Le Prince et l'Alchimiste (REECRITURE)

Chapitre 26 : Envers et contre tout

La nuit était tombée plus vite que la veille. Sillya et Akélia avaient longé la route en ramassant les branches tombées sur les bas-côtés. À peine une vingtaine de minutes après, elles étaient rentrées au campement. Les températures faiblissaient, le soleil tardait moins, et les oiseaux chantaient plus doucement.

L'Akryla accueillait l'hiver avec une sérénité apaisante. Pourtant, l'alchimiste redoutait la tempête à venir. Les nuages noirs qui se rapprochaient n'auguraient rien de bon pour leurs recherches. Sillya la rassura en lui assurant qu'elle retarderait les Tigres sur leurs traces. Mais cela n'eut pas l'effet escompté.

Lorsqu'elles retrouvèrent l'air humide de la caverne, l'estomac d'Akélia était toujours noué d'appréhension. Les murs sentaient l'eau de pluie et le renfermé, mais la chaleur que conservait l'espace était la bienvenue.

Sillya laissa le tas de bois à un endroit quelconque et rejoignit son frère qui parlait avec Ayan. Le garde distribuait des consignes pour la nuit : les rondes seraient faites à trois, plus courtes et chacun devait garder une arme près de lui. Akélia lança un regard à Kayden qui n'avait pas bougé. Peut-être avait-il osé s'adresser à Ayan pour lui faire du danger, ou bien c'était l'instinct de ce dernier qui le poussait à relever le niveau de sécurité.

L'alchimiste rassembla des cailloux pour former le feu de camp qu'ils allumeraient une fois les ténèbres installées dehors. Elle prit tout son temps, notamment car elle ignorait quoi faire ensuite : Aymeric continuait de parler à Adrien et ce dernier continuait d'éviter son regard lorsqu'elle osait lui en lancer un. Elias et Laïdan faisaient l'inventaire des provisions qu'ils avaient tandis que Sillya et Raffaella étalaient les couchettes.

Elle finit par se décider à faire elle aussi le point sur ce qu'elle avait sur elle. Il lui restait peu d'ingrédient non-transformé, mais elle trouverait sans doute qu'elle chose à préparer pour occuper son temps.

Elle s'assit dans le recoin où gisaient ses affaires.

—Noly ! Noly !

Elle tourna la tête vers Kayden en le fusillant du regard. Il lui fit signe – du regard seulement – de venir près de lui. Elle attrapa sa sacoche et traversa la grotte. Elle s'assit de nouveau à ses côtés en retirant sa cape pour la drapée sur lui. Elle savait qu'il peinait à se réchauffer. Le geste lui valut un sourire.

—Alors, le prince qui en pince pour toi t'évite ? railla-t-il à voix basse.

Ses nerfs se tendirent. Elle sortit les dernières plantes encore préparables et réfléchis à ce qu'elle ferait avec.

—Tu n'as rien trouvé de plus intelligent à dire ? rétorqua-t-elle sans parvenir cacher ses émotions.

Il se tut un instant et lorsqu'elle crut qu'il la laisserait travailler, il reprit :

—Je crois que les Tigres sont plus proches qu'on ne le pense.

Une bombe explosa dans les entrailles d'Akélia qui lâcha les fioles qu'elle tenait. Le verre tinta contre la roche sans se briser. Elle se tourna vers Kay qui observait le groupe s'activer.

—Le faucon, tout-à-l'heure. Il me suit depuis que je suis allié aux Tigres. Je crois qu'ils savaient que je te retrouverais avant eux.

La bile remonta dans la gorge d'Akélia. Seraient-ils non pas à plus jours d'eux mais à quelques heures seulement ? Allaient-ils les trouver dans la nuit et les tuer un par un ? Elle tenta de ne pas céder à la panique tout de suite.

—Qu'est-ce-qui te fait dire que ce n'est pas un faucon sauvage ?

Il pouvait se tromper. Il devait se tromper.