5. La Grande guerre

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Les premiers temps ne furent pas de tout repos : au début, ils s'ignoraient royalement tout en se lançant des regards noirs à toute occasion.

Mais cela n'handicapaient pas les réunions, dont celle qu'il y eut à son arrivée. Après qu'il se soit rappelé de son nom, qui était Gally, les Blocards se rejoignirent dans la cabane du chef, c'est à dire Alby. Ils tentèrent de décider dans quel groupe il pouvait se joindre, et, en étudiant son physique, ils en conclurent qu'il était apte à rejoindre ceux qui construisaient, les Bâtisseurs. Évidemment, car le destin aimait se jouer d'Hedy, le nouveau, ce Gally, était dans la même équipe qu'elle. Elle le compara à un parasite, si vicieux qu'il l'envahissait, et en le regardant, elle eut une pulsion animale : celle de le mordre à sang, de lui crever les yeux. C'était la première fois depuis son arrivée au Bloc qu'elle détestait une personne autant que lui.

Dès que tout le monde sortit de la salle, Hedy s'approcha d'Alby et de Newt, assez mécontente. Ils la dévisagèrent avec curiosité et elle commença à ouvrir la bouche :

- Sans rire, la seule personne que je déteste ici, vous la mettez dans le même groupe que moi ?
- C'est la vie, soupira le chef
- Non, dans mon cas c'est de la torture, rétorqua la jeune femme, agacée
- Écoute, ça fait même pas une journée entière qu'il est là, tu ne peux pas l'exclure d'ici juste parce qu'il ne te plaît pas, trancha le blond

Elle grogna de colère et croisa les bras.

- Laissez-moi devenir Coureuse à nouveau, alors, négocia t elle
- Non, Hedy.

Elle clôt ses yeux, exaspérée, et se massa l'espace entre les sourcils,

- S'il fait quoi que ce soit de répréhensible.., grommela t elle
- Tu nous le diras, on te fait confiance là dessus, répondit Newt avec un rictus
- Vous avez bien raison.

Hedy leva les yeux au ciel, et sortit de la cabane, l'allure vive, se précipitant vers l'endroit où elle se réfugiait quand la colère devenait trop forte : dans les bois. Une fois entourées des grands arbres, elle tapait sur des bûches pour les casser en deux : ces mêmes morceaux de bois étaient utilisés le soir avec le feu de camp. Les Blocards étaient chanceux, puisque Hedy s'énervait souvent : ils ne manquaient alors ainsi jamais de bois.

Les premiers jours de travail ensemble furent simplement très silencieux : Hedy se taisait et réalisait ses tâches seule et en silence. A son grand dépit, Gally s'intégra assez vite. Pour les fêtes, il réalisa une sorte de boisson étrange, un liquide dorée que la jeune femme soupçonnait être de l'urine, sûrement à tort. Elle se promit de ne jamais y toucher, contrairement à ses camarades, qui, eux, buvaient avec abondance le liquide brûlant. La plupart du temps, la première gorgée les faisait vomir, ce qui provoquait un rire bruyant de Gally. Ce dernière s'époumonait toujours autant de ces scènes, ce qui contribuait à la méfiance d'Hedy.

La véritable déclaration de guerre entre les deux arriva une belle matinée de ce qui paraissait être le printemps. Le soleil réchauffait les membres de leur équipe et c'était fort agréable de travailler ici dans de telles circonstances.

- Je vais m'occuper de couper du bois, annonça Hedy, en prenant la hache qui était au sol.

Ses camarades lui firent un signe de tête pour approuver ses dires et elle pivota sur elle pour se diriger vers la clairière. Mais Gally eut la merveilleuse idée de lui demander, d'un ton mi provocateur mi soucieux :

- Tu es sûr que tu peux le faire toute seule ?

Hedy s'arrêta aussitôt de marcher, se figeant sur place, et leurs camarades coupèrent leur respiration. Ils connaissaient la jeune femme, et son plus grand défaut : sa fierté. Intérieurement, chacun fit ses adieux au nouveau, qui venait de risquer sa vie.

La jeune fille fit demi tour et marcha jusqu'à rejoindre le garçon, qui contempla le visage de celle ci devenir froid et empli d'une rage qu'il éprouvait aussi.

- Le nouveau, je suis là depuis plus longtemps que toi, d'accord ? Je connais cent fois mieux cet endroit que tu ne pourras jamais le faire.

Elle planta son doigt dans son torse, comme pour tenter de lui arracher le cœur.

- Je te conseille de me respecter, le nouveau. Sinon ça va être compliqué pour toi. Compris ?

Elle haussa les sourcils comme pour le défier et s'éloigna, tandis qu'il ne répondait pas.

La grande guerre avait commencé.

Le Serpent et l'Ordure [Gally]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant