Chapitre 15: Mémoire d'une décision

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Akélia reposa la tisane chaude sur ses jambes. Ses doigts enroulées autour, elle savourait la sensation de chaleur qui s'en dégageait. Ferdinand lui faisait face, un air grave sur le visage. Adrien déposa une couverture les épaules de l'alchimiste. Il restait debout à côté d'elle, à l'affût du moindre signe de faiblesse. Comme elle tenait à garder le peu de dignité qui lui restait, elle troqua son regard vague par une expression plus sérieuse et présente.

La fenêtre au bout de la pièce faisait entrer un courant d'air qui caressait les joues de l'alchimiste. Sa précédente vision avait été violente, différente des autres. L'absence de stupéfaction chez l'herboriste devant elle prouvait qu'il savait quelque chose à ce sujet. Cependant, elle ne tenait pas à en parler devant son employeur temporaire.

—Tu devrais aller rejoindre les autres, lui indiqua-t-elle avec un sourire qui se voulait rassurant. Je doute qu'ils nous laissent du bouillon si tu ne les contiens pas un tant soit peu.

Adrien réfléchit un instant à sa demande puis posa une main sur l'épaule d'Akélia.

—Tu es sûre que ça va aller ?

—Certaine, claqua l'alchimiste sans hésiter. Ne t'en fais pas.

Ses sourcils se froncèrent mais il acquiesça tout de même. Une fois qu'il eut refermé la porte du bureau, Ferdinand et elle entendirent ses pas dans l'escalier jusqu'à ce qu'ils meurent dans le brouhaha de la salle à manger.

Akélia n'attendit pas que son interlocuteur se lance, pressée d'en savoir plus.

—Ne traînons pas trop, je dois encore changer leurs bandages et les miens, notifia-t-elle en sentant son dos frotter contre les coussins.

C'était bien sûr un argument futile qui ne servait qu'à les faire aller à l'essentiel. Ferdinand ne releva pas l'état dans lequel elle se trouvait toujours, quelques heures à peine après la première bataille de sa vie. Et sa première rencontre avec la mort.

—Claryssa t'aidera pour ça, dit-il avant de soupirer. Bien, par où commencer...

Il frottait ses mains sur son pantalon, ne parvenant pas à trouver ses mots. Akélia, toujours aussi impatiente, l'y aida.

—Par l'explication des visions ? Et leurs origines peut-être ?

Elle était piquante, mais la fatigue, la peur et ses dernières émotions ne faisaient pas bon ménage en elle. Elle aurait bien besoin d'une nuit de sommeil sur autre chose que des cailloux.

Ferdinand passa sa main dans ses cheveux. Les reflets des flammes des chandeliers leur donnaient des sous tons argentés. Lorsqu'il riva enfin son regard de pierres précieuses sur elle, Akélia reporta son attention des papiers qui s'empilaient sur son bureau à lui.

—Ta mère t'a laissé car elle avait une mission à accomplir... Je n'en sais pas plus à ce sujet, et crois-moi j'ai bataillé pour obtenir le peu d'information que j'ai, anticipa-t-il avant qu'elle n'ouvra la bouche. Avant de partir, elle m'a demandé un service.

Toute la concentration de l'alchimiste fut captivée par son récit. Elle enregistrait chaque mot, de peur qu'il ne s'envole de son esprit.

—Elle m'a demandé de concocter un sérum d'Oblivisci. La plupart l'appel simplement l'Oubli puisque son premier effet est d'effacer la mémoire de celui qui l'ingère. C'est une invention des peuples originels du sud qui l'administraient en grande quantité chez les traitres et les condamnés à l'exil.

Il marqua une pause. De nouvelles questions fleurissaient dans la tête de l'alchimiste.

—Mais pourquoi ma mère a-t-elle fait ça ? bafouilla-t-elle en formulant l'une d'elles.

Le Prince et l'Alchimiste (REECRITURE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant