Chapitre 30 : Evasion

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La boue, l'odeur du sang et de la putréfaction accueillirent son réveil. Akélia releva la tête, les cheveux tout aussi sale que son visage souillé de terre. La nuit était bien avancée : le ciel commençait à virer aux teintes orangées. Les ombres des arbres autour d'elle formaient des monstres de ténèbres autour d'elle.

Lorsqu'elle eut l'idée de bouger ses jambes, ses liens la rappelèrent à l'ordre. Elle sentait à peine ses doigts gelés. La douleur avait laissé place à la glace, et celle-ci l'avait complètement anesthésiée.

Au moins avait-elle trouvé un repos -d'aussi mauvaise qualité soit-il. Chaque craquement la faisait sursauter, chaque mouvement à l'extérieur gonflait sa poitrine d'espoir et de terreur.

Que va-t-il m'arriver ? Je vais vraiment mourir ?

La peur qui pesait sur ses entrailles n'empêcha pas son estomac de gronder. Peut-être succomberait-t-elle à cause de la faim ou de la soif finalement. Sa langue était si sèche qu'elle ne pensait même pas pouvoir parler. Et elle ne s'y tenta pas.

Un homme entra dans la tente. Elle n'eut pas le temps de feindre le sommeil. Il s'accroupit devant elle. Les ténèbres ne parvenaient pas à masquer sa chevelure rousse relevée dans une queue-de-cheval à l'arrière de ses traits pincés. Akélia devina une balafre ressemblant à la marque d'un ours en diagonale de son visage.

—Mange.

Il lui tendit un morceau de pain devant les lèvres. Il ne la regardait même pas. L'alchimiste ne se gênait pas, elle. Elle tentait de trouver l'indice qui prouverait que ces brutes avaient des états d'âmes, sans succès.

Lorsqu'il eut marre du regad pesant que lui adressait la jeune femme entravée, il fourra la quignon dans sa bouche. Akélia n'essaya même pas de mâcher le pain aussi dur que de la roche.

Elle le lui cracha au visage. La nourriture tomba tristement dans la boue.

—Je ne mangerai rien de ce que vous pourrez me donner, grogna-t-elle en secouant la tête pour dégager les cheveux de son visage.

L'homme roux ricana en se levant.

—Laisse-toi mourir si ça t'amuse. L'or ne se préoccupe pas de l'état des victimes.

Elle serra les dents, témoin de la pourriture de l'âme devant elle.

—Vous massacrez des gens pour de l'argent. Vous êtes des monstres.

Son sang déjà glacé donna le ton à sa voix. Elle fusilla l'homme du regard. Il resta muet, ses yeux kaki dans les siens. Une dague fendit l'air, et se ficha dans une caisse derrière elle.

—Je te trouve bien bavarde pour une otage, articula la silhouette qui entra dans la tente.

Il lança une œillade à son comparse puis tourna son attention vers elle. Akélia le reconnut aussitôt : Chaol, celui qui avait voulu... La bile remonta dans sa gorge.

Elle tenta de garder son sang froid alors que l'homme s'approchait à pas de loup d'elle. Elle garda en ligne de mire ses chaussures sans soutenir son regard indiscernable dans l'obscurité. Sans se mettre à sa hauteur, il passa sa main sur la joue de la jeune femme, écartant les mèches de son visage. Akélia contint l'envie de mordre ses doigts tatoués à sa portée. Son contact la dégoutait, si elle avait eu quelque chose dans l'estomac, elle l'aurait sans doute régurgitée.

Chaol souleva son menton d'une poigne de fer. Un éclat pervers brillait en lui. Elle mordit sa joue. Ses mains gigotaient instinctivement dans son dos. Elle ravala un gémissement de douleur quand elle sentit une brûlure se propager dans ses avant-bras. Le froid piquait ses doigts comme un millier d'araignées enragées, elle avait l'impression qu'un cheval était passé sur son dos et se demandait même si elle serait capable de tenir debout. Elle voulut déglutir de nouveau mais la sécheresse de sa gorge la fit tousser.

Le Prince et l'Alchimiste (REECRITURE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant