Le Serpent et l'Ordure [Gally]

40. Dors

- Putain, mais lâche moi la grappe !

Pour la dixième fois depuis le lever du soleil et le début du petit déjeuner, Gally criait après quelqu'un.

- Il lui arrive quoi ? redemanda Thomas, en avalant une bouchée de son bol
- Qu'est ce que j'en sais, murmura Hedy, réellement perplexe
- Il s'est sûrement levé du mauvais pied, exposa Minho

La jeune femme hocha la tête, puis porta son regard sur le principal concerné, qui venait de se servir à manger. Il s'assit juste en face d'elle, séparé simplement par le feu, et la foudroya du regard tout en avalant son petit déjeuner. Hedy pouffa en voyant son air énervé mais son rire ne parut pas le détendre, alors elle se tourna vers Minho et commença à lui parler. Elle ne comprenait pas tellement pourquoi il agissait ainsi : ce n'était quand même pas en raison de leur discussion nocturne ?

Puis, après ce petit déjeuner, Minho, Thomas et elle partirent plus loin, en continuant de discuter, mais Frypan exprima son besoin d'aide aux fourneaux et Hedy se porta volontaire. La jeune femme passa donc sa matinée avec lui, à laver la vaisselle, puis à préparer le repas du midi, tout en parlant, mais pas trop, parce que cuisiner nécessitait de la concentration.

L'après midi, elle se laissa tomber dans leur petit coin, mais personne ne vint. Hedy ne savait pas réellement si elle s'attendait à voir Gally, mais fut déçue de voir qu'elle resta ici seule. Le soleil la détendit et celui ci l'aida à plonger dans un sommeil léger, sans trop savoir si elle en avait réellement envie. Quand elle rouvrit les yeux, Hedy constata que la fin de l'après midi était déjà là : le corps endormi, l'esprit comateux, elle se redressa et rejoint le camp. Une fois là bas, elle trouva Brenda et s'installa près d'elle : les deux jeunes femmes commencèrent à discuter timidement.

Un petit moment plus tard, Frypan tapa sur la grande marmite avec sa louche, en criant :

- Venez manger !

Elles se regardèrent un instant, souriantes, et marchèrent jusqu'à atteindre, avec comme but final : se servir. Puis, elles se posèrent auprès de leurs amis et parlèrent tout en mangeant. Étonnamment, Gally se trouvait avec eux, mais, encore une fois, sa grande mauvaise humeur se montrait.

- Tu es drôlement rabat joie, je trouve, grommela Hedy, d'un air agacé

Un grand silence envahit le groupe, et même les mouettes se turent : tous s'attendaient, à nouveau, à les voir s'étriper. Mais, tout simplement, Gally laissa ses yeux poser sur la jeune femme, qui l'interrogeait du regard. Mais il ne dit rien, et continua de manger, l'air pensif. Les discussions ne furent plus les mêmes, tant la situation était étrange.

Puis, la nuit arriva et tous allèrent se coucher.

Au fur et à mesure, les jours défilèrent, et les deux amis ne se parlaient plus, ce qui ne paraissait pas troubler Hedy. Elle semblait s'y être faite en quelques heures à peine.

Deux semaines environ étaient passées, et Hedy, en quête de repos et de paix, se trouvait actuellement dans leur endroit, mais seule. Son tee shirt était décousu, alors elle essayait de le réparer, mais ses compétences en couture n'étaient pas des plus élevées.

- Merde, souffla t elle après s'être piquée le doigt pour la sixième fois.
- Ça va ? Tu t'es blessé ? s'inquiéta une voix derrière elle, qu'Hedy reconnut aussitôt.

Elle s'était retournée et l'examinait avec un sourire amusé, mais Gally avait lui une expression beaucoup plus complexe.

- Pourquoi ? Tu veux me faire un bisou magique ?

A ces mots, il fondit sur elle et l'embrassa à pleine bouche, affalé à ses côtés. Elle lâcha ce qu'elle avait dans les mains et posa ses mains sur son torse. Il la laissa chuter tout doucement en arrière, la main posée derrière son crâne, pour empêcher qu'elle se blesse. Gally s'éloigna, les yeux brillants, et Hedy l'observa. Elle pinça les lèvres, esquivant un sourire, et se redressa, toujours par terre, comme le faisait aussi son ami.

- J'aurais pas dû, confessa Gally, le regard fuyant
- C'est vrai. Comment je fais maintenant, pour ne pas avoir envie de toi ?

Il se tourna vers elle.

- Qu'est ce qu'il t'est arrivé, pendant tout ce temps ? Pourquoi tu ne me parlais pas ?
- Je croyais que tu voulais me tuer.
- Qu'est ce que tu es bête.
- C'est toi l'idiote. Pourquoi tu n'es pas venue me parler ?
- Je sais pas.

Hedy sourit et se rapprocha à nouveau.

- J'ai encore envie, grommela t elle
- Tu es incompréhensible, tu viens me dire que tu le veux, mais on ne s'embrasse pas, et ensuite, on s'ignore, soupira t il
- C'est vrai. Désolée.

Le jeune homme eut l'air surpris, et l'applaudît, impressionné.

- Bravo. Tu as dit "désolée".
- Pitié, on peut pas passer à autre chose ?
- Comme quoi ? demanda t il, innocemment
- Je sais pas, répondit elle sur le même ton

Mais ce prétendu non-savoir ne dura pas longtemps, puisqu'elle rampait, et s'arrêta sur Gally. Presque automatiquement, il serra sa taille pendant qu'elle jouait avec lui. Les doigts de la jeune femme glissait sur le front de Gally, s'amusant entre la peau de ses lèvres et de ses joues.

- Arrête, murmura Gally

Hedy sourit, et posa délicatement ses lèvres sur celles du jeune homme. Ce dernier profita avec joie de cette sensation, qu'il avait tant désiré.

Quand ils s'éloignèrent, il l'observait, ravi.

- J'ai bien fait de venir te voir. Sinon, on aurait passé notre vie à ne pas se parler et on aurait manqué ça.
- Ç'aurait été bête.

Elle se releva et s'étira, pendant qu'il conservait son regard sur elle.

- Reviens, soupira t il.

Elle fit semblant de réfléchir, le doigt sur le menton.

- Je ne sais pas, je me tâte.

Il la regarda d'un air désabusé, et elle ricana, avant de le rejoindre par terre.

- Tu m'as manqué, tu sais.
- Toi aussi. Un peu, le taquina t elle.

Il ne prêta pas attention à ses mots, préférant baiser encore et encore son cou, descendant peu à peu.

- Concentration, jeune homme, soupira t elle.
- Comment veux tu que je sois concentré ?

Elle ricana et posa sa tête sur son épaule, en fermant les yeux.

- Je pourrais dormir ici.
- Alors dors, dormons.