20. Inflitré

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Durant les quatre premiers jours de leur convalescence, Gally passa son temps à pleurer, à se haïr, et Hedy se contentait de l'ignorer. On leur avait ramené des livres, alors elle tenta d'en lire un entièrement. Mais la plupart était ennuyeux, alors ils finissaient jetés par terre, déchirés. Les deux livres auquels elle resta accroché furent un roman d'un homme nommé George Orwell, et qui contait l'histoire d'une ferme où des cochons prenaient le pouvoir. Elle le trouva fascinant à déchiffrer et à lire. Le second était Des Fleurs pour Algernon, où la situation de Charlie eut un écho bouleversant chez elle. Elle ne lâchait pas.

Hedy était même en train de relire ce dernier lorsqu'un nouveau docteur rentra dans l'infirmerie : les deux camarades ne l'avaient jamais vu.

- Nouveau ? l'interrogea Hedy, toujours en train de martyriser les membres du WICKED.
- Encore mieux. Infiltré, rétorqua l'homme

La jeune femme en lâcha son livre de surprise et se tourna vers Gally, pour être sûre d'avoir bien entendu.

- Est ce que je suis censée vous menacer ? demanda t elle, perplexe. Vous êtes un danger ?
- Non, je suis là pour vous sauver.
- La dernière personne qui a dit ça nous a enfermé ici, grommela la jeune femme.
- Ils vont essayer de prendre votre sang dans les jours qui viennent, ils sont désespérés.
- Je vois.
- Je fais parti du Bras Droit.
- Ça fait flipper, répliqua Hedy.

Son interlocuteur laissa ses lèvres se tordre en un rictus.

- Sinon, c'est sympa tout cela, mais comment vous nous sauvez ? s'agaça la jeune femme.
- Un plan très simple : vous faites semblant d'être atteint de la Braise. Ils vous feront partir de là, ils sont flippés de cette merde.
- Et si ils font une prise de sang pour vérifier ?
- Ils ne le feront pas.

Hedy plissa le nez, en pleine réflexion.

- Et ton pote il est muet ?
- Non c'est simplement une larve depuis quelques jours.

Le faux docteur eut une moue soucieuse.

- J'espère qu'il ne nous ralentira pas.
- Il a pas intérêt, grogna t elle. Sinon je le tire par la peau du cul. Ou je le laisse. On verra selon mon humeur.

L'infiltré hocha la tête, ne sachant pas quoi répondre, et s'éloigna :

- Je vous laisse. A demain.

Hedy le salua, puis pivota vers Gally.

- Content ?

Le jeune homme ne répondit pas, il se contenta de fixer le vide comme depuis une semaine.

- Gally j'aimerais bien t'entendre donner un signe de vie. Ce serait sympa.
- Hedy, tais toi.
- Tu sais dire que ça. Mais c'est déjà un signe de vie.
- Ta gueule, serpent.

Hedy soupira, et s'étala sur le lit.

- C'est hilarant, j'allais prendre mes affaires avant de partir. Mais on a pas d'affaires, s'amusa la jeune femme
- Ferme la.
- Et toi sors toi les doigts du cul, connard.

Gally lui jeta un livre à la tête. Il manquait d'énergie pour tenter de la violenter, mais qu'est ce qu'il y en avait envie.

Puis, dans la soirée, un docteur rentra dans l'infirmerie et, tandis qu'il préparait une boisson pour apaiser leurs douleurs, Hedy jeta un coup d'œil à son ennemi, qui la regardait déjà.

- On fait quoi ? articula t il en silence
- Mord moi.
- Quoi ?
- Dépêche ordure.

Gally se laissa envahir par un sentiment d'agacement et plongea avec bonheur ses canines dans la peau du bras de son ennemie. Il la mordit jusqu'au sang -pour le plaisir- et s'éloigna.

- Ahh ! hurla la jeune femme. Il m'a mordu ! Il est totalement fou !

Gally, les dents pleines de sang, comprit trop tard que c'était lui qui allait jouer le Fondu. Le docteur, prit de panique, s'enfuit de la pièce et revint dans la pièce avec le médecin en chef.

Ils discutèrent à voix basse en regardant à la fois Gally et Hedy, qui angoissaient en silence. Pourvu que leur plan fonctionne.

Le médecin en chef s'avança vers le duo et s'agenouilla -à bonne distance de l'un et de l'autre, puis leur murmura d'un ton doux, comme s'il avait peur d'énerver Gally, qu'il croyait malade.

- Nous pensons que vous êtes atteint de la Braise. C'est dommage, soupira t il, visiblement éreinté.

Hedy se mordilla les lèvres, stressée, entièrement dans son rôle.

- Nous allons devoir vous faire sortir de la Dernière Ville. Vous comprenez, nous ne pouvons pas laisser la maladie ici sans retenue, poursuivit le docteur en chef

La jeune femme éprouva une explosion de joie mais, fondit en larmes -des larmes de crocodiles- à l'extérieur. Elle prenait ce rôle très à coeur, constata avec agacement Gally lorsqu'elle se laissa tomber dans ses bras, avec un rictus qu'il fut le seul à voir. C'était un être machiavélique.

Gênés par ce torrent d'émotions qu'ils avaient provoqué, les deux docteurs s'éclipsèrent.

Dès que la porte fut close, Hedy s'éloigna de Gally en tirant la langue d'un air dégoûté, frottant son corps d'un geste automatique.

- C'est horrible de te toucher comme ça.
- C'était horrible pour moi aussi.

Le soir même, Mady vint leur donner leur repas, protégée entièrement, et s'enfuit rapidement.

- Ce qu'ils sont trouillards, ricana Hedy, en commençant à manger.
- Bon Dieu je ne pensais pas que tu étais aussi bavarde.

Elle avala sa bouchée et lui jeta la pomme qui devait être son dessert. Il la reçut sur l'épaule, et il leva son regard noir sur la jeune femme, qui l'ignora, continuant de manger son repas.

- Je pense qu'ils ont mis des somnifères, murmura Hedy. Ils veulent se débarrasser de nous le plus vite possible.
- Pourvu qu'on se retrouve à des milliers de kilomètre l'un de l'autre, espéra Gally.

Hedy hocha vivement la tête.

Avant même qu'elle ait le temps de finir son repas, Hedy s'endormît profondément, ses livres dans ses mains, au cas où.

Le lendemain matin, dans la nuit, deux soldats arrivèrent et les saisirent dans leur sommeil. Ils furent jetés dehors.

Le duo, encore dans les vapes, se consulta du regard.

- Super, grommela la jeune femme. On fait quoi maintenant ?

Un homme s'avança vers eux.

- Vous êtes les jeunes que Nicholas est allé voir hier ?
- Qui est Nicholas ? interrogea Gally
- Infiltré.
- Oui, acquiesça la jeune femme
- Alors suivez moi.

Ensemble, ils marchèrent pour atteindre un camp, que l'homme, Elliott, présenta comme un groupe de résistant face au WICKED.

Le Serpent et l'Ordure [Gally]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant