Chapitre 13

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Françoise observa son compagnon marcher en long et en large dans l'appartement. Elle ne supportait pas de voir Corentin ne rien faire, ruminer et reporter sa frustration sur elle. Mais il était là, à errer comme une âme perdue, déprimé et bouillonnant de stratégies qui pourraient le sortir de sa torpeur.

—Pourquoi êtes-vous saisi de l'affaire déjà ? demanda-t-elle.

Elle jouait aux cartes sur la table de la salle à manger et jetait épisodiquement un œil dehors. Elle attendait des amies pour dîner et désespérait de ne pas voir son époux partir.

—Vous m'avez dans les pattes et vous ne le supportez pas, dit l'inspecteur d'une voix cinglante. Comprenez-moi lorsque je vous ai aussi dans mes pattes, c'est insupportable.

—C'est une habitude à prendre...

L'ambiance se tendit un peu plus quand la jeune femme posa une question qui lui brûlait les lèvres depuis qu'elle avait surpris Corentin de Calésie rentrer tard dans la soirée.

—Dites-moi, qu'est-ce que vous faisiez dans Bleunoie ? Je croyais que le commissaire Bouleau vous avait complètement démis de vos fonctions... ?

—Où est-ce que vous avez eu cette information que je traînais dans les rues de Bleunoie ?

—Eh bien...plusieurs de mes amies souhaitaient se rendre au cimetière et elles vous ont surpris en compagnie d'une charmante dame. Elles ne l'avaient jamais croisée auparavant, c'est bizarre...

Elle se tourna lentement vers lui. Statique, Corentin de Calésie chercha une explication simple. Il sut que les deux amies s'étaient, telles des criminelles, dissimulé derrière le petit muret du cimetière et remarqué la cour que faisait le jeune homme à l'inconnue.

—Cette femme était effondrée après l'événement de l'église, protesta Corentin en remettant en place son nœud à papillon. Je ne vois pas en quoi cela est un crime.

—Et vous croyez que je vais gober tout ça ?

—Vous m'accusez d'adultère ?

—Je me demande surtout ce que vous faisiez avec c'tte garce, bras dessus bras dessous alors qu'on l'a jamais vue !

—Elle est sans doute d'un village voisin, vous êtes tout de suite dans l'excès. Cette femme était tout simplement effondrée par la mort de sœur Marie et de père Jacques, elle venait se recueillir sur leurs tombes. J'allais partir lorsqu'elle m'a abordé et elle s'est tout de suite sentie mal.

—Vous êtes un gredin de Calésie, grogna Françoise. Vous n'êtes pas homme à bégayer comme ça quand je vous pose une question et là, vous hésitez. Si je suis victime de ce que je pense...

—Ce n'est pas le cas et arrêtez cette paranoïa, vous êtes pire que vos...amies qui se prennent pour des espionnes futuristes. Elles devraient me pister pour savoir où je vais maintenant, comme ça, vous seriez rassurée.

Conscient d'avoir communiqué à sa femme une idée qu'elle était capable de mettre en place, il mit son pardessus.

—Qu'est-ce que vous faites ?

—Ne m'attendez pas pour dîner, dit-il en se laissant apprêter.

La bonne lui remit son nœud papillon, passa la brosse sur le pantalon et aspergea le cou de son employeur de parfum floral. Tout de suite, Françoise fit une crise de jalousie et comme d'habitude, Corentin de Calésie sortit des appartements pour éviter qu'elle ne s'en prenne à lui. Il ne la comprendrait donc jamais. En permanence sur ses gardes, méfiante et humant chaque parfum qu'il pouvait transporter avec lui, elle ne le laissait pas en paix. Se croyant en dehors de tout soupçon, il eut la désagréable surprise de tomber sur Hermione Savrodec. Bien couverte, elle revenait de quelque part.

Le sang du bonheurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant