lui paraissait de plus en plus probable au vu de ce qu'il avait vécu. Pour l'instant, Noah ne l'avait pas maltraité au sens propre du terme... Il l'avait isolé, traité comme s'il n'était qu'un vulgaire déchet. L'hyperactif devait-il s'estimer heureux de ne pas avoir eu à subir de violence directe ? Il n'arrivait même pas à s'estimer heureux d'avoir échappé aux poings de son père. Noah n'était pas du genre violent... Mais Stiles ne le pensait pourtant pas non plus si peu ouvert d'esprit. Et pourtant, c'était le cas. Toutes les certitudes qu'il avait à son égard s'envolaient les unes après les autres. S'il rentrait, quel accueil lui réserverait le shérif ? Devait-il s'attendre à une nouveauté de sa part ? Une attaque ? Une progression dans l'échelle de la haine ? Et cette histoire d'empoisonnement... Elle existait et il ne pouvait décemment plus la nier dans son intégralité. Stiles se rendait bien compte qu'il continuait de se sentir faible et que la manière dont il s'était évanoui au centre commercial... Ce n'était pas dû au hasard, comme tous ces moments où il s'était senti mal, trop fatigué pour que cela soit naturel. Et il le savait, au fond. Il n'avait juste pas voulu le voir, parce que sur le coup, cela lui paraissait aussi invraisemblable que douloureux.

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